Artisans malgaches
Nous avons rencontré le président des "partisans" du marché artisanal Pochard,
à Analakély, au centre de Tananarive: Jean-Claude Rakotonoelson -"appelez-moi Noël"-.
- Vous êtes président de l'Union des artisans du marché Pochard. Pochard, d'où vient ce nom?
- Il s'agit d'un industriel français de l'époque coloniale, qui a laissé son nom au site.
- Comment fonctionne votre association?
- Nous formons un comité de 9 membres, tous élus.
- Ce que proposent les marchands est merveilleux, mais l'équipement général est assez précaire. Comptez-vous l'améliorer?
- Tout à fait d'accord, des équipements seraient indispensables, pour le confort des clients aussi bien que des partisans ( NDLR: "partisan" est le nom de tout occupant du marché en qualité de "partie prenante") . Il faudrait assainir le site en rendant les chemins intérieurs plus praticables, installer l'électricité, mettre des parkings à disposition. Pour le confort et la sécurité.
- justement, à propos de sécurité. Nous sommes à Analakély, la zone de Tananarive bien connue pour ses pickpockets...
- Personne ne peux le nier, et c'est une triste réputation, bien nuisible. Mais notre village est un parc autosécurisé par nos commerçants, vigilants et l'œil attentif à tout intrus suspect. Pour le reste, comme partout dans la commune, il nous arrive de recommander aux clients de reprendre un taxi après avoir fait leurs achats ( NDLR: il est vrai que le marché Pochard est le seul carré de Tananarive où un étranger peut déambuler l'esprit, les nerfs et les muscles détendus; mais hors du périmètre... )
- Vous parlez de projets d'équipements qui ne se réalisent pas. Le problème est financier?
- Il est d'abord et essentiellement juridique, ce qui vous surprendra. Nous sommes paralysés dans toute action sur le terrain par un contentieux foncier qui absorbe toute notre énergie. Autrement dit, nous n'avons aucune garantie quant à notre occupation de ce site collectif au cours des prochaines années. Mais nous comptons beaucoup sur les pouvoirs publics et sur la bonne volonté dont font preuve toutes les parties.
- Et vos moyens financiers?
- Il y a des gens qui circulent dans les galeries; beaucoup d'entre eux n'achèteront rien.
C'est la crise partout, et le commerce de l'art populaire en est la première victime.
La situation intérieure de Madagascar n'attire plus les touristes (NDLR le nombre de touristes étrangers a terriblement chuté depuis trois ans que dure une grave crise politique, avec de lourdes conséquences économiques, en raison notamment d'un déficit de reconnaissance de la communauté internationale.)
Les Malgaches sont pauvres, les collectivités locales démunies de ressources.
- Quel serait votre slogan pour attirer les clients?
- 1. Correction des marchands.
2. Produits de qualité, variés, et concurrentiels.
- Concurrentiels?
- Tout est la conséquence de la correction des marchands: les produits autant que les prix sont honnêtes. Le prix convenu lors d'un marché peut être estimé de 15 à 20% moins cher qu'ailleurs.
C'était un exemple des difficultés auxquelles doivent faire preuve des commerçants de bonne volonté, confrontés à de multiples difficultés, au cœur d'une grande capitale d'Afrique.
Espérons que les photos du reportage illustrent les propos du président Noël, et donnent une idée de la bonne humeur des "partisans" du marché Pochard.
Notes: Analakély s'écrit plus correctement "Analakely".
Cet article est à lire en relation avec: Tananarive, marché artisanal .
Tananarive (Antananarivo), le 31 janvier 2012.
René Dislaire