Expositions au Musée de la Photographie de Charleroi
Expositions qui seront présentées du 29 mai au 19 septembre 2021 au Musée de la Photographie de Charleroi.
Le grand atelier de Joel-Peter Witkin
Célèbre pour ses photographies provocantes et controversées mettant en exergue le morbide, l’érotique et le religieux, Joel-Peter Witkin, titulaire d’un master en histoire de l’art de l’Université d’Albuquerque où il étudiera également la photographie, témoigne dans son travail d’une connaissance approfondie de la peinture et de la sculpture classiques autant que de la photographie et de la mythologie.
Joel-Peter Witkin est né en 1939 à Brooklyn, New York, d’un père juif d’origine russe et d’une mère catholique pratiquante d’origine italienne. Ce métissage eut un grand impact dans sa réflexion religieuse, spirituelle et philosophique. Enfant, il est témoin d’un accident de voiture au cours duquel la tête d’une petite fille roule à ses pieds. Cette image, qui le marquera à vie, lui donnera un certain goût pour le macabre et les images fortes.
À l’adolescence, sous l’influence de son frère peintre refoulé, il se lance dans la photographie. Il devient assistant de quelques photographes et part au Vietnam en tant que reporter de guerre.
En 1970, ses premières photographies intègrent les collections du MoMA à New-York. Il fait des études à la Cooper Union, où il obtient sa licence en Beaux-Arts, puis poursuit avec un master à l’université d’Albuquerque, Nouveau-Mexique, ville dans laquelle il vit et travaille depuis lors.
« Joel-Peter Witkin élabore ses photographies avec minutie. S’enclenche un long processus créatif — entre six mois et un an — entre les premiers dessins préparatoires, la prise de vue qui leur sera fidèle et le tirage final » explique son galeriste et ami Baudoin Lebon.
Photographe et plasticien par les techniques qu’il emploie, il se distingue par l’originalité de ses sujets, les mythes qu’il traite et recrée, mais également par ses nombreuses références et ses emprunts aux œuvres majeures de l’histoire de l’art, depuis l’Antiquité jusqu’à l’époque contemporaine.
L’exposition Le grand Atelier de Joel-Peter Witkin présente une sélection d’une centaine de photographies et de quelques dessins opérée par le Musée de la Photographie au sein d’un vaste ensemble de son œuvre conservé par la galerie Baudoin Lebon.
Articulée autour de ses thématiques de prédilection que sont la mort, la religion, le mythe et l’allégorie, l’exposition Le grand Atelier de Joel-Peter Witkin démontre toute la maitrise technique et atypique de ce photographe, sans conteste l’un des plus singuliers des 20e et 21e siècles.
Fascination et répulsion, compassion et voyeurisme sont autant de réactions possibles face aux photographies de Joel-Peter Witkin qui semblent être les tableaux d’une « monstrueuse parade » mettant en exergue un monde de souffrance, de mutilations, de désincarnations, sans exclure une forme de dérision.
Mutilés, androgynes, transexuels, cadavres démembrés empruntés aux morgues réinterprètent des figures mythologiques ou bibliques, magnifiés par le travail d’artisan orfèvre de Witkin, une pratique excluant toute manipulation digitale.
Avec la complicité de la galerie baudoin lebon
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Debi Cornwall. Welcome to Camp America
Hormis les tenues oranges des prisonniers, peu d’images circulent sur ce qui se cache réellement derrière les murs de Guantanamo, la base militaire américaine située à la pointe Est de Cuba tristement célèbre pour être un lieu de tortures et d’incarcérations.
Entre mars 2014 et janvier 2015, durant trois séjours, la photographe new- yorkaise Debi Cornwall a été autorisée à entrer dans l’enceinte de Guantanamo Gitmo, comme l’ont surnommé ses occupants – pour réaliser un reportage photographique à la condition impérative de respecter strictement certaines règles. Interdiction de photographier le visage des soldats, de prendre la moindre image des dispositifs de surveillance, obligation d’être perpétuellement escortée et de faire valider chaque jour les prises de vues enregistrées sur la carte SD de l’appareil et... de développer dans la foulée les négatifs pour qu’ils puissent être inspectés, ce qu’elle réalisera dans la baignoire de sa chambre d’hôtel, sous le regard attentif de son escorte.
