L’Ardenne du nord se découvre dans une revue transfrontalière
La 64e revue des Amis de l’Ardenne dédiée à la région de Stavelot et Malmedy vient d’être publiée. Un recueil d’histoire à dévorer
« C’est un véritable travail d’orfèvre, de minutie et de connaissance qui a mené à la création de cette 64e revue des Amis de l’Ardenne, association culturelle franco-belge.
Tous les trois mois, elle édite une nouvelle revue consacrée au patrimoine, à l’histoire, à la richesse des régions ardennaises belges ou françaises (également en Allemagne et au Luxembourg).
Plusieurs chercheurs et écrivains passionnés ont contribué à la rédaction de cette 64e revue de 118 pages. Jean-Marie Schreuer y retrace l’histoire et la géographie de l’Ardenne du nord; Albert Moxhet s’est consacré au panorama culturel, littéraire et artistique de la région à travers les siècles; quant à Marc Lamboray, il fait (re)découvrir aux lecteurs le folklore et les traditions qui caractérisent ces deux communes.
«Le carnaval de Malmedy, le laetare de Stavelot, les feux de la Saint-Martin… Toutes ces traditions de fêtes, de cérémonies, parce qu’il est important de les sauvegarder, détaille Marc Lamboray. Ici à Malmedy, elles sont bien conservées. Et finalement, nos rédactions s’imbriquent dans un beau dossier.»
Un dossier qui fait ensuite place à un riche recueil littéraire pour in fine constituer une revue complète au caractère transfrontalier affirmé. «C’est une revue qui fait honneur à Malmedy», a commenté le bourgmestre Jean-Paul Bastin.
Si ce numéro vous séduit, la prochaine édition traitera de Spa ( 65e numéro). De quoi faire honneur de nouveau à notre belle région, riche de son histoire et de son patrimoine. » ( L’Avenir du 16 juillet 2019 )
La revue est vendue au prix de 12€, disponible dans plusieurs librairies de la région. 350 exemplaires édités
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Des acteurs culturels et politiques ont participé à la présentation de la revue au Malmundarium : Albert Moxhet ( critique d’art ), Léon Halleux ( président de Malmedy Folklore ), Marc Lamboray ( historien et folkloriste ), Jean-Paul Bastin ( bourgmestre de Malmedy ), Maria Gentgès ( échevine honoraire ), Jérôme Aussems ( directeur de la Fédération du Tourisme de la Province de Liège ).
Présentation de la Revue « Les Amis de l’Ardenne » par un de ses rédacteurs
La revue des « Amis de l’Ardenne » est une émanation de l’association du même nom et en constitue la principale activité. Elle a une vocation culturelle généraliste, mais elle est prioritairement littéraire. Son territoire de prédilection est celui des 4 Ardennes : les Ardennes françaises, l’Ardenne belge, l’Eifel et l’Oesling. A l’origine, elle est française. Le siège social tout comme le siège administratif est installé à Charleville-Mézières. La publication est trimestrielle et compte en moyenne une centaine de pages par numéro.
La revue est l’héritière et la continuatrice d’une autre qui se dénommait « La Grive » et qui vit le jour dans l’entre-deux-guerres. D’emblée, cette première publication connut le succès malgré son affirmation très régionale. Elle fut rapidement acceptée dans les cénacles littéraires et les institutions officielles. Manifestement pionnière, elle affirma également une volonté transfrontalière, ce qui n’était pas fréquent à l’époque. Par exemple, des réunions où le monde se pressait, eurent lieu à Liège et à Namur, et, au cours des numéros, des dizaines d’articles furent consacrés à la Wallonie.
Un peu après que « La Grive » fut reprise par les « Amis de l’Ardenne », la revue changea donc d’appellation. Mais le même esprit y prévaut toujours, raison pour laquelle plusieurs numéros ont déjà été dédiés à des terroirs ou des thématiques belges. Puisque nous sommes dans le nord de l’Ardenne, je voudrais simplement rappeler les livraisons dévolues aux Hautes Fagnes ainsi q’à André STAS, écrivain de Verviers. Parmi les prochains dossiers auxquels on réfléchit, il faut en citer un sur la ville de Sa et un autre sur le canton de Saint-Vith.
Comme vous pourrez le constater, chaque numéro comporte deux parties principales : d’une part, un Dossier, tel celui sur l’Ardenne du Nord, et d’autre part, des Varia qui font la partie belle à des textes littéraires qui sont généralement sans rapport avec le Dossier. En outre, le lecteur trouvera une chronique poétique et une rubrique intitulée « Livres et Revues », consacrée à des parutions récentes. Enfin, quelques pages sont d’habitude réservées à la Vie de l’Association ; une manifestation comme celle-ci y trouvera sûrement sa place.
