"Arisitide Maillol - La Quête de l'Harmonie" et autres Expos, à "La Piscine", à Roubaix, jusqu'au 28 Mai
"Je ne veux pas que l'on m'embête, je veux être heureux" (Aristide Maillol/1907).
Fruit de plusieurs années de recherches menées, grâce au soutien de la "Fondation Dina Vierny", cette exposition - présentée à Roubaix, au "Musée d'Art et d'Industrie André Diligent/La Piscine", jusqu'au dimanche 28 mai - propose une lecture renouvelée du graveur, peintre et sculpteur français Aristide Maillol (1861-1944), originaire de Banyuls-sur-Mer, celle d’un travailleur probe et acharné, qui fait, défait, refait et bâtit un grand œuvre à partir d’un corpus réduit de formes. L’exposition dévoile ce processus créateur, parfois interprété à tort comme la répétition continuelle d’un même idéal féminin, alors que les recherches formelles uniques d'Aristide Maillol se déclinent dans un perpétuel renouvellement.
Très présent à Paris, grâce à ses monumentales sculptures en bronze, implantées dans les "Jardins du Carrousel", par la collectionneuse d'art française, qui fut la muse de l'artiste, depuis l'âge de 15 ans, ayant créé, à Paris, en 1995, le "Musée Maillol", Dina Vierny (Dina Aïbinder/1919-2009) et l'ancien ministre français André Malraux (Georges André Malraux /1901-1976), Aristide Maillol commença sa carrière artistique comme peintre, exposant au "Salon de 1890", à Paris, s'intéressant, très tôt, à la céramique et aux tapisseries, certaines de ses créations étant exposées, avant de se consacrer, vers 1895, à la sculpture.
Parmi ses huiles sur toiles, soulignons la présence de "Profil de jeune fille" (vers 1890/73,5 x 103 cm), ou encore de "Méditerranée", dite, aussi, "La Côte d'Azur" (vers 1895/96,5 x 105,5 cm), sans oublier son "Autoportrait" (vers 1884/ 33,5 x 24,5 cm).
Aristide Maillol dégageait des masses et construisait ses compositions, guidé par les possibilités infinies de la nature, avec un sens aigu de la synthèse et de l’environnement. Visant à une intemporalité, enracinée dans une sorte d’universalité archaïque, son œuvre est étranger à l’histoire des avant-gardes, mais compte pleinement dans l’histoire de la modernité.
A noter la présence de plusieurs céramiques, bas reliefs et sculptures en bois, encres et fusains sur papier, ainsi que d'une tapisserie "Concert de Femmes" ou "Concert champêtre" ou "La Musique" (160 x 208 cm), brodée à l’aiguille, en laine, soie, lin, fils d’argent et fils d’or.
La rétrospective, présentée à "La Piscine", souligne ainsi le rôle joué par Maillol dans le panorama de la sculpture de la première moitié du XXè siècle : face à l’expressionisme d'Auguste Rodin (1840-1917), il incarne les valeurs de clarté et d’équilibre des formes, qui font de lui l’aboutissement de la grande tradition classique.
La première sculpture ambitieuse de Maillol, "Méditerranée", apparaît, en plâtre, - à Paris, en 1905, au "Salon d’Automne" - comme le manifeste d’un « retour à l’ordre », proscrivant toute recherche d’expression. L’artiste instaure un nouveau classicisme, inscrivant des corps, presque exclusivement féminins, à l’anatomie charpentée et sensuelle, dans des formes géométriques simples relevant d’un art calme et apaisé. Aristide Maillol, à la demande tardive du Gouvernement français, la sculptera, ensuite, en marbre, entre 1923 et 1927.
A son sujet, notons le propos d'André Gide (1869-1951), "Prix Nobel de Littérature" (1947) : « Elle est belle ; elle ne signifie rien ; c’est une œuvre silencieuse. »
Présentée à Paris, au "Musée d’Orsay", du 11 avril jusqu'au 28 août 2022, et à Zurich, à la "Kunsthaus", du 23 septembre 2022 jusqu'au 22 janvier 2023, la présente exposition - "La Quête de l'Harmonie" - se termine avec la présentation grandiose de "L'Hommage à Cézanne" (1912), des "Nymphes de la Prairie" (1930) et de "La Montagne" (1937/176 x 185 x 78 cm), cette dernière illustrant l'affiche roubaisienne.
Catalogue (coédition "Musée d’Orsay" et "Gallimard"/cartonné/2022/352 pages) : 45€.