Sur base de ses photographies ayant reçu l’aval des militaires, Debi Cornwall a construit un travail engagé grâce à son expérience d’avocate ayant exercé durant douze années au barreau de New York.
Apparaissent alors des photographies d’un Gitmo que peu de personnes auraient imaginé que la photographe a classées en trois séries distinctes, autant de visages de ce lieu où personne n’a vraiment choisi de vivre.
« Gitmo at home, Gitmo at play » aborde l’univers carcéral et les conditions de vie des détenus (cellule minimaliste, kit de vêtements réduit à l’essentiel, tapis
de prière en caoutchouc... ) mais pas seulement... Elle propose à notre plus
grand étonnement des images des lieux de loisirs de la base navale réservés au personnel militaire et à leurs familles ainsi qu’aux travailleurs étrangers qui y sont employés. Ces images, qui semblent celles d’un « club Med » (transats en bord de mer, terrains de jeu et piscines...) surprennent par leur caractère plutôt incongru.
« Gitmo on sale » reprend les photographies d’objets souvenirs mis en vente à la boutique de la base. On y trouvera pour les nostalgiques du lieu une figurine de Fidel Castro dodelinant de la tête, des mugs évoquant l’ancien camp provisoire X-Ray, des verres à liqueur, des animaux en peluche tels un vautour, un iguane rasta ou un rat.
Dernière série « Beyond Gitmo » nous montre enfin des anciens détenus, terroristes présumés, ayant retrouvé la liberté chez eux ou déplacés vers des pays étrangers. Tout comme l’armée avait interdit à Debi Cornwall de photographier des visages à Guantanamo Bay, Debi Cornwall a parcouru le monde pour en photographier plus d’une dizaine de manière presque identique, apparaissant tous « sans visages »... photographiés de dos !
Biographie
Documentariste et cinéaste conceptuelle qui est revenue à l’expression visuelle en 2014 après une carrière de 12 ans en tant qu’avocate spécialisée dans les droits civils. Mariant l’humour noir à la critique structurelle, son travail examine les réalités créées par l’État américain à travers des photographies, des films, des témoignages et des archives.
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Peter H. Waterschoot. Sunset Memory
Peter H. Waterschoot nous convie à un voyage immobile, dans ce qui pourrait être le récit recomposé d’une étrange nuit se déroulant en des espaces clos, aux lumières tamisées autant que dans la ville qui les héberge.
Au cours de séjours de trois ou quatre jours consécutifs, à Ostende, Bruxelles, Venise, Osaka ou Berlin, Peter H. Waterschoot a photographié en reclus les signes du temps et de l’absence dans des chambres, des couloirs, des salons, des dancings dépeuplés... Ici et là, on aperçoit des lits et fauteuils abandonnés, des papiers peints défraichis, des verres oubliés et des réveils arrêtés. Peter H. Waterschoot ne nous dévoile pas seulement le récit hypothétique d’attentes mystérieuses dans ces lieux clos, il se fait également l’œil indiscret de rues désertées, qu’un faible éclairage seul anime.
L’exposition présentera des photographies extraites de sa précédente série At the Skin of Time mais également sa série plus récente Sunset Memory. Ces images ont été réalisées entre 2012 et 2020.
De rouge sang, de bleu ou de jaune, ses photographies poudrées aux teintes nuancées accentuent le caractère nostalgique voire mélancolique d’une présence absente. Réconfortantes parfois, elles n’en trahissent pas moins un sentiment d’inquiétude, de tension.
Biographie
Peter H. Waterschoot est né à Gand, en Belgique, en 1969. Il a étudié la photographie à l’Académie de Gand, en 2009.
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Traunstein.
photo © Julie Gasemi / Nicolas Dufranne
Synopsis
« Claire découvre qu’elle apparaît dans un film de mauvaise qualité trouvé sur internet. Elle se voit à la fenêtre de sa maison, accompagnée d’un homme qu’elle ne connaît pas. Ils ont l’air amoureux. Elle décide de partir à la recherche de cet inconnu, vers Traunstein. »
Note d’intention
Traunstein est une fiction.
Les personnages sont pris dans une narration qui semble se répéter indéfiniment. Une relation se tisse entre eux, ténue, essentiellement composée d’histoires racontées.
