"Ecole de Mons, 1820-2020, deux Siècles de Vie artistique", au "BAM", jusqu'au 16/08
Sur trois étages, une centaine d’artistes ayant été – ou étant toujours – actifs à Mons, nous sont présentés, par plus de 150 de leurs dessins, sculptures, peintures, photographies et installations exposés, près de la Grand’ Place de Mons, au« BAM » (« Beaux-Arts Mons »), jusqu’au dimanche 16 août.
Notre visite commence au 2è étage, avec une 1ère section : « Etre Artiste à Mons, au 19è Siècle », évoquant la création, à Mons, en 1781, de l’ « Académie des Beaux-Arts », et, en 1839, du « Musée des Beaux-Arts », qui, de 1841 à 1899, organisera le« Salon de Mons », tous les trois ans.
A peine la porte d’accès au 2è étage franchie, nous sommes mis en présence d’une huile sur toile puissante d’Antoine Bourlard (1826-1899), intitulée « Industria » (ca 1894/214 x 268 cm), présentant des ouvriers héroïques entourant une imposante figure féminine, l’ensemble symbolisant la réussite économique de l’essor industriel hennuyer. Présenté au « Salon de Mons », en 1896, ce tableau décora le Palais provincial du Hainaut, dès 1897, lui-même étant devenu, en 1871, directeur de l’ « Académie de Mons », poste qu’il occupa jusqu’à son décès.
Dans une petite salle voisine, plusieurs autres oeuvres de ce peintre sont exposées, dont « L’Arâtro » (1875/200 x 350 cm), nous présentant trois attelages de vaches évoluant dans un paysage montagneux. Peinte avec force, elle contraste avec deux vues d’autres vaches, se déplaçant dans « La Campagne romaine » (1885/73 x 149 cm) ou mangeant paisiblement de l’herbe, dans « Les Plaines du Hainaut » (s.d./170 x 280 cm).
Nous retouvant dans une grande salle, nous découvrons le travail d’une de ses élèves, Cécile Douard (1866-1941), décrivant, avec force, le dur labeur des mineurs, au travers de ses huiles sur toile : « Le Terril » (1898/195 x 114 cm), « Hiercheuse » (s.d./159 x 103 cm) et « Les Glaneuses de Charbon-Terril de Cuesmes-Borinage » (1895/ 136,5 x 193 cm), ce dernier tableau alliant le symbolisme au réalisme.
De styles totalement différents, notons, deux oeuvres d’Antoine Van Ysendyck (1801-1875), « Cornélie, Mère des Gracques » (1839/96 x 130 cm) et « Aristomène, Roi de Messines » (s.d./124 x 170 cm) ou encore « « Au Temps de nos Aïeux » (1899/233 x 257 cm), peint par Émile Motte (1860-1931).
Remontons le temps, avec une huile sur bois « La Jeune Mère attentive » (s.d./32,5 x 43 cm), de Germain-Joseph Hallez (1769-1840), professeur de dessin, à l’« Ecole centrale du Département de Jemappes », jusqu’à sa suppression, en 1802, devenant, l’année suivante, jusqu’en 1839, le 1er directeur de l’ « Ecole de Dessin de Mons », lui qui, âgé d’une vingtaine d’années, mit toute son énergie à sauver de la destruction la Collégiale Sainte-Waudru, au moment des troubles dûs à la Révolution française.
Autre salle avec, à nouveau, des oeuvres peintes avec force, comme « La Pieta » (1918/94 x 112,5 cm), d’Auto Carne (né Antoine Carte/1886-1954), où Jésus et la Vierge sont remplacés par un mineur décédé dans les bras de sa maman, cette huile sur toile faisant face à une autre maman portant, paisiblement, son enfant sur ses genoux : « Le petit Arlequin » (1932/100 x 80 cm), ce peintre échappant au travail forcé en ’40-’45,, grâce à sa position de professeur d’aquarelle, lui qui, ayant exposé, en 1921, au « Salon d’Automne de Paris », était, ainsi, connu jusqu’aux Etats-Unis.
Entre deux salles, quelques gravures nous sont offertes, dont ; « Le Graveur Auguste Danse » (s.d./14 x 19,5 cm), de Louis Lenain (1851-1936) ou l’élève peignant son maître ; « La Folie d’Hugo Van der Goes » (1878/45,3 x 59,7 cm), d’Auguste Danse (1829-1929), qui crée, en 1882, à l’« Académie royale des Beaux-Arts », un cours de gravure sur métal ; ou encore « Le Peintre amateur » (1881/44 x 30 cm), une eau-forte de Louis Greuze (1863- µ1950), lauréat, en 1888, du« Prix de Rome de la Gravure », avant de devenir, dès1897, profeseur de gravure, à l’ « Académie royale des Beaux-Arts », comptant Louis Buisseret parmi ses élèves.