Il va sans dire que si la Revue est connue dans le département des Ardennes françaises et dans l’Ardenne méridionale belge, elle compte très peu d’abonnés dans cette région-ci. On souhaiterait que cela soit moins vrai à partir de ce jour. On assurera d’ailleurs une diffusion auprès des différents points de vente. Mais notre ambition ne consiste pas uniquement à augmenter le nombre d’abonnés dans cette région. En effet, la revue souhaiterait également trouver ici la collaboration d’auteurs oeuvrant dans ce terroir. Appel est donc lancé pour que des romanciers, des nouvellistes, des poètes, des érudits de l’Ardenne du Nord se manifestent et nous donnent à l’avenir des textes illustrant cette région ; on se fera un plaisir de les publier. Semblablement, un appel est adressé aux illustrateurs, qu’ils soient photographes, graveurs ou dessinateurs ; on est friand de toute image en rapport avec l’Ardenne, qu’il s’agisse de personnages ou de paysages. En effet, la revue souhaiterait également trouver ici la collaboration d’auteurs oeuvrant dans ce terroir. Appel est donc lancé pour que des romanciers, des nouvellistes, des poètes, des érudits de l’Ardenne du Nord se manifestent et nous donnent à l’avenir des textes illustrant cette région ; on se fera un plaisir de les publier. Semblablement, un appel est adressé aux illustrateurs, qu’ils soient photographes, graveurs ou dessinateurs ; on est friand de toute image en rapport avec l’Ardenne, qu’il s’agisse de personnages ou de paysages.
Telle se présente la revue des « Amis de l’Ardenne ». Elle a le projet de servir ce territoire qu’on appelle parfois « la grande Ardenne », qui est l’ancienne « Arduina Silva », qui va des plaines de Champagne à la chaîne volcanique de l’Eifel. C’est un projet résolument européen.
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Présentation du numéro 64 des « Amis de l’Ardenne ». ( Albert MOXHET )
Le numéro 64 de note revue « Les amis de l’Ardenne » concrétise très exactement le caractère frontalier souhaité par l’association qui l’édite. Entité géographique, l’Ardenne, contrairement à d’autres régions – je pense notamment à la Bretagne – n’a jamais constitué historiquement une unité politique en elle-même. De nos jours, la frontière qui la partage entre la Belgique et la France représente, hélas, plus qu’un simple trait sur une carte géographique. Cela signifie que, si l’on excepte les frontaliers immédiats, les Ardennais de l’un ou l’autre pays connaissent très mal l’autre côté de cette frontière qui reste trop étanche. Demandez à n citoyen de Charleville-Mézières si les noms de Durbuy, Stavelot, Malmedy, Vielsalm ou Theux lui sont connus, vous obtiendrez vraisemblablement une réponse négative. Faites l’expérience dans l’autre sens et vous constaterez que Vouziers, Renwez, Bogny, Rethel ou Nouzonville ne disent pas grand-chose aux habitants de l’Ardenne profonde.
Il faut savoir aussi que, parce qu’en France le nom "Ardennes" correspond à un département, on considère facilement qu’au-delà de la frontière, on n’est plus en Ardenne et que, donc, la pointe de Givet constitue l’Ardenne du Nord. En Belgique, nous savons que la limite Nord de l’Ardenne, c’est la Vesdre, si bien que, pour nous, l’Ardenne du Nord est celle qui entoure les vallées qui arrosent la région de Stavelot – Malmedy et que l’Ardenne méridionale descend vers la vallée de la Semois et se prolonge en France. Question de point de vue !
Loin de l’époque pourtant encore proche où, un « étranger » qui lui demandait son chemin, un villageois de la région répondait avec une certaine gêne : « L’Ardenne, Monsieur, c’est un peu plus loin .. », il était donc bienvenu de mieux connaître cette Ardenne belge qui est devenue un label recherché dans les domaines du tourisme et de la gastronomie principalement.
A l’initiative de Jean-Pierre Lambot, président de l’association « Les Amis de l’Ardenne », et directeur de la revue, il a donc été décidé de mettre l’accent sur l’Ardenne belge avec un dossier intitulé « L’Ardenne du Nord », centré sur la région où, entre Ourthe et Meuse, s’inscrivent les vallées de l’Amblève, de la Warche, de la Salm et de la Lienne. C’est-à-dire, précisément les territoires où, dès 651, avec la fondation des abbayes jumelles de Stavelot et de Malmedy, saint Remacle a véritablement fait battre le cœur de l’Ardenne.
