"Peindre la Nature. Paysages impressionnistes du Musée d’Orsay", au "MUba", à Tourcoing, jusqu'au 24 Juin

écrit par YvesCalbert
le 07/06/2024

A l’occasion de la célébration, en 2024, des 150 ans de l’impressionnisme, le « Musée d’Orsay », à Paris, a prêté, exceptionnellement, pas moins de 180 oeuvres impressionnistes, réparties dans plus de 30 musées français, notamment au « Palais des Beaux-Arts », à Lille, à « La Piscine », à Roubaix ou encore au « Musée des Beaux-Arts » (« MUba Eugène Leroy« ), à Tourcoing.

« Pont du Chemin de Fer, à Chatou » (Auguste Renoir/1881) © « Musée d’Orsay » © Ph. : Patrice Schmidt

Dans ce dernier musée, jusqu’au 24 juin, son exposition « Peindre la Nature. Paysages impressionnistes du Musée d’Orsay » nous permet de découvrir 58 créations de peintres impressionnistes.

« Herblay. Brouillard. Opus 208 » (Paul Signac/1889) © « Musée d’Orsay »

« Comment est né le paysage impressionniste ? Quelle est la spécificité du regard posé par Claude Monet et ses amis sur les paysages de leur époque ? Comment ces peintures traduisent les mutations du rapport des hommes et des femmes à leur environnement au XIXè siècle et comment entrent-elles en résonance avec nos préoccupations actuelles ? De quelle manière le paysage impressionniste a-t-il ouvert la voie à d’autres audaces picturales ? Le parcours de l’exposition est organisé pour répondre à ces questions », écrivent les commissaires, Mélanie Lerat, directrice-conservatrice du « MUba » et Paul Perrin, directeur de la conservation et des collections du « Musée d’Orsay ».

« Meules, Fin de l’Eté» (Claude Monet/1891) © « Musée d’Orsay » © Photo : Pascal Bonniere

Ils poursuivent : « Claude Monet, fil rouge – mais pas exclusif – du parcours, aura poussé l’expérimentation des variations autour d’un même thème jusqu’à l’obsession. Ainsi, ses ‘Meules, Fin de l’Eté‘, croisées en plein été dans un champ proche de Giverny, où le peintre s’est établi, ont la saveur du premier motif étudié en série par Claude Monet. » 

Argenteuil » (Claude Monet/1872) ©  » Musée d’Orsay » © Photo : Patrice Schmidt

Dans une première salle, le creuset du paysage réaliste et le développement de la peinture de plein air nous sont présentés, grâce à des œuvres d’Eugène Boudin (1824-1898), Charles-François Daubigny (1817-1878), Paul Huet (1803-1869), Johan Barthold  Jongkind (1819-1891) ou Eugène Boudin (1824-1898), sans oublier la forêt de Fontainebleau, vue par Frédéric Basille (1841-1870), et les premiers paysages de Claude Monet (Oscar-Claude Monet/1840-1926), peints en Normandie.

« Potager, arbres en fleurs, printemps, Pontoise » (C. Pissarro/1877) © « Musée d’Orsay » © Ph. : Patrice Schmidt

Au sein de la deuxième section de l’exposition, nous retrouvons des créations de Paul Monet, exposées auprès d’oeuvres de Camille Pissarro (1830-1903), Auguste Renoir (1841-1919) ou encore Alfred Sisley (1839-1899), qui explore leurs « motifs » de prédilection, dans les années 1870, tels les rives de la Seine et son activité fluviale, les campagnes d’Île-de-France, les jardins et la villégiature. Ce paysage n’est pas alors une nature vierge ou édénique mais une nature fondamentalement « anthropisée » et pleinement inscrite dans la modernité.

« La Barque pendant l’Inondation, Port Marly  » ( Alfred Sisley/1876) © « Musée d’Orsay » © Ph. : P. Schmidt

Alors qu’en nos contrées, le dérèglement climatique rend la neige toujours plus rare, une salle est dédiée à ces paysages moins immaculés qu’il n’y paraît.