En descendant d’un étage, nous entamons la seconde section : « Mons entre deux Guerres », avec une peinture de l’élève de Louis Greuze, Louis Buisseret (1888-1956), « Allégorie » (1934/160 x125 cm), alors qu’une autre de ses huiles sur toile illustre la couverture du catalogue, « La Romanesque » (1923/150 x 100 cm), ce peintre étant nommé, en 1929, à Mons, à la direction de l’ « Académie royale des Beaux-Arts », fondant, en 1928, avec son collègue Anto Carte, le « Groupe Nervia », un groupe qui accueillera Léon Devos (1897-1974), surnommé « le peintre de la joie », lauréat, en 1950, d’un « Prix Carnegie Garden Club », à Pittsburgh, aux Etats-Unis, après avoir été nommé directeur de l’ « Académie des Beaux-Arts », à Bruxelles », en 1948, son huile sur toile « Les Loisirs du Travailleur » (1925/100 x 120 cm) retenant notre attention.
Parmi les autres membres de ce groupe, notons encore un peintre né à Mons, Léon Navez (1900-1967), ayant enseigné à l’ « Académie de Mons » et à Bruxelles, à « La Cambre », dont l’oeuvre intitulée « La Toilette » (1935/ 159 x 128 cm) est présentée au« BAM ».
Fait « Chevalier de l’Orde de la Couronne », Alfred Moitroux (1886-1938), Premier Prix d’Excellence, en 1907, à l’ « Académie des Beaux-Arts de Mons », membre du groupe montois « L’Essaim », adepte d’un symbolisme raffiné et mélancolique, nous présente, ici, sa « Danseuse au Repos » (s.d./110 x 100 cm).
A la fin des années ’30, les artistes montois sont toujours attachés au figuratif, à l’exception de queques-uns, tels Achille Chavée (1906-1969) et l’écrivain Fernand Dumont (né Fernand Demoustier/1906-1945), qui créent, en 1939, le « Groupe surréaliste en Hainaut », auquel adhéra bien vite le photographe surréaliste Marcel Lefrancq, (1916-1974), dont plusieurs oeuvres sont exposées, comme son « Eloge du Carnage » (1946/30 x 39,7 cm).
La deuxième guerre mondiale ayant pris fin, nous changeons donc de section, la 3ème s’intitulant, tout logiquement : « Les Mondes de l’Art, à Mons, après 1945 », la pratique artistique évoluant, à Mons, par l’action pédagogique de quelques artistes, dont Edmond Dubrunfaut (1920-2007), l’un des fondateurs du groupe « Cuesmes 68 », et Gustave Camus (1914-1984), lauréat, en 1951, du « Prix de la Jeune Peinture belge », ayant exposé à la 30è « Biennale de Venise », aussi bien qu’à Rio De Janeiro. Devenu le directeur de l’ « Académie royale des Beaux-Arts », il fut le professeur de Michel Jamsin,et Charles Szymkowicz. Entre 1964 et 1980, nous assistons à la formation de nombreux colectifs d’artistes, l’ « Académie royale des Beaux-Arts » devenant, en 1976, l’ « ESAPV » (« Ecole Supérieure des Arts Plastiques et Visuels »), qui s’ouvre à de nouvelles disciplines de l’art contemporain.
De la photographie, passons à la sculpture, avec, notamment, une terre cuite, intitulée « Le Voyant » (s.d./60 x 46 x 21 cm), sculpté par Christian Leroy (1937-2007), cofondateur du groupe « Maka », ayant enseigné à Mons, à l’ « Académie royale des Beaux-Arts » et à l’ « ESAPV ».
Si cette sculpture est dépourvue de mains, à l’opposé, notons toute l’expression présente dans celles de sa terre cuite émaillée, intitulée « La Déesse Mère » (s.d./48 x 37 x 49 cm). De même pour les mains expressives de la femme représentée dans « Grève de la Faim » (1981/70 x 100 x 70 cm), sculptée en résine époxy, due à l’une des cofondatrices du groupe « Cuesmes 68 », assistante de Christian Leroy, au sein des deux Institutions artistiques déjà citées, Paule Herla (1944-2019).
Dans une autre salle, notre regard est accroché par une impressionnante sculpture, masculine cette fois, de cette dernière,« L’Autre » (ca 1980/200 x 125 x 60), installée face à une immense oeuvre peinte de l’un des cofondateurs du groupe « Marka » , ayant enseigné aux « Académies des Beaux-Arts » de Bruxelles et Charleroi, Charles Szymkowicz (°1948), intitulée « Le Monde-L’Oppression » (1973), réalisée en technique mixte sur papier marouflé sur panneau, incluant des collages…
Ainsi, en s’approchant de cette oeuvre, en bas, sur la gauche, nous décuvrons des titres de magazines, ainsi que cette phrase de Georges Duhamel (1884-1966) : « Si la civilisation n’est pas dans le coeur de l’homme et bien, elle n’est nulle part » ou encore une toute petite photo de l’attaque d’un commando palestinien, dans l’aéroport de Rome… Et si, deux « Unes » de la presse citent Pablo Picasso (1881-1973), c’est plutôt à Edvard Much (1863-1944) et à son oeuvre, peinte dans une technique totalement différente, « Le Cri » (1893) que nous pensons, les tons bleutés, nettement plus clairs, de cette toile, contrastant avec les couleurs vives de l’oeuvre maîtresse de Charles Szymkowicz.
