"Grandeur et Déchéance - L'Abbaye de Floreffe", au "TreM.a", à Namur, jusqu'au 23 Janvier

écrit par YvesCalbert
le 20/01/2022

« Le saviez-vous ? Pour découvrir la superbe bible enluminée ou l’exceptionnel « Polyptique-reliquaire de la Vraie-Croix » de l’Abbaye de Floreffe, vous devriez vous rendre à Londres ou à Paris ! Mais … par chance ! Dans le cadre du programme proposé pour célébrer le 900è anniveraire de la fondation de l’abbaye de Floreffe par les  Prémontrés (ou "Norbertins", car sous l’initiative de Saint-Norbert/ndlr), ce patrimoine est pour un temps réuni à  Namur (au « TreM.a », « Musée provincial des Arts anciens du Namurois », jusqu’au dimanche 23 janvier/ndlr) ! »

« L’exposition 'Grandeur et Décadence. L’Hérigage patrimonial de l’abbaye de Floreffe' met à l’honneur l’exceptionnel patrimoinne de la plus puissante abbaye namuroise, malheureusement largement dispersé à l’issue de la Révolution française … », écrit Jean-Matc Van Espen, Député-Président, ayant les musées de la Povince de Namur, dans ses attributions.

Pour nous tous, en pensant particulièrement aux étudiants, dans le cadre de visites scolaires, superbement guidées, notamment, par la commissaire de l’exposition, Fiona Lebecque, conservatrice à la « Société archéologique », cette exposition nous retrace 900 ans d’Histoire de l’ « Abbaye de Floreffe ».

Et oui, l’ « Abbaye de Floreffe » – ancienne résidence des Comtes de Namur, sis à l’extrémité d’un éperon rocheux,  bordant la Sambre – n’est pas seulement un lieu bien connu par les teenagers des années ’70, festivaliers du réputé « Temps des Cerises », qui accueilit nombre de groupes et de chanteurs – tel le regretté Julos Beaucarne  (1936-2021) – ou, par les jeunes d’aujourd’hui, qui, depuis 2002, participent au bien connu festival « Esperanzah ».

De fait, cette abbaye - intégrée au Diocèse de Liège, jusqu'en 1559 - possède une riche histoire que cette  exposition restitue au mieux, nous présentant, entre autres, deux pièces exceptionnelles qui n’avaient plus quitté leurs lieux habiuels de résidence, depuis plus de 50 ans à savoir la « British Library », pour le 2è volume de la « Bible de Floreffe » (vers 1160), et le « Musée du Louvre », où il est conservé comme « Trésor national …  français », pour le« Polyptique-reliquaire de la Vraie-Croix » (après 1254), cette imposante pièce d’ofévrerie, ayant été créée suite à un miracle s’étant déroulé, en 1254, au sein de l’Abbaye de Floreffe, la relique de la Sainte-Croix ayant laissé couler du sang.

Deux évangéliaires sont, également préqsentés, celui d’Averbode (vers 1160, également), prêté par la  « Bibliothèque de l’Université de Liège« , ainsi que celui de Bruxellles (vers 1180), venant de la « KBR ».

Au niveau des reliquaires, une « Châsse-Reliquaire de Saint-Maurice » (autour de 1400) – propriété de la  « Fondation Société archéologique de Namur » – est, également exposée.

D’autres pièces importantes nous sont présentées, tels deux bras reliquaires, celui de Saint-Apollinaire (XIIIè siècle) et celui de Saint-Adrien (vers 1238), ce dernier, partiellement en argent, étant dû au travail d’Hugo d’Oignies (1178-1240) et de son atelier, ces deux pièces provenant du « Musée diocésain-Tésor de la Cathédrale », à Namur.

A souligner qu’une importante collection d’oeuvres d’orfèvrerie de ce dernier et de son atelier – propriété, depuis 2010, de la « Fondation Roi Baudoin » – est accessible au sein du batiment historique du« TreM.a », l’ « Hôtel de Maître de Gaiffier d’Hestroy », édifié au XVIIIè siècle.

Pour en revenir à l’exposition, voici un bref résumé de l’histoire de l’ « Abbaye de Floreffe » :

– 1621 : Les Contes de Namur, Godefroid et Ermesinte, donnent, à Saint-Norbert, les églises de leur domaine de Floreffe et tous les biens qui y sont attachés.

– 1122 : Etablissement, par Saint-Norbert, de la communauté de Floreffe, deuxième de l’ « Ordre des Chanoines réguliers de Prémontré », fondé, au début du XIIè siècle, par Saint-Norbert de Xanten.

