"Pas de Côté", dans le cadre du "TEFF" et des "Fêtes de Fin d'Année", à Namur

écrit par YvesCalbert
le 11/11/2023

Ce dernier jeudi 09 novembre s’ouvrait à la « Galerie du Beffroi »à Namur, l’exposition « Pas de Côté » –organisée par la Ville de Namur, en partenariat avec le « Musée Art et Marges »de Bruxelles -, ouverte jusqu’au dimanche 07 janvier 2024, dans le cadre des « Fêtes de Fin d’Année », ainsi que dans celui du  « TEFF » (« The Etraordinary Film Festival »), qui se déroule au « Delta »jusqu’au dimanche 12 novembre.

Conçues par des artistes autodidactes, au mode d’expression unique et à l’inventivité foisonnante, quelques quatre-vingts oeuvres, représentatives de la création artistique « outsider » actuelle, tant belge qu’internationale (collages,  peintures, sculptures, …) sont exposées, mettant en lumière des thématiques donnant tout à la fois matière à la  réflexion et à la délectation.

Situé au cœur de Bruxelles, dans le quartier des Marolles, le « Musée Art et marges » questionne l’Art et ses frontières, depuis près de 40 ans, sa collection – de plus de 4000 œuvres, réalisées par près de 200 artistes de toutes nationalités – s’étant constituée, dès le milieu des années ’80, auprès d’artistes autodidactes, d’ateliers artistiques pour personnes porteuses d’un handicap mental ou vivant en milieu psychiatrique.

« Art brut » ou « Art outsider », … les manières de désigner le travail de ces artistes se multiplient et évoluent sans jamais se fixer, car l’altérité (mot qui définit ce qui est « autre ») dont ils témoignent est toujours située par rapport à des normes qui bougent, elles aussi, en permanence.

La première spécificité de l’ « art brut » est la liberté, les artistes autodidactes créant leurs oeuvres sans être, au départ, influencés par des écoles d’Art, aucune règle n’étant à respecter. Ils créent parce qu’ils en ont besoin, pas pour être reconnus, leur objectif – au départ – n’étant pas d’exposer, la plupart ne l’envisageant même pas. On parle de la pulsion créatrice de l’artiste, qui obéit, ainsi, à une urgence intérieure l’incitant à créer.

Le terme « outsider » désigne celui qui est étranger, celui qui « se trouve au-dehors ». Le concept anglais d’ « art outsider », créé en 1972, se veut plus large que celui d’ « art brut », englobant les réalisations de personnes qui sont étrangères aux milieux et aux codes artistiques.

L’ « art différencié » est un terme né en Wallonie, à Liège, en 1979, dans le cadre des ateliers du « Créahm », qui,  intitiés par Luc Boulanger, accueillent des personnes handicapées mentales, le « Musée Art et Marges » exposant des oeuvres de toute personne porteuse d’un handicap, quel qu’il soit.

Notons que les matériaux utilisés peuvent être inattendus et de toutes natures. On trouve, pour remplacer les toiles , des chutes de bois ou du papier d’emballage, les dessins étant réalisés avec du matériel d’écoliers, comme les  crayons, pastels ou stylos-bille. En outre, des objets du quotidien peuvent être utilisés, tels que bouchons en liège,  bouts de tissus, coquillages, ficelles, …, tout étant bon pour nourrir la créativité débordante de ces artistes.

Cette exposition extramuros – baptisée « Pas de Côté » – est l’occasion pour ce musée bruxellois de valoriser et diffuser la création « brute » en touchant un public non initié à cet art.

Ouverture : Jusqu’au dimanche 07 janvier 2024, du mardi au samedi, de 11h à 18h, & le dimanche, de 12h à 18h.  Entrée gratuite. Fermeture : du dimanche 24 au mardi 26 décembre, les lundi 01 et mardi 02 janvier 2024. Contacts  : 081/22.84.76.

Il est évident qu’une telle exposition d’ « art différencié » est parfaitement complémentaire à un autre art, celui de la création de films, courts ou longs-métrages, réalisés ou mettant en scène des personnes porteuses d’un handicap, ce qui nous est offert par ce « TEFF », dont le 7è édition, organisée, comme toujours, par l’asbl « EOP »  (« Extra & Ordinary People ») est placée sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Philippe.

Cet extraordinaire Festival nous attend ces samedi 11 et dimanche 12 novembre, au « Delta », sis au confluent de la Sambre et la Meuse, à proximité de la place d’Armes et de la « Galerie du Beffroi ».

Parmi les longs-métrages, notons ce documentaire, à découvrir, ce dimanche 12 novembre, à 17h30, dans la  « Salle Médiator » :

*** « Lou » (François Gonce/Belgique/documentaire/2022/56′), consacré au chanteur-compositeur aveugle, porteur du syndrome de Morsier, « Lou B. », qui – étant le fils de Luc Boland -, fut demi-finaliste, en 2020-2021, de la 9è saison de « The Voice Belgique », ayant eu l’occasion de chanter, en duo, avec « Toots » Thielemans (Jean-Baptiste Frédéric Isidore Thielemans/ 1922-2016) et « Maurane » (Claudine Luypaerts/1960-2018).

