Implantation du télescope Einstein en Belgique
Ce projet scientifique de près de 2 milliards pourrait être construit en partie dans le sous-sol du Pays de Herve et de Plombières.
Ce mardi 26 septembre 2023, la Belgique, les Pays-Bas et la Rhénanie du Nord-Westphalie ont franchi une nouvelle étape en vue d’implanter le télescope Einstein dans la zone frontalière des trois pays. Ils ont en effet signé à Bruxelles une déclaration d’intention concernant la voie à suivre pour leur candidature officielle commune. Le télescope serait déployé sur un triangle équilatéral de 10 kilomètres de côté à 250 m sous terre. Il permettra aux physiciens de tester la théorie de la relativité comme jamais auparavant.
Pour rappel, Einstein Télescope (ET) est un projet d’infrastructure de recherche souterraine qui accueillera un observatoire d’ondes gravitationnelles. Les ondes gravitationnelles ont été observées pour la première fois en septembre 2015 et ont déclenché une révolution dans le monde de la physique qui a débouché sur l’attribution d’un prix Nobel. L’onde gravitationnelle qui a été détectée est le résultat de la fusion de deux trous noirs situés à 1,3 milliard d’années-lumière. Les observatoires actuels, aux États-Unis, Japon et en Italie, permettent de détecter environ un événement par semaine (fusion de trous noirs). Le télescope d’Einstein (ET), un observatoire de 3e génération, permettra quant à lui d’en observer une centaine par jour.
Deux sites sont en lice pour accueillir à savoir la région des trois frontières et la Sardaigne. Des études géologiques approfondies sont en cours sur les deux sites. Une cartographie du sous-sol de la région des trois frontières est notamment en cours d’élaboration afin d’identifier l’emplacement optimal du télescope.
Sardaigne ou Trois-Frontières
La sélection du site de construction de l’infrastructure est prévue en 2026. Elle se fera sur la base d’une procédure de sélection qui sera définie par les pays membres du consortium Einstein télescope (combinaison de critères scientifiques, financiers et politiques).
La construction de l’infrastructure devrait démarrer en 2028. ET devrait être opérationnel à l’horizon 2035-2036 pour une période estimée à 50 ans.
Le coût de construction d’ET, en cela y compris la phase préparatoire, a été estimé en 2018 à 1,9 milliard. Une mise à jour de cette estimation sera réalisée à la fin 2023.
"Le télescope Einstein est un projet d’envergure qui incarne un secteur (scientifique et de l’aérospatial) qui occupe une place de choix dans l’économie wallonne. Le futur site est voué à devenir un centre de référence international. Vivier unique de recherche et de science, il donnera également une impulsion forte à l’économie locale et à la création d’emplois, directs comme indirects, car de nombreuses entreprises seront impliquées dans la construction, la mise en œuvre et le maintien du site", explique le ministre wallon de l’Économie et de l’Innovation, Willy Borsus. "Selon une récente étude (EKLO), la part d’emplois générés en Wallonie par ET pourrait être de 10,73 équivalents temps plein par million d’euros investi."
"Des techniques et technologies avant-gardistes seront indispensables pour relever les défis du projet, engendrant des avancées majeures dans des domaines tels que l’optique de précision, la cryogénie, et la technologie laser. Ces avancées positionneront le savoir-faire wallon sur le devant de la scène internationale et renforceront l’importance des sciences physiques, astronomiques et géologiques dans le développement économique régional."
En outre, selon Willy Borsus, le site du Télescope Einstein a le potentiel de devenir un point d’attraction mondial, y compris en tant que destination touristique. En tant que première mondiale en matière de science, sa localisation au cœur d’une région déjà prisée pour ses atouts touristiques pourrait, avec une stratégie adaptée, le propulser comme une attraction majeure à l’échelle européenne et mondiale.
"Avec le Télescope Einstein, nous avons la possibilité de replacer la région des trois frontières, et singulièrement la Belgique au centre de l’excellence scientifique mondiale, continue le ministre fédéral Thomas Dermine. Obtenir sur notre territoire une telle infrastructure de recherche est une opportunité exceptionnelle tant d’un point de vue scientifique que des retombées économiques qu’elle générera. Raison pour laquelle, j’ai chargé le Conseil Fédéral de la Politique scientifique d’identifier l’impact du Télescope Einstein sur notre économie. Par ailleurs, j’ai demandé à mon administration – Belspo – de coordonner le travail de la Task Force belge afin de préparer la candidature belge et d’être en ordre de marche à côté des Pays-Bas et de l’Allemagne pour attirer le projet sur nos territoires respectifs."
( Jean-Michel Crespin L’Avenir )
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Le télescope Einstein
Avec le télescope Einstein, les scientifiques veulent, entre autres, capter des signaux émis juste après le big bang, affiner les recherches sur la nature des trous noirs et à élucider la structure précise des étoiles à neutrons. L’observatoire sera donc très important pour la physique et l’astronomie internationales. En tant que commanditaire d’entreprises de haute technologie et moteur de progrès technologique, le télescope Einstein constituera aussi une grande opportunité pour la société.
L’observatoire le plus sensible aux ondes gravitationnelles de tous les temps
Le télescope Einstein est conçu pour mesurer au moins dix fois plus précisément que les détecteurs actuels. Cela permettra de balayer un volume mille fois plus grand et de détecter des sources trop faibles pour être perceptibles par les détecteurs actuels. Avec ces nouvelles connaissances, les physiciens pourront tester la théorie de la relativité générale d’Einstein comme jamais auparavant et perfectionner — ou amender — notre connaissance de l’univers.
Détecteur souterrain
Afin de détecter les ondes gravitationnelles, le télescope Einstein mesurera les changements dans la longueur des tunnels des détecteurs qui font plusieurs kilomètres de long et qui seront situés à environ 200-300 mètres dans le sous-sol. Les faisceaux laser dans les tunnels des détecteurs se superposent et s’annulent précisément l’un l’autre, sauf lorsqu’une onde gravitationnelle passe et que les tunnels sont temporairement allongés ou rétrécis. Le clignotement de lumière qui en résulte est l’empreinte d’une onde gravitationnelle et il contient de nombreuses informations sur la source du signal.
Le télescope d’Einstein sera conçu pour une sensibilité de 22 zéros après la virgule : des différences de distance qui sont dix mille fois plus petites que les protons dans un noyau atomique. Pour atteindre cette précision inimaginable, l’observatoire fera se réfléchir des faisceaux laser sur des kilomètres de tunnels. Un ultravide et des « super-atténuateurs » spécialement conçus annuleront les vibrations perturbatrices de l’environnement. A noter que cette technique est silencieuse, sûre et propre. Elle ne fait rien de plus qu’observer et enregistrer discrètement des phénomènes naturels existants.
Laboratoire d’expérimentation ETpathfinder
Des chercheurs et des entreprises des Pays-Bas, de Belgique et d’Allemagne veulent se préparer afin de pouvoir répondre aux exigences techniques élevées du télescope Einstein. C’est pourquoi ils collaborent pour mettre en place le laboratoire de recherche et développement ETpathfinder. Pour le télescope Einstein, par exemple, ce laboratoire doit développer la technologie de précision, les revêtements et l’optique, ainsi que les techniques de mesure et de contrôle, la géotechnique, l’isolation sismique, les technologies de l’information et de la communication, l’ingénierie, la production et les matériaux.