« Sous la Neige : Cour de Ferme à Marly-le-Roi » (A. Sisley/1876) © « Musée d’Orsay » © Ph. : S. Maréchalle

La troisième section montre, à partir des années 1880, comment les impressionnistes, et particulièrement Claude Monet, se concentrent progressivement sur des paysages « purs » et sur des effets atmosphériques et lumineux toujours plus complexes.

Série « Les Nymphéas », présentée en numérique © « MUba » © Photo : Pascal Bonniere

Une projection audiovisuelle permet d’explorer, en grand format, des détails des œuvres vues dans les salles alentour, présentant « Les Nymphéas » (Claude Monet), une série d’environ 250 peintures impressionnistes à l’huile, abordant la question de l’immersion « grandeur nature » de l’homme et du peintre dans le paysage.

« Le Bassin aux Nymphéas, Harmonie verte » (Claude Monet/1899) © « Musée d’Orsay »

La quatrième section de l’exposition aborde l’évolution de l’art du paysage après l’impressionnisme, de Georges Seurat (1859-1991) jusqu’à Piet Mondrian (Pieter Cornelis Mondriaan/1872-1944), en passant par Pierre Bonnard (1867-1947), Paul Gauguin (1848-1903) ou Odilon Redon (1840-1916).

« Coteau de l’Hermitage, Pontoise » (Camille Pissarro/1873) © « Musée d’Orsay » © Ph. : H. Lewandowski

À partir des audaces de touches et de couleurs de leurs aînés impressionnistes, ces artistes explorent d’autres territoires. Progressivement, l’observation de la nature et la célébration du paysage moderne cèdent la place à diverses formes d’ « abstractions » et à la quête d’une nature réenchantée.

« La Fenaison en Bretagne » (Paul Gauguin/1888) © « Musée d’Orsay » © Ph. : Hervé Lewandowski

Enfin, en forme d’épilogue, nous découvrons la réunion d’un chef-d’œuvre tardif de Claude Monet, conservé au « Musée d’Orsay », « Saule pleureur » (1920-1922), et d’une peinture d’Eugène Leroy (1910-2000), artiste tutélaire du « MUba », depuis la donation, en 2009, de plus de 400 œuvres. Ce dernier, peignant dans son atelier, à Wasquehal, ayant écrit : « Je me suis installé au grenier en faisant percer une verrière au Nord et une fenêtre au Sud : la lumière circule à travers. Et l’atelier est un peu comme si j’étais dehors. Et je place mes tableaux entre les deux fenêtres. »

« Saule pleureur » (Claude Monet/1920-1922) © « Musée d’Orsay » © Photo : Michèle Bellot

Dans un autre espace de ce « Musée des Beaux-Arts » tourquennois, notre visite se poursuit par la découverte d’une sélection d’œuvres des collections du « MUba », créées durant ces deux derniers siècles, en écho aux thèmes de l’exposition (expérimentations colorées, paysages, vibrations lumineuse, …).

« Le Jardin des Tuileries » (Édouard Vuillard/vers 1894-1895) © « Musée d’Orsay » © Ph. : Patrice Schmidt

Quelques mots sur l’impressionnisme :

Les peintres, qu’on rassemblera sous le nom d’« impressionnistes », appartiennent à une même génération d’artistes qui émergent à Paris, au cours des années 1860. Malgré leurs différences, ils ont en commun leur intérêt pour la représentation de la nature. Convaincus qu’il leur faut être de leur temps et peindre le monde moderne, ils rejettent les conventions du paysage dit « historique », avec ses scènes mythologiques et sa nature recomposées en atelier, genre promu par l’ « École des Beaux-Arts » et l’ « Académie » qui dominent alors la vie artistique parisienne.

