"Remy van den Abeele : Catalogue de l'Oeuvre Peint" et "Famenne et Art Museum", à Marche-en-Famenne

écrit par YvesCalbert
le 01/03/2021

*** « Remy van den Abeele : Catalogue de l’Oeuvre peint »  (J.-P. van den Abeele & J. Baudoux) :

A l’occasion de la présentation à la presse de cet imposant ouvrage, le fils de l’artiste, Jean-Pol van den Abeele nous déclarait : « Ce fut un travail long et ardu. Ce catalogue donne un aperçu aussi complet que possible du travail de toute une vie. Mon père a travaillé pendant près de soixante-cinq ans. Établir un inventaire de ses œuvres comme celui-ci ne se réalise que grâce à la collaboration de nombreuses personnes. Ma mère avait heureusement conservé et classifié une part importante de documents, ce qui m’a beaucoup aidé. Des appels furent lancés dans la presse afin que les collectionneurs se manifestent. De nombreux documents originaux (lettres, catalogues, revues, livres, articles de la presse écrite) ainsi que des souvenirs partagés avec mes deux sœurs, Claudine et Chantal, ont enrichi mes recherches. Tous ces renseignements récoltés m’ont permis de recouper, préciser, confirmer des informations précieuses. Le galeriste Isy Brachot, avec lequel mon père a collaboré pendant près de dix ans, m’a également ouvert les portes de ses archives. Sans compter des amis qui ont apporté leur pierre à l’édifice. »

Il complète ses dires au sein de l’avant-propos de ce catalogue : « Mon collaborateur et ami Jacques Baudoux, photographe, à qui je dois beaucoup, a réussi dans la mesure du possible à reproduire des oeuvres de bonne qualité malgré parfois des originaux trop anciens, mal cadrés ou trop petits pour une parfaite lisibilité. Si certaines reproductions ne sont pas parfaites, j’en prends la responsabilité, mon principal souci étant d’être le plus complet possible. Certaines pièces sont restées sans image bien qu’elles soient reprises dans une liste de titres d’un catalogue. Les propriétaires actuels de ces oeuvres peuvent bien évidemment nous faire parvenir des photos en les envoyant à l’adresse mail : jp.vandenabeele@skynet.be. Toute collaboration pour compléter ce catalogue est vivement appréciée ! »

De son côté, Jacques Baudoux écrit : « La prise en charge, par mes soins, de la réalisation technique de ce catalogue, est due en grande partie au hasard. En 2009, je ne connaissais rien de l’oeuvre de cet artiste, ce qui par contre n’était pas le cas de mon épouse. En 2010, à l’occasion de l’exposition « Hommage à Remy van den Abeele », au « Kursaal », à Binche, elle m’invita à la visiter pour sa propre satisfaction et pour me le faire découvrir. Cette visite me permit d’apprécier le travail de ce grand surréaliste. Début 2017, je fus invité, tout comme Jean-Pol van den Abeele, échevin de la Culture de Soignies, à prendre la parole lors du vernissage d’une exposition de photographies de Robert Doisneau (1912-1994), organisée au ‘Centre culturel Victor Jara’ de Soignies. »

« Après la partie officielle de l’inauguration, Jean-Pol van den Abeele et moi, eûmes un échange de vues sur divers sujets relatifs à l’art et à l’oeuvre de son père, il me fit part du projet de réaliser un catalogue de l’oeuvre peint de Remy van den Abeele, me demandant si je connaissais quelqu’un qui pourrait l’aider pour la réalisation technique de ce catalogue. Ayant au cours de mes 45 ans de carrière, pratiqué tous les métiers que l’on regroupe aujourd’hui sous la dénomination ‘Prépresse’, depuis la typographie à l’époque du plomb, jusqu’au traitement de l’image, je répondis que je pouvais sans doute me charger de la réalisation technique. »

« En fait, je n’avais aucune idée de la masse de travail que j’allais devoir assumer… Mes treize années de traitement d’images au sein d’un grand quotidien belge francophone (« Le Soir »/ndlr) et ma passion pour la photographie, furent bien nécessaire pour traiter des visuels qui posaient assez souvent de gros problèmes aussi bien au niveau technique que dans la manière dont avait été réalisée les prises de vues avec parfois des résultats problématiques. Quatre ans auront finalement été nécessaires pour la réalisation de ce catalogue… Il fut sans doute heureux que mon intérêt pour les arts visuels m’ait encouragé à poursuivre l’ouvrage jusqu’à son aboutissement, mais il faut souligner que les liens d’amitié noués avec Jean-Pol, au fil de notre collaboration, me permit de rester motivé en toute occasion. »

« Nous avons procédé avec logique, le seul critère fut la chronologie. Un numéro a été attribué à chaque tableau et au bas de la page, on peut trouver la décennie pendant laquelle il a été peint. Ces deux éléments nous ont permis d’avancer dans la recherche, de classifier même quand une peinture n’est pas datée. Nous savons qu’un certain nombre d’oeuvres a été détruit. Il n’est donc pas exclu que certains tableaux repris dans cet ouvrage n’existent plus. »