Lorsque Jean-Pierre m’a demandé de coordonner ce dossier, j’ai eu le plaisir de m’entourer d’éminents collaborateurs. L’un d’eux, Pol Noël, a malheureusement dû se désister pour raisons de santé. Marc Lamboray est intervenu avec sa formidable connaissance des légendes, traditions et usages qui s‘articulent autour du fil conducteur qu’et l’Amblève. Il a aussi recruté son frère Yves, dont le talent éclate dans les photos de nos paysages vallonnés. Jean - Marie Schreuer, économiste féru d’histoire et d’archéologie, absent aujourd’hui pour des problèmes de santé lui aussi, nous a rejoints pour proposer aux lecteurs une esquisse historique et géographique de la région. Quant à moi, je me suis plu à en brosser un panorama artistique et culturel qui tente de révéler combien, du IXème siècle à nos jours, le patrimoine de ce cœur battant de l’Ardenne s’est développé dans de multiples domaines.
Ma gratitude – notre gratitude- s’adresse à toute cette équipe qui, ici comme à Charleville-Mézières, a conjugué ses ressources et ses talents pour vous offrir ce dossier qui tend à effacer la frontière en améliorant pour tous la connaissance de chacun. Dans ces remerciements, j’inclus évidemment M. Jean-Paul Bastin, bourgmestre de Malmedy, et les autorités communales, le Syndicat d’initiative, la direction et le personnel du Malmundarium, pour leur accueil. Et, bien sûr, notre ami Manfred Dahmen, qui a organisé cette réunion de présentation du numéro 64 des « Amis de l’Ardenne ».
------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Intervention de M. Léon HALLEUX, Président de la Société d’Histoire « Malmedy-Folklore »
En tant que Président de la Société d’Histoire « Malmedy-Folklore », je suis heureux de m’associer à l’accueil de nos amis français, je devrais même dire nos cousins, tant nous avons de points communs.
A Malmedy, nous sommes Wallons, donc latins et cela, depuis la conquête de Jules César. En 648, c’est aussi un moine français venu d’Aquitaine qui fonda le Monastère de Malmedy et deux ans plus tard, celui de notre ville jumelle de Stavelot, créant ainsi la Principauté Abbatiale de Stavelot - Malmedy qui perdura 1146 ans jusqu’à la Révolution française ! A cette époque, nous fûmes rattachés à votre beau pays. Malmedy devint sous-préfecture du 1er Empire, chef-lieu du 2ème arrondissement communal de l’Ourthe, siège d’un tribunal de 1ère instance.
En 1815, c’est Waterloo, la défaite définitive de Napoléon qui avait bouleversé toute l’Europe par ses guerres. Pour rétablir des frontières, un Congrès international se réunit à Vienne et redistribue les territoires.
Malmedy ira à la Prusse tandis que les « Provinces Belgique » ( comme on disait à l’époque ) vont au Royaume des Pays-Bas., la Belgique n’existant pas encore comme pays !
Jusqu’en 1878, notre identité francophone n’a jamais été contestée, en effet, le Roi Frédéric-Guillaume de Prusse ne disait-il pas qu’il était fier de posséder dans son Royaume un coin de terre où l’on parlait français.
Après la guerre de 1870 – 1871, le Reich allemand est proclamé à Versailles le 18 janvier 1871 et l’Allemagne est « prussianisée ». Tout bascule, 63 ans après notre annexion, le Chancelier Bismarck nous impose la langue allemande, proscrivant le français. Les actes officiels seront rédigés en allemand mais la population continuera toujours de parler wallon.
Après la guerre de 14 - 18, nouveau Congrès international cette fois à Versailles en 1919, dont l’article 34 du Traité rattache les cantons ‘Eupen, Malmedy et Saint-Vith à la Belgique. Pour nous Wallons, c’est la chance de pouvoir conserver notre langue latine !
Pour la transition administrative, l’Etat Belge désigne le Général - Baron Baltia à la tête d’un gouvernement spécial pour les 3 cantons, entre 1920 et 1925, dont le siège est Malmedy. De même, comme nous faisions partie de l’Evêché de Cologne, il y aura un Evêché transitoire à Malmedy avec son Evêque avant le rattachement à l’Evêché de Liège. De ce fait, l’église paroissiale est élevée au « grade » de cathédrale, titre qu’elle porte définitivement en vertu du Droit Canon !
Tout ceci pour vous dire que notre Société d’Histoire possède également sa revue qui fut créée en 1922 à l’instigation du Général - Baron Baltia pour sauvegarder la mémoire populaire de nos particularités. Le Gouverneur avait en effet remarqué que l’attachement de la population à ses traditions était une forme de résistance à la « prussianisation » et nous sommes fiers d’être toujours, avec note voisine Waimes, les dernières communes francophones du Nord de l’Europe, jouxtant la frontière allemande.
© François DETRY
Lien vers tous les reportages de François DETRY