« La Seine à Port-Marly, le Lavoir » (Camille Pissarro/1872) © « Musée d’Orsay » © Photo : Patrice Schmidt

Soulignons que les impressionnistes privilégient les couleurs claires, parfois vives, qu’ils appliquent, sur la toile, en petites touches et de façon dynamique, donnant le sentiment de saisir rapidement l’instant et leur impression face à la nature, la Seine, essentiellement, leur permettant de représenter les effets mouvants de l’eau et du ciel. Aussi, très accessibles grâce au chemin de fer, les villages d’Argenteuil, Bougival, Louveciennes ou Marly sont le théâtre de cette histoire d’amitié et de peinture.

« Forêt de Fontainebleau » (Frédéric Bazille/1865) ©  » Musée d’Orsay » © Photo : Patrice Schmidt

Depuis les années 1820-1830, une autre génération de peintres a déjà entrepris de faire entrer la réalité dans la peinture de paysage. Séjournant, pour certains, dans le petit village de Barbizon, en bordure de la forêt de Fontainebleau, ces peintres dit de l’ « Ecole de Barbizon » (Narcisse-Virgile Díaz de la Peña {1807-1876}, Millet,
Henri Rousseau {1844-1910}) révèlent la beauté des sous-bois de la forêt, des arbres, des rochers. Si leurs toiles sont souvent exécutées en ateliers, elles ont pour point de départ des études en plein air.

« Effet de neige à Vétheuil » (Claude Monet/1878-1879) ©  » Musée d’Orsay » © Photo : Adrien Didierjean

À partir des années 1880, Gustave Caillebotte (1848-1894) et Claude Monet se distinguent par leur passion pour l’horticulture, devenant d’authentiques peintres-jardiniers, aménageant, au Petit-Gennevilliers et à Giverny,
d’immenses jardins « fleuristes », prenant alors pour sujet ces paysages. La densité et la luxuriance de la
végétation sont remarquables dans les deux tableaux peints par Auguste Renoir, à Alger et à Chatou, dans lesquels le point de vue devient immersif.

« Rochers près des Grottes, au-dessus du Château-Noir » (Paul Cézanne/vers 1904) ©  » Musée d’Orsay »

Depuis 2018, le « MUba Eugène Leroy » s’est engagé dans une politique d’expositions ambitieuses, en partenariat avec de grandes institutions nationales : les expositions « Chrétiens d’Orient » (2018), conçu avec l’ « Institut du Monde Arabe », à Tourcoing, et « Picasso illustrateur » (2019), avec le « Musée Picasso », à Paris, ont ainsi remporté un franc succès public, participant à la démocratisation culturelle autant qu’à l’attractivité du territoire tourquennois.

Ouverture du « MUba » : jusqu’au lundi 24 juin, du mercredi au lundi, de 13h à 18h. Prix d’entrée : 6€ (5€ e, en prix réduit). Catalogue (Julien Faure-Conorton, Mélanie Lerat, Alexis Metzger & Paul Perrin/Ed. « Snoeck ») : disponible à l’accueil. Contacts : museebeauxarts@ville-tourcoing.fr & 00.33.3/20.28.91.60. Site web : https://muba-tourcoing.fr/.

© « MUba Eugène Leroy »

Expositions impressionnistes au « Musée d’Orsais », à Paris :

** « Paris 1874. Inventer l’impressionnisme », jusqu’au dimanche 14 juillet ;

** « Un soir avec les impressionnistes. Paris 1874 », jusqu’au dimanche 11 août.

Expositions impressionnistes dans les Hauts-de-France :

** « Monet à Vétheuil, les Saisons d’une Vie », au « Palais des Beaux-Arts », à Lille, jusqu’au mardi 24 septembre ;

** « Monet-Duhem, l’Impressionnisme à Douai », au « Musée de la Chartreuse« , à Douai, jusqu’au lundi 24 juin ;

** « Sur la Plage impressionniste : dans l’Oeil d’Edouard Manet », au « Musée de Picardie », à Amiens, jusqu’au dimanche 16 juin.

Yves Calbert.

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