*** "Complètement Marteau ? Des marteaux de portes d'exception pour la serrurerie d'art Fontaine en 1925"
Fondée en 1740 par Lavollée, reprise, en 1842, par François & Joseph Fontaine, dont elle gardera le nom, à savoir la "Maison Fontaine" est la plus ancienne entreprise de serrurerie décorative en Europe.
En vue de l' "Exposition internationale des Arts décoratifs et Industriels modernes", à Paris, en 1925, la "Maison Fontaine", qui y disposa d'un pavillon, avait demandé à quatre artistes de réaliser, chacun, avec une grande liberté de création, un marteau de porte, en bronze, sur le modèle des bronziers padouans et vénitiens.
Dans une salle de "La Piscine", nous retrouvons ces marteaux de portes, authentiques oeuvres d'art - et quelques croquis préalables à leur réalisation -, créés par Antoine Bourdelle (1861-1927), Joseph Bernard (1861-1927), Paul Jouve (1878-1973 ) et, bien sûr, en complément de l'exposition principale, par Aristide Maillol.
*** "Odette Lepeltier (1914-2006) - Forme & Couleur" :
Parmi les grandes figures féminines de la céramique du XXè siècle, Odette Lepeltier (1914-2006) reste une référence encore trop peu connue. Aux côtés de Colette Guéden (1905-2000), Louise-Edmée Chevallier (1906-2003) ou encore de Guidette Carbonell (1910-2008), elle fait partie de ces femmes artistes, qui ont contribué, après-guerre, au renouveau avec la ronde-bosse et la couleur. Odette Lepeltier pratiqua la céramique en sculpteuse, ses vases en faïence prenantt la forme de figures féminines, ses décors, inspirés de la nature, étant modelés en terre, puis peints à l’émail stannifère.
Céramique d'Odette Lepeltier
Conservant deux oeuvres importantes de l’artiste, "La Piscine" a acquis, en 2011, toutes les archives d’Odette Lepeltier. Récit exemplaire de la vie d’une céramiste, associée à la diffusion commerciale, qui s’élabore au cours du XXè siècle, ce fonds inestimable a trouvé sa place dans le cabinet d’arts graphiques du musée, en lien avec la collection de céramique moderne de "La Piscine". Cette exposition permet, non seulement de présenter, d’étudier et de publier cet ensemble inédit et riche de 69 carnets et de plus de 1300 feuilles, mais également d’exposer, pour la première fois depuis la disparition de l’artiste, des céramiques restées dans les collections familiales.
Catalogue : coédité par le "Musée La Piscine" et "Gourcuff-Gradenigo".
*** "Marc Alberghina : Chronos" :
Vivant et travaillant à Vallauris - ville bien connue au niveau de la céramique, où Pablo Picasso (1881-1973 ) travailla, de même que Jean Marais (1913-1998), qui choisit même d'y reposer, un "Espace Jean Marais" devant, d'ailleurs, y être inauguré, dans les mois à venir, Marc Alberghina (°département de la Mayenne/1959) explore les nombreuses relations entre les racines méditerranéennes de la cité et le glorieux passé de son industrie faïencière. Son usage de la céramique est totalement au service d’une narration autour de thématiques existentielles et environnementales.
Présent à la visite de presse, ce bien sympathique artiste nous montra ses faïences vernissées, certaines, exposées au sein d'une vitrine, témoignant de notre vie quotidienne, telles ses "Arts de la Table", l'une nous dévoilant une pile d'assiettes et de couverts, l'autre des mégos de cigarettes écrasés, alors que d'autres oeuvres reposent sur le plan d'eau, toujours bien présent, de "La Piscine", dialoguant ainsi avec l'un des espaces de ce musée.
Techniquement, Marc Alberghina réactive des procédés de décoration et de façonnage typiques de la faïence vallaurienne. Pour cette première exposition personnelle à "La Piscine", Marc Alberghina propose des œuvres totalement inédites, conçues pour dialoguer avec les espaces du musée. Le projet associe plusieurs formes symbolique, dont une figure féminine allongée, à la fois déesse-mère et Ophélie, à travers elle, l’artiste relate la menace écologique qui plane sur nous.
*** "Robert Droulers (1920-1994) - L'Echappée belle" :
Autodidacte, né dans un milieu bourgeois, à Lille, Robert Droulers (1920-1994) commença à peindre dès son adolescence, d’abord en extérieur, dans la région lilloise et en Belgique, puis, à partir des années 1950, davantage en atelier.
