Balade à Vielsalm
Si passant près de myosotis, tu entendes l’un te dire : "je ne suis qu’une petite fleur de rien du tout, mais tu te souviendras de moi", rends grâces à Dieu, c’est qu’Il ta créé poète.
Et les marcheurs de Neuville, sur les pas des cheyeteux, ce jour de la Pentecôte 2012, ont tous entendu la nature leur parler.
Les cheyeteux, c’était ces ouvriers des ardoisières de Vielsalm, qui rentraient chez eux tous les soirs encrassés de poussière sur tout le corps et jusqu’au fond des poumons, harassés par une dure journée de travail à fendre le schiste en feuilles.
Le circuit de la balade dessinée par les responsables de la Royale Cæcilia invitait à la poésie, en cette fin mai où la nature parade, où la nature pavane.
Cæcilia, fondée en 1897, était une chorale aux chants bien profanes, qui assemblait les ouvriers des carrières. Fameux défi que celui de ces gens laborieux à la gorge tapissée de poudre de pierre.
Les promeneurs ont admiré la toute la poésie semée sur leur chemin.
Les sapins adolescents fiers d’arborer leurs pousses de l’année vert tendre gorgées de chlorophylle, ravissant les regards comme des jeunes filles faisant gonfler leurs chemisettes.
Le bouleaux frétillants dont les feuilles sont le plus sensible des anémomètres.
Les genêts fiers de leurs branches pesant sous le poids léger d'innombrables médailles d’or olympique.
Le tapis des renoncules de la même couleur, protégées par les petits cimetères que sont les fougères, attentives à leur devoir tutélaire.
L’aubépine immaculée qui chaque année refleurit aux premiers jours du printemps.
Pas besoin d’être un savant botaniste pour reconnaître les joyaux de la nature.
Et sur le bas du chemin des crêtes les habitants de Neuville, descendants des cheyeteux, rivalisent avec le même sens du défi que leurs ancêtres fous chantants pour faire de leur village exposé au nord, un jardin magnifique.
On le traverse en pensant à Marcel Proust : celui qui aime une fleur a un cœur qui ressemble à cette fleur.
René Dislaire
Lien: Balade gastronomique