– 1132 : L’abbaye est à la tête d’une circassie, province constituée de prieurés et d’abbayes filiales, qu’elle visite et dirige, son rayonnement dépassant les frontières locales, s’étendant en Allemagne, en France, aux Pays-Bas & au-dela, en Europe.

– 1188 & 1232 : L’abbaye est ravagée, une première fois par les troupes du Comte de Hainaut, Baudouin, la seconde, par celles de Ferrand, Comte de Flandre et du Hainaut.

– 1254 : Comme déjà écrit, dans l’enceinte de l’abbaye, le sang coule de la relique de la Sainte-Croix, ce miracle  étant à l’origine de la réalisation du « Polyptique-reliquaire de la Vraie-Croix » .

– XIVè siècle : Dilapidation des revenus de l’abbaye, en jeux et en festins, par certains abbés.

– XVè siècle : Retour à une stricte application des règles de l’ « Ordre des Pémontré », cette période étant troublée par la peste et la famine, mais, aussi, par des guerres opposant les Ducs de Bourgogne aux Princes Evêques de Liège, l’abbaye étant implantée sur les territoires de ces derniers.

– 1622-1692 : Fréquents pillages, l’abbaye étant occupée à plusieurs reprises.

– XVIIIè siècle : Construction d’un batiment particulièrement important, la bibliothèque, ainsi que des écuries, de la  ferme de la basse-cour & des quartiers abbatiaux, l’église abbatiale étant rénovée en style néoclassique.

– 1740 : Pierre-Lambert de Saumery (1690-1767), un écrivain calviniste, se montre élogieux : « Cette abbaye, une des plus magnifiques des Pays-Bas, est située sur la pente d’une agréable colline, d’où la vue es enchantée … Il est peu de monastères dont le séjour soit plus gracieux … »

– 1787 : L’abbaye possède 29 fermes, plus de 5.000 ha de terres. Forte de 68 religieux, la communauté  administrant 23 paroisses, sises au sein de quatre diocèses.

– 1794 : Pillage de l’abbaye par les troupes révolutionnaires françaises. De lourdes taxes forcent les Prémontrés à  vendre divers biens, une partie de la communauté émigrant en Allemagne.

– 1797 : L’abbaye étant mis en vente, comme bien national … français, à Paris, le Chanoine Richald, déguisé en  Républicain, réussit à le racheter.

– 1819 : Installation du« Petit Séminaire diocésain de Namur« , fermé, en 1825 par Guillaume 1er, Roi des Pays-Bas, jusqu’en 1830, la Belgique devenant indépendante.

_ 1844 : Décès de François Stevens, dernier Chanoine prémontré ayant résidé dans l’abbaye.

– 1865-1993 : Les religieuses de la Providence de Champion se chargent du service domestique.

– 1914-1918 : Réquisition et pillages, l’armée allemande, en 1918, transformant le Séminaire en école pour aspirants officiers.

– 1940-1944 : Seconde occupation allemande, l’enseignement s’y poursuivant avec difficulté.

– 1967 : La section de philosophie du Séminaire émigre à Namur, le nombe d’élèves du secondaire augmentant à l’ « Abbaye de Floreffe », où la mixité y fut introduite en 2000, la section primaire complète y étant ouverte, dès 1968.

– 1973 : Création de deux asbl, « Floreffe, Histoire, Culture et Tourisme » – dont l’objetif était de célébrer le 850è anniversaire de l’abbaye – et l’ « Assosiation des anciens Elèves », qui permit la rénovation du moulin-brasserie,  l’ouvrant au tourisme.

– 1976-1979 et 2002-… : Organisation de deux Festivals musicaux : « Le Temps des Cerises », puis  « Esperanzah ».

– 1994 : L’asbl « Séminaire de Floreffe », établissement secondaire libre catholique, devient indépendant de l’Evêché de Namur.

– 2021 : Création et mise en vente, avec un coffret collector, au moulin-brasserie, le samedi 27 novembre, d’une  « Cuvée spéciale Floreffe 900 », une bière brassée à Rebecq, par la « Brasserie Lefevre »,qui reprit, en 1983, la  production des « Triples de Floreffe » et autres bières, reconnues comme « bières belges d’abbayes », autrefois brassées à Floreffe.

Toute cette abondante histoire se trouve fort bien scénographiée, au sein de l’exposition « Grandeur et Déchéance-L’Héritage patrimonial de l’Abbaye de Floreffe », des fiches didactques, rechargeables sur nos smartphones se trouvant dans les différentes salles.