S’orientant alors vers la peinture abstraite, il exposa au "Salon des Réalités nouvelles", fréquentant des artistes du "Groupe de Roubaix", mais aussi des membres de l’ "Atelier de la Monnaie", à Lille. Etant devenu un ami et fidèle soutien d' Eugène Leroy (1910-2000), il résida à Lambersart, de 1954 à 1964, étant l'un des cadres d'une entreprise textile familiale. Travaillant le jour, il consacrait ses nuits à la peinture, explorant le cubisme, l’expressionnisme et l’orphisme, exposant dans différentes galeries, à Bruxelles, Lille et Roubaix.
Ayant abandonné l'industrie textile, il gagna la Provence, habitant, de 1973 à 1980, à Aix-en-Provence, avant d'emménager à Saint-Rémy-de-Provence.
Des oeuvres de ses débuts, inspirées par Francisco de Goya (1746-1828), Le Greco (Domínikos Theotokópoulos/ 1541-1614), l’expressionnisme flamand et les expérimentations formelles de la "Seconde Ecole de Paris", jusqu'à celles de la maturité, marquées par les maîtres italiens. Des matières souvent denses et sombres de son époque de Lambersart jusqu'aux matières plus fluides et épurées de sa période provençale, en quête de transparence et d’évanescence, jusqu’à l’éblouissement lumineux.
Associée au "Musée Estrine", de Saint-Rémy de Provence, "La Piscine" nous présente une exposition d’envergure de Robert Droulers, un artiste polyvalent, proche du "Groupe de Roubaix", dont le travail inclut aquarelles, collages, dessins, encres, estampes, gouaches, mobiliers, peintures, sculptures, textiles, ...
A son sujet, l'écrivain et calligraphe d'origine chinoise, naturalisé français, en 1971, François Cheng (°Nanchang/1929), membre de l' "Académie française", depuis 2002, écrit : « Robert Droulers est un peintre qui cherche à capter la vision rêvée ou vécue, mais dans le même temps, il est celui qui a le souci de laisser advenir les choses vivantes. Rien d’étonnant à ce que l’une de ses figures de prédilection soit la fenêtre. Homme « d’air et de vent », chantre de l’inachevé, il se sait ange du double royaume. Au milieu de nous, nous aimant et nous aimantant pour ainsi dire à notre insu, il a frayé une voie qui a le don d’introduire sans cesse l’infini dans le fini, l’invisible dans le visible, le désir de beauté dans la mort transfigurée par la flamme allumée dans le coin le plus secret du cœur. »
*** "Belles Feuilles & Petits Papiers" : Vincent Tavernier : "Figures libres" :
Au premier étage, au sein de deux cabinets de dessins, la section "Belles Feuilles & Petits Papiers" nous attend, nous présentant des oeuvres sur papier (affiches, aquarelles, collages, dessins, gravures, lavis, photographies, ...) de Vincent Tavernier (°Saint-Germain-en-Laye/1978).
« Je ne trace pas, je détoure », écrit cet artiste, qui, travaillant, depuis 2011, à Marseille, se dit très surpris, mais heureux, d'avoir été, ainsi, invité dans le Nord, lui qui fit des études de maquettiste dans une école de communication digitale et de design graphique, l' "EDTA Sornas", à Paris, avant de poursuivre ses études à l' "Ecole des Beaux-Arts", à Versailles, où il apprit la gravure en taille d’épargne, incité à cette technique par son admiration pour le mouvement "Die Brücke" et l’art d’Emil Nolde (1867-1956). Une fois diplômé, il intègra l’atelier du plasticien Damien Valero (°Paris/1965), à Vincennes, où il enrichit sa pratique en s’initiant à la taille douce.
Ses œuvres sont des instantanés de scènes quotidiennes ou des images de mondes singuliers, créées au gré de ses émotions, de ses sensations, aujourd’hui, dans une grammaire plastique élargie à la peinture et à tous les domaines de l’estampe.
Ouverture : jusqu'au dimanche 28 mai, du mardi au jeudi, de 11h à 18h, le vendredi, de 11h à 20h, le samedi & le dimanche, de 13h à 18h. Prix d'entrée : 11€ (9€, en prix réduit). Accès : Gare "SNCF" & Station de Métro Jean Lebas (à 500 m du Musée / à +/- 30' en métro des deux Gares "SNCF" de Lille). Contacts : lapiscine.mussee@ville-roubaix.fr &Site web (avec réservations en ligne) : https://www.roubaix-lapiscine.com/.
Yves Calbert.