Houffalize. Maurice Cosyn. 1939

écrit par ReneDislaire
le 16/09/2020
Bois des moines. Une ligne de maisonnettes bien ardennaises marque la vieille route de Liège escaladant rapidement la côte.

Maurice Cosyn est le grand nom du tourisme par randonnée pédestre en Belgique et au Grand-Duché de Luxembourg.
Il s’y intéressa depuis 1920 et fut le créateur des sentiers ardennais (belges). Nous lui devons notamment le GR 57 (Grande Randonnée) en 1934.
Dans l’entre-deux-guerres le tourisme était élitiste. Mais bien des hôtels se sont installés à cette époque (les congés payés datent seulement de 1936, votés pour essayer d'enrayer la montée de l'extrême droite dans le suivi de la dépression de 1929).
Le Grand-Duché de Luxembourg voue un culte à Maurice Cosyn, père du développent touristique dans la nature, notamment à la Petite Suisse et dans la Mullerthal.
Administrateur du Touring Club de Belgique il fut bien sûr l’auteur des guides Cosyn.

Un papier sur Houffalize comme celui publié par  Cosyn dans L'Indépendance Belge du 25 juin 1939 valait son pesant d’or.
On peut imaginer que Léon Daulne, président du Syndicat d’Initiative en ce temps-là (et instituteur), lui aura soufflé quelques informations.
Personne mieux qu’un Houffalois chevronné n’en goûtera toute la substance. Il y verra se dérouler les étapes du développement de la ville jusqu’à la fin de la période autrichienne , et se haussera à admirer les charmes des alentours.
On voit que le randonneur journaliste contemple la région avec l’œil d’un peintre paysagiste, sans doute imprégné des œuvres de Jules Raeymaekers, décédé à Houffalize en 1904.
Sa description de quartiers de la ville en amas et de ses constructions pelotonnées est bien celle d’un contemporain du peintre Maurice Micha.
Dans un article publié récemment, on le voit sensible au travail des petites gens dans leur lieu de vie. Le pastoureau du Bois des Moines. Une sensibilité commune à celle du photographe Edmond Dauchot.
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Voici le début de l'article de Maurice Cosyn: Houffalize (1939)

Un vieux texte rapporte qu’en 1147 un certain Ramulphus fut séduit par un emplacement propice à l’érection d’un château. C’était un promontoire étroit, rocheux, surplombant l’Ourthe.
La demeure seigneuriale s’y élevait mais on n’y trouve plus aucun vestige. L’endroit s’appelait « Alta Falisia » ou Haute Falize (roche) d’où dérive le nom actuel de Houffalize.

L’Ourthe orientale dessine aux abords de la localité les deux boucles d’un S. Elle enserre tout d’abord le promontoire rocheux dont nous venons de parler, la Haute Falize, puis l’avancée où sont massés les toits d’ardoise de la petite agglomération. Les habitations s’abaissent insensiblement vers la rivière ; mais elles ont débordé à l’extérieur de la boucle et une ligne de maisonnettes bien ardennaises marque la vieille route de Liège escaladant rapidement la côte.

[… cfr notre précédent article: Thier des Pourçais, des Cochons ]
Des hauteurs voisines [du Thier des Pourçais], près de la chapelle Saint-Roch notamment , on découvre un horizon immense et mouvementé, où l’Ardenne se révèle en un tableau inoubliable. Aux régions boisées, qui moutonnent au loin, s’opposent les teintes claires des cultures. Partout les vallées se creusent en un fouillis inextricable.

Maurice Cosyn L'Indépendance Belge du 25 juin 1939 

PS.
Maurice Cosyn a très bien perçu la topographie d'ensemble de Houffalize : un double S de l'Ourthe.
Il en situe les fonts baptismaux au XIIe siècle sur le promontoire dit de la Croix de mission, entre Vayamundo et la Gare. À discuter. Les anciens Houffalois se souviendront de l'immense inscription "Vive le Roi" chaulée à même le roc au sud de cet éperon rocheux, dans les années 60.
Les habitations s’abaissent insensiblement vers la rivière. Il s'agit du Midi, St-Roch, place des Tilleuls et son prolongement au nord, Cheravoie. 
Elles ont débordé à l’extérieur de la boucle et une ligne de maisonnettes bien ardennaises marque la vieille route de Liège escaladant rapidement la côte.
Excellente description littéraire de la rue du Bois des moines.
Mais Cosyn, en distinguant cette route bâtie comme une excroissance hors des deux boucles de l'Ourthe, fait aussi référence à la structure politique et administrative de Houffalize. Toute la ville à l'intérieur des boucles appartenait à la paroisse de Cowan (culte, mariages, état civil, cimetière).  Sauf la rue du Bois des Moines, de l'autre côté de la rivière, qui dépendait de la paroisse de Taverneux (ancienne route de Liège jusqu'au creusement de "la Tranchée", virage au nord du home Palange).
La césure entre ces périmètres paroissiaux étant le monastère (l'abbaye, l'église Ste-Catherine), qui ne faisait partie d'aucune paroisse. Le statut de monastère a été supprimé par l'empereur d'Autriche Joseph II en 1784.

René Dislaire  ©  Houffalize, le 16 septembre 2020

 

Liens: Houffalize vu par Camille Lemonnier (cité par Cosyn) 

Houffalize. Lemonnier. Dormir du " bon sommeil stupide des bêtes" (ardenneweb.eu)

Houffalize. Le gland, la citrouille et le petit pastoureau - Poésie – Wallon et français - Spécial Halloween 2023 | Ardenne Web

Présentation. Avec quatre-vingts ans de recul, l'article de Maurice Cosyn sur Houffalize (1939) est un bijou. À examiner sous toutes ses facettes.

  • Bois des moines. Une ligne de maisonnettes bien ardennaises marque la vieille route de Liège escaladant rapidement la côte.
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