Outre différentes aquarelles, gouaches, gravures, lithographies, peintures et photographies montrant l’Abbaye à différentes époques – dont les oeuvres de Jan de Bever et Otto de Howen, toutes deux intitulées « Abbaye de Floreffe sur la Sambre » (vers 1740, pour la première, 1820, pour la seconde), ou encore d’Adrien de Montigny,  titrée « Floreffe », publiée dans l’ « Album de Croix » (1608) -, nous retrouvons différents objets – dont un ostensoire soleil, en argent (1720), de l’église Sainte-Agathe, à Franières – et documents originaux, dont celui rédigé pour l’achat de l’ « Abbaye de Floreffe », son moulin et sa basse-cour, le « 19 Germinal, An V » (en mars-avril 1797)  pour 500.000 livres, ainsi que la « Charte de Fondation » (1121), reproduite dans le « Cartulaire de Floreffe »,  conservé à Namur, aux « Archives de l’Etat ».

Soulignons que le site de l’ « Abbaye de Floreffe », préservé en son état du XVIIIè siècle, nous propose des visites guidées. Contacts : 081/44.53.03 & musee.arts.anciens@province.namur.be. Site web : http://www.abbaye-de-floreffe.be. A noter que ce dimanche 23 janvier, de 10h à 12h, une déambulation familiale et ludique, « Floreffe. Quartiers d’Histoire » nous est proposée, gratuitement, au départ du moulin-brasserie. Obligations sanitaires : port d’un masque buccal, présentation de son CST & d’une pièce d’identité. Contacts : info@lasan.be  &  081/84.02.00.  Réservations obligatoires : http://www.museedesartsanciens.be.

Outre le précieux catalogue de l’exposition (Ed. de la « Société archéologique de Namur« /21è ouvrage de la  collection « Guide du Visiteur du TreM.a »/collectif d’auteurs, sous la coordination de Fiona Lebecque/broché/ 2021 /80 pages/10€), un somptueux ouvrage, « Floreffe. Neuf siècles d’Histoire », est disponible à l’accueil (François Paquot et une vingtaine d’auteurs/« Ed. namuroises »/cartonné/ 2021/près de 400 pages/35€).

Ouverture : jusqu’au dimache 23 janvier, de 10h à 18h. Prix d’entrée (incluant l’accès à la collection permanente) : 5€ (2€50, pour les étudiants, à partir de 65 ans & par personne, au sein d’un groupe / 1€, par membre d’un groupe scolaire / 0€, pour les moins de 12 ans, les « Art. 27 », les détenteurs d’un « Museum Pas » ou d’un « Pass 365 »). Réservations obligatoires : 081/ Sites web : http://www.floreffe900.be.

Autres événements en relation avec ce prestigieux aniversaire :

– ce jeudi 20 janvier, à 17h30, au sein de l’église Saint-Loup : « Floreffe, abbaye et château de la famille contale de Namur, au 11è-13è siècles », une conférence donnée par Frédéric Chantinne, expert en archéologie médiévale.

– du vendredi 06 jusqu’au dimanche 08 mai 2022, sur le site de l’abbaye : « Florete Flores. 9 Siècles, 9 Lieux, 9 Scènes », un spectale, avec une cinquantaine d’acteurs & une centaine de figurants.

– dans le courant de l’année : « La Genèse de l’Abbaye prémontré de Floreffe aux XIIè et XIIIé Siècles », une publication des « actes du colloque », oganisé à Floreffe, en août 2021(« Ed. de l’AWAP »/Coll. « Etudes et Documents »).

Notons encore qu’un important vestige d’une dépendance de l’ « Abbaye de Floreffe » peut être découvert dans le Centre-Ville de Namur, à 200m de la Place d’Armes, à l’entrée de la Place de l’Ilon. Il s’agit de la« Porte de Gavière », qui, depuis 1951, est classée au « Patrimoine de Wallonie ». Edifiée en 1647, en pierre mosane bleue, à l’iniative de Charles de Séveri, abbé de Floreffe (de 1641 à 1662), elle marquait l’accès au refuge urbain des chanoines de son abbaye, lorsque les guerres, pes pillages ou l’insécurité générale obligeaient les religieux à quitter leur abbaye.

En 1953, ce portail fut restauré suite aux dégâts des bombardements de 1944, qui entraînèrent la perte des bâtiments du refuge, la satue de la vierge étant un moulage de l’œuvre disparue du sculpteur Georges Hanicq, la  niche l’abritant étant surmontée d’un grand cartouche frappé des armes de l’ « Abbaye de Floreffe ».

Yves Calbert.

  • « Polyptique-reliquaire de la Vraie-Croix »/après 1254 © « Musée du Louvre »
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