Notons que cet artiste – qui, ayant réalisé des pochettes de disques, pour Léo Ferré (1916-1993), et des peintures murales, à Charleroi, dans la station de métro « Ouest » et l’ « Hôpital Marie-Curie » – reçut deux « Prix de l’ « Académie des Beaux-Arts de Belgique » (1970 & 1971), un « Prix Dasselborne » (1972) et deux « Prix AntoCarte » (1978 & 1980).
Autre peintre contemporain, membre du groupe « Marka », Michel Jamsin (°1941), l’un des créateurs, en 1971, du groupe « Maka », ancien professeur de dessin à l’ « Académie des Beaux-Arts », à Mons, auteur d’une série de tableaux intitulée « Moment d’un Photoroman », « Que me veux-tu ? » (ca 1977), cette peinture cellulosique sur panneau étant exposée au « BAM ».
Descendons encore d’un étage, pour découvrir, au sous-sol, d’une dernière section, intitulée « Les Voies de l’Art contemporain à Mons », qui reflète le vent de modernisation soufflant, ces dernières années sur l’Institution académique montoise « Arts22 », née, en 2012, de la fusion de l’ « ESAPV » (« Ecole Supériere des Arts Plastiques et Visuels ») et du « Conservatoire ».
Parmi les oeuvres exposées, notons « La Femme au Chien » (1985/95 x 35 cm), une acrylique peinte sur toile de jute, par Jean-François Octave (°1955). Sont, aussi, exposées des oeuvres de Philippe Bouillon (°1966), lauréat, en 1994, du « Prix de la Jeune Peinture Belge », et du Montois Pierre Liebaert (°1990), ayant reçu, en 2017, le « Prix des Arts plastiques de la Province du Hainaut ».
Ainsi se termine notre visite virtuelle, subjective quant au choix des oeuvres que nous venons de présenter, mais qui donne un apperçu de cette exposition, qui, au travers de 150 oeuvres présentées, met en valeur de nombreux artistes rattachés à l’ « Ecole de Mons », durant deux siècles, de 1820 à 2020.
A noter que dans le catalogue, nous trouvons, outre les photographies de toutes les oeuvres exposées, un texte fort intéressant, rédigé par huit auteurs, dont le commissaire, Denis Laoureux (°1974), docteur en histoire de l’art et d’archéologie, enseignant les matières relatives à l’art moderne et contemporain, depuis 2005, à l’« Université Libre de Bruxelles », où il poursuivit ses études. Parmi 224 pages, 36 d’entre elles présentent les artistes dont les oeuvres sont exposées, alors que 3 pages résument les principales dates de la vie artistique montoise, des écoles supérieures d’art aux différents groupes qui réunirent ces artistes.
Ouverture : jusqu’au dimanche 16 août, du mardi au dimanche, de 12h à 18h. Prix d’entrée : 09€ (06€, en tarif réduit / 02€, de 6 à 18 ans inclus). Réservation obligatoire : http://www.visitmons.be ou 065/33.55.80 (de 10h à 12h & de 14h à 17h30). Catalogue : Philippe Ernotte, Michel De Reymaecker, Denis Laoureux, Noémie Petit, René Plisnier, Xavier Roland, Sophie Simon & Christophe Veys (Ed.« Snoeck »/cartonné/ 2020/224 p./35€). Site web : http://www.bam.mons.be.
Consignes relatives à la crise sanitaire :
– réservation obligatoire, via le « Pôle muséal ».
– pas de vestiaire, les sacs de petites tailles étant acceptés.
– port du masque obligatoire, à partir de 6 ans (venir avec son propre masque).
– 1m50 de distance entre chaque visiteur (sauf personnes vivant sous un même toit).
– parcours flêché au sol (aucun retour en arrière n’est autorisé).
– gel hydro-alcoolique disponible.
– accès à l’ascenseur, limité à un visiteur par trajet.
– accès à chaque salle de sanitaires, limité à une personne à la fois.
– préférence accordées aux cartes bancaires, pour tout paiement (catalogue, cartes postales, …).
Prochaine exposition temporaire : « Roy Lichtenstein-Visions multiples », du samedi 10 octobre 2020 au dimanche 07 février 2021 (dates à confirmer, vu l’éventuelle prolongation de l’actuelle exposition).
Yves Calbert.