« La musique me procure beaucoup d’émotions, c’est le premier dialogue de l’homme avant de pouvoir parler », déclare Lou Boland, ajoutant :  « Mes parents ont peur pour mon avenir, il faut que je travaille encore, je compte progresser au niveau de mon autonomie. »

Parmi les séances de courts-métrages, notons :

*** « Courts-Métrages Famille », ce dimanche 12 novembre, à 11h, dans la « Salle Médiator » :

Idéal pour vivre une matinée en fmille, avec la projection de 8 courts-métrages d’animation, maniant l’humour et la sensibilité, recommandés de 06 à 12 ans.

*** « Rétro Vie sexuelle et affective », ce dimanche 12 novembre, à 14h45, dans la « Salle Médiator » :

Une importante approche du droit à la « Vie sexuelle et affective » des personnes en situation de handicap, via une série de courts-métrages qu’appréciait Vincent Fries, membre du comité de sélection du « TEFF », décédé en 2023.

*** « Fais ton Court », ce samedi 11 novembre, à 16h, dans la « Grande Salle » :

Une compétition, ayant réuni 21 films, organisée pour la 2è année, à laquelle nous étions tous invités à participer, en réalisant nos films avec nos « smartphones ».

*** « Paris Courts devant », ce dimanche 12 novembre, à 17h15, dans la « Salle Tambour »  :

Cette « carte blanche » offerte à ce Festival parisien – dont le thème, cette année, est le handicap – nous permettra de découvrir les 9 courts-métrages retenus, sur les 26 proposés, en 2023, le règlement de cette compétition voulant que chaque film devait être conçu et réalisé en 7 jours, tourné en Île de France et d’une durée limitée à 10 minutes.

Soulignons que le samedi 11 novembre, en matinée, dans le bar du « Delta », nous pourrons rencontrer certains acteurs et réalisateurs des films projetés dans le cadre du « TEFF ».

Organisée le dimanche 12 novembre, à 20h, la « Soirée de Clôture » nous permettra de connaître le palmarès de ce 7è « TEFF », d’assister à la remise des Prix et de (re)voir quelques courts-métrages primés.

Soulignons que le « TEFF » se veut 100 % accessible, tous les films bénéficiant de sous-titrages pour sourds et malentendants et de traductions en langues des signes, des boucles à induction magnétiques et  des casques  d’audiodescriptions étant disponibles, les chiens guides étant les bienvenus, dix places de parking, pour les  personnes à mobilité réduite, étant réservées devant le « Delta », sur l’avenue Fernand Golenvaux.

Prix par séance (à l’exception des galas & conférences) : 7€20 (3€60, pour les adhérents du « Delta », les membres des personnels de la Ville et de la Province de Namur /4€, pour les élèves et étudiants, en séances scolaires). Pass Journée (accès à toutes les séances du jour, à l’exception de la « Soirée de Clôture ») : 18€. Remarque : à l’achat de 4 entrées pour une même séance, un cinquième accès nous est offert. Livret-programme (disponible à l’accueil) : gratuit. Contacts : 02/673.27.89. Site web : http://www.teff.be.

Des arts plastiques au cinéma, découvrons donc nombre de créations valorisant les personnes porteuses d’un handicap, ne fut-ce que pour éloigner nos peurs des différences, en espérant que tout soit fait pour que, dès l’école primaire, nos enfants puissent être initiés à l’acceptation de l’autre, quelle que soit son apparence physique, que ce soit par sa couleur de peau ou par le fait qu’il soit porteur d’un handicap, « une personne capable autrement », comme le déclare Philippe Croizon (°Châtellerault/1968), cet ancien ouvrier français, qui, ayant reçu, en 1994, à 25 ans, une décharge électrique de 200.000 volts, dût être amputé de ses quatre membres, ce qui ne l’empêcha pas de traverser La Manche à la nage, en 2010, et de terminer 49è du « Dakar », en 2019, un rallye  auquel il participera, à nouveau, en 2024.

Sa conférence, « Tout est possible », du jeudi 09 novembre, connut un grand succès, son ouvrage au titre éponyme (Ed. « Arthaud »/2023), étant disponible à la boutique du « Teff », à l’entrée du « Delta ». « Je suis mort le 5 mars 1994 ! J’affirme que ma vie s’est arrêtée ce jour-là. Puis une autre a commencé … », aime-t-il déclarer.

Comme l’écrit Luc Boland : « Nous sommes tous uniques, de par nos vécus singuliers. La comparaison et la concurrence n’ont aucun sens. Seule, la curiosité vis-à-vis de l’autre devrait nous guider, pour le plaisir d’apprendre et de se cultiver mutuellement. »

Yves Calbert.

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