« Dans la mesure du possible, nous avons gardé comme titre principal de l’oeuvre celui apporté par l’artiste ou la famille. Il arrive qu’un deuxième titre voire un troisième ait été attribué à une même oeuvre soit parce qu’il a évolué avec le temps, soit par oubli des premiers ou méconnaissance d’un galériste ou d’une ‘Maison de Vente’. Ces titres sont toutefois mentionnés et reliés au titre initial par 'ou'. A défaut de titre, nous avons repris le mot ‘composition’ mis par l’artiste lui-même ou la famille. »

« Remy van den Abeele : Catalogue de l’Oeuvre peint » (Jean-Pol van den Abeele & Jacques Baudoux/ format A4/464 p./849 oeuvres répertoriées) : 25€ (30€70, pour un envoi par « B Post », à verser sur le compte BE15 0010 4032 8030, avec la mention : Catalogue R. Van Den Abeele + adresse d’expédition).

*** Présentation biographique de l’artiste :

Sa mère décède alors qu’il est âgé de 5 ans, l’abandonant à un père autoritaire. Nomade, errant de la Flandre à la Wallonie, son père, peu ouvert à la vocation artistique, assuma très mal le fait d’avoir un fils artiste. Jeté d’une école à l’autre, Remy van den Abeele (Dampremy/1918-Soignies/2006) est un bien piètre élève mais se distingue partout où il passe par son don pour le dessin. Adolescent, sans qualification, il est contraint d’exécuter des travaux pénibles (manoeuvre, garçon de café, meuleur, terrassier, marchand de charbon ambulant, ouvrier d’une ferme).

Son service militaire le délivre de tous ces labeurs, mais le voit embrigadé au sein d’un peloton  d’éclaireurs, durant la guerre, dont, à 22 ans, il revient, fort heureusement, indemne. Contre l’avis de son père, il peut, enfin, entamer ses études, aux « Académies des Beaux-Arts », à Binche, puis à Mons. Imprégné par la technique picturale de son professeur Louis Buisseret (1888-1956), Remy van den Abeele abandonne ses exercices académiques au crayon et au pinceau et se marginalise en peignant des oeuvres d’un érotisme déroutant. Dès 1952, Marcel Parfondry, critique d’art, lui révèle la filiation surréaliste de son oeuvre et l’initie au surréalisme. Exposant à Binche, en cette même année, ses toiles sont présentées, deux ans plus tard, en 1954, à Bruxelles, à la « Galerie Albert Ier », certaines de ses oeuvres étant sélectionnées pour le « Grand-Prix international de Peinture », à Deauville. En 1956, il rejoint Achille Chavée (1906-1969), son ami écrivain, au sein du cercle surréaliste « Schéma ». Recevant une bourse de l’Etat belge, il voyage en Italie, ses oeuvres étant distinguées, en 1956, aux Prix de « La Jeune Peinture Belge ».

Sur le thème du « Surréalisme en Wallonie », il réalise, en 1961, la couverture de la revue « Savoir et Beauté », dirigeant, jusqu’au 1968, « Tendances Nouvelles », à La Louvière. Comme Jacques Brel (1929-1978), qui ne voulait pas qu’on le considère comme étant un poète, Remy van den Abeele ne s’est jamais défini en tant que surréaliste, se liant, néanmoins, d’amitié avec des surréalistes, tel l’écrivain Jean Émile Louis Sctutenaire  (1905-1987) et le peintre René Magritte (1898-1967), ce dernier l’interrogeant sur ses techniques picturales. Pendant près de dix ans, il travaillera en relation avec la « Galerie Isy Brachot », sa première grande exposition y étant organisée en 1969.

Une des pièces du © « Famenne & Art Museum » © Photo : Jacques Baudoux

A l’occasion de la récente visite de presse, Jean-Pol van den Abeele déclara : « Pour chaque réalisation, mon père partait toujours d’un dessin. Il en a donc réalisé un nombre incalculable. Il s’est également adonné à la sculpture, à la création de meubles et de bijoux. Il a réalisé de nombreuses empreintes à base d’encre ou de négatifs… Mon père était un peintre à périodes, certes, mais qui collait avec la réalité de son temps. Il a traversé tout le XXè siècle au fil de ses 60 ans de travail artistique. Même s’il n’aimait pas qu’on le catégorise, on peut dire que l’œuvre de mon père est de la période dite du surréalisme tardif, que certains associent parfois à l’hyper réalisme ou au réalisme poétique. »

De son côté, Thibault Cassart, l’actuel conservateur du « FAM » évoquait « une réelle histoire d’amour »  entre Remy van den Abeele et la Ville de Marche-en Famenne, qui l’a, désormais, adopté, l’ancien conservateur du « FAM », l’écrivain-plasticien Luc Templier ayant organisé, en 2009, une large rétrospective de l’artiste à la « Vieille Cense »à Marloie.

*** Les périodes artistiques de Remy van den Abeele :

Sa période bleue 

Jusqu’en 1970, Remy van den Abeele raconte son existence sur fond bleu : bijoux, coquillages, corps de femmes, cathédrales, perles fines, poteaux électriques, sphères,… Et puis sa période bleue s’évanouit mais pas avec tout. En effet, ses thèmes se retrouveront amplifiés dans sa période brune.