Les dialogues sont dits dans une langue inventée (traduits en sous-titres), évoquant une géographie étrangère, un pays lointain qui pourtant semble familier.
Un fil conducteur se dégage, l’amour d’une femme pour un homme dont elle n’a vu que l’image.
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Présenté dans la Galerie Du Soir
Bruno Oliveira.
Back to Neverland
Fraîchement sorti de La Cambre avec un master en photographie, Bruno Oliveira a très tôt connu l’exil, passant d’un minuscule village du Portugal au Grand-Duché de Luxembourg. S’il y suit une scolarité normale, il s’intéresse assez vite au domaine de l’image. « J’ai commencé à faire de petits jobs comme figurant pour des courts et longs métrages. Ça a été l’élément déclencheur car je me suis rendu compte que je préférais être derrière la caméra ».
À 18 ans, ses parents lui achètent son premier appareil photo. « Je l’utilise toujours aujourd’hui » glisse-t-il simplement. Tandis qu’il se lance dans des études d’éducateur puis obtient un boulot dans un foyer scolaire pour enfants, il continue à explorer sa passion pour l’image après ses journées de travail.
Le deuxième élément déclencheur sera un concours, une sorte de téléréalité pour artiste à laquelle il participe sur Télé Luxembourg. Sans la moindre formation artistique, Bruno Oliveira parvient aux portes des demi-finales. « Là, je me suis dit que je devais continuer dans cette voie et j’ai décidé de faire des études de photo. En un mois, j’ai tout quitté et je me suis inscrit à La Cambre ». Sa décision inquiète son entourage : « On me disait : Tu n’as jamais rien fait en art avant, tu n’as aucune chance ! J’ai voulu essayer quand même. Lors des examens d’entrée, j’étais désespéré car c’était effectivement très poussé. Moi, j’étais autodidacte. Je savais qu’il me manquait les bases artistiques. J’ai fait comme je le sentais en me dirigeant vers le portrait, la personne, le documentaire... Et j’ai été pris. »
A partir de là, tout s’accélère. Bruno s’installe à Bruxelles et revient le week-end à Luxembourg. « Tandis que j’étais en 3e année à La Cambre, je voyais que mes amis au Luxembourg avançaient très vite dans le quotidien. Ils commençaient à acheter une voiture, une maison... Un jour, en visitant Disneyland avec des amis, on a joué à s’attribuer les noms des personnages de la parade. Une copine m’a dit : toi, tu serais Peter Pan. Tu es celui d’entre nous qui se permet de rêver, de faire des choses qu’on n’aurait pas faites. A partir de là, je me suis mis à faire des photos de mes amis au quotidien, souvent dans les fêtes. Des images un peu mélancoliques. Ҫa reflète ce que je ressens par rapport à mon entourage. »
A Luxembourg, le Casino, centre d’art contemporain, lance une triennale consacrée à la jeune création. « J’ai décidé de participer et de travailler sur les Millennials, cette génération Y, née entre 1980 et 1996, dont je fais partie. J’ai donc continué à photographier mes amis, au Luxembourg, à Bruxelles, mais aussi en voyage. Au Japon notamment. »
Le résultat ? Des images surgissant souvent de la nuit mais pleines de couleurs. « L’idée, c’était de créer un pays imaginaire. » Normal pour un gamin portugais exilé au Grand-Duché et venant étudier à Bruxelles. « Dans mes images, il y a la notion d’exil, les communautés, le voyage. Les intérieurs de maison aussi qui m’influencent beaucoup. »
Fidèle à Peter Pan, il va où le vent le mène. « La majorité de mes images sont faites sur le vif. Les éléments qui peuvent donner une impression de mise en scène, c’est généralement un accident, une maladresse qui rend le truc plus intéressant. Je ne planifie pas ce que je fais. »
Cerise sur le gâteau, pour sa série Back to Neverland, il a choisi de réaliser ses tirages en format poster, façon chambre d’ado. Histoire de marquer un peu plus encore le côté générationnel.
© Bruno Oliveira
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Le Musée de la Photographie
Centre d´art contemporain de la Fédération Wallonie-Bruxelles
11 Avenue Paul Pastur, 6032 Charleroi, Belgique
(GPS : Place des Essarts)
TEL. +32 (0)71 43 58 10