Sa période brune :              

Cette deuxième période, étalée sur quelques années seulement, revêt un caractère profondément mystique. Remy van den Abeele convoque à sa suite des cathédrales simplifiées, des éternels féminins, des sphères sensuelles, dans une atmosphère étrange, sereine, où la communication se cherche.

Sa période blanche :

Ses fonds brunsvont s’éclaircir jusqu’au blanc pur. Dès lors dans cette période blanche, les thèmes vont se succéder et se différencier. A présent, ce sont les femmes surtout qui honorent l’univers de l’artiste. Leurs corps, leurs mains, leurs visages s’y installent et côtoient quelques dérisoires papiers imprimés.

Bijou-peinture, une création de © Remy van den Abeele & Jean-Pierre De Sadeleer/« FAM »

A la même époque, en collaboration avec Jean-Pierre de Saedeleer, il développe un nouveau concept : inclure un mini-tableau dans un bijou, créant, ainsi, des bijoux-peintures.

Après avoir traversé, en 1976 et 1977, des années pénibles sur le plan psychologique, ses toiles devenant un réceptacle de ce qui bouillonne en luiRemy van den Abeele devient, de 1979 à 1983, directeur de l’ « Académie des Beaux-Arts »à Binche.

* Sa seconde période blanche :

De retour d’un voyage salutaire à New York, il oriente sa période blanche vers des natures mortes, des objets dérisoires et leurs empreintes sur papier, qu’il peint sur des fonds blancs, une technique éblouissante au service de la poésie, alors qu’en 1982, une exposition-rétrospective lui est consacrée, au « Musée des Beaux-Arts », à Mons.

Se remettant en question, refusant de s’enfermer dans un système, dans les années ’90, Remy van den Abeele se consacre à de nouvelles expériences : empreintes de carton ou de plomb et poutres brisées viennent s’ajouter à ses obsessions artistiques.

Promu « Officier de l’Ordre de la Couronne », en 1997, exposé, en 1998, au « Musée Lanchelevici », à La Louvière, il revient à la peinturequelques mannequins venant peupler ses derniers dessins et tableaux, alors qu’il peint ses proches de dos, dévoilant des silhouettes qui s’éloignent, jusqu’à rejoindre ses propres paroles : « Je suis venu à la peinture debout, de face, sur la pointe des pieds. Et je partirai debout, de dos, sur la pointe des pieds. »              

*** L’ « Espace van den Abeele », au « Famenne & Art Museum » (« FAM »), à Marche-en Famenne :

Rendons-nous au 1er étage du corps de logis du XVIIè siècle, de ce bien intéressant petit Musée, afin de découvrir l’ « Espace van den Abeele », inauguré le 28 septembre 2018, le fil conducteur de notre visite étant la découverte de l’ « appartement d’un collectionneur d’art », dans lequel 37 oeuvres de Remy van den Abeele nous sont présentées. Qu’il s’agisse de bijoux, de croquis, de dessins, de lithoraphies, de peintures ou de sculptures, l’étendue du travail protéiforme de ce fascinant plasticien nous est dévoilée au sein des différentes pièces… Surprises garanties !

Nous rappelant que l’oeuvre de cet artiste hennuyer touche aussi à l’écriture, nous traversons d’abord la  bibliothèque de cet « appartement », où nous pouvons consulter divers ouvrages qui lui sont consacrés ou qu’il a illustré, admirant la maîtrise avec laquelle il a transposé caractères typographiques et écriture sur ses toiles.

Le salon est quant à lui une ode à la féminité, un sujet dont il ne s’est jamais départi, toute l’évolution de son style, de son point de vue, de son goût se déclinant grâce aux estampes et peintures qu’il y a consacré.

Outre le bureau, nous trouvons encore le cabinet de curiosité, précieux réceptacle du collectionneur, renfermant, quant à lui, ses oeuvres expérimentales, toutes les pièces étant parées d’oeuvres, de souvenirs, d’objets réalisés de ses mains ou éclairant l’un de ses thèmes spécifiques.

A noter, que le « Famenne & Art Museum » nous présente, également, différents aspects de la vie en Famenne, au travers des siècles, des activités étant prévues pour les enfants, ainsi que pour les écoles.

Ouverture du « FAM » : du mardi au vendredi, de 10h à 12h et de 13h à 17h. Prix d’entrée : 5€ (3€, pour les étudiants et seniors, les membres d’un groupe de minimum 10 personnes / 2€, par membre d’un groupe d’étudiants ou de seniors / 1€, pour les enseignants / 0€, pour les moins de 6 ans et les enseignants accompagnant leur classe). Pour plus de renseignements : fam@marche.be et 084/32.70.61Site web :  http://www.famenneartmuseum.be.

Yves Calbert,

avec extraits de « Rémy Van den Abeele : Catalogue de l’Oeuvre peint » (J.-P. Van den Abeele & J. Baudoux).

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