Sur "Auvio", "La Disgrâce", Prix du Public du "TEFF" / Appel aux Cinéastes
Du mercredi 10 au dimanche 14 novembre 2021, sé déroulera au « Delta », à Namur, la 6è édition d’un événement exceptionnel, « The Extraordinary Film Festival » (« TEFF »).
Programmé, le mardi 05 janvier, dans « Infrarouge », sur« France 2 », après l’avoir été sur la« RTBF », grâce à « Auvio », nous pouvons (re)découvrir « La Disgrâce » (Didier Cros/Fra./2018/67′), un film qui a marqué de nombreux spectateurs, en 2019, au point de remporter, très justement, selon nous, le« Prix du Public Longs-Métrages ».
Lien de cet excellent documentaire : https://www.rtbf.be/auvio/detail_la-disgrace?id=2688330.
Synopsis : « Des hommes et des femmes que l’on regarde avec difficulté. Nos semblables, mais des personnes que l’on observe du coin de l’oeil faute d’avoir le courage de les regarder en face. Didier Cros leur donne la parole. Qu’est-ce que la singularité la plus dérangeante peut dire de notre humanité commune ? »
Inconnus du « grand public », aussi bien que de médias cinématographiques tel « Allo Ciné » (aucune photo de ce film n’y étant publiée), ces cinq protagonistes devinrent, en un peu plus d’une heure, les personnes les plus adulées de cet « extraordinaire » Festival, eux dont les faces ont été détruites, par balles, sur la terrasse du « Bataclan » ; par de l’acide sulfurique, lors d’un féminicide ; par une malformation, à la naissance ; par un cancer ; …
Patricia Lefranc, Guilhem Lignon, Gaelle Messager, Jenny Udriot et Stéphane Vouillaume, étaient tous présents, en novembre 2019, sur la scène du« Delta », à Namur, avec leur réalisateur, Didier Cros, et la productrice, Félicie Roblin. Ils reçurent deux « standing ovations », de plus de cinq minutes, à l’occasion des deux projections de ce film documentaire, présentées dans le cadre de la biennale « The Extraordinary Film Festival » (« TEFF »), organisée par l’asbl « EOP » (« Extra et Ordinary People »).
Sur cette même scène namuroise, comme sur « France 2 », à l’occasion d’un tournage de « Ça commence Aujourd’hui », la Valaisane Jenny Udriot, bien dans sa peau meurtrie, interpréta une chanson, dont le public reprit le refrain : « Je mettrai mon coeur dans du papier d’argent… ». Notons qu’elle n’accepte pas l’adjectif « défigurée », nous disant : « C’est faux, on a une figure, différente, c’est tout ».
En un peu moins d’un mois, Didier Cros – qui s’intéressa à ce sujet pour avoir eu, lui-même, une soeur porteuse d’un handicap – les filma, individuellement, au sein du célèbre studio parisien « Harcourt », fondé en 1934, alors que chacun était livré au talent de différents photographes de ce célèbre studio… Et c’est à Namur que ces cinq protagonistes, une Suissesse et quatre Français, se rencontrèrent pour la première fois, découvrant le film dont ils sont les acteurs.
Certains s’étonneront que le studio « Harcourt », temple du glamour, sanctuaire de la beauté, ayant vu défiler sur ses plateaux des stars du monde entier, ait pu accepter ce défi de photographier des personnes dont le visage a été détruit. C’est tout à l’avantage de Didier Cros d’avoir pu convaincre ces professionnels de la photo d’aider par la réalisation de leurs clichés à la réappropriation du regard sur soi, chacun d’eux (d’elles) ayant pu choisir la photo dont il (elle) acceptait l’édition en vue d’être exposée…
Patricia Lefranc, brûlée à l’acide sulfurique par un ancien compagnon, déclare, dans ce documentaire :« Je suis morte socialement. Pour avoir une vie, il faut avoir un visage ». Emue jusqu’aux larmes par l’accueil du public namurois, elle prit le micro, déclarant : « Vous nous faites vivre de telles émotions ! Comment voulez-vous que l’on s’arrête de pleurer ?… », promettant d’être présente, en 2021, au sein de l’équipe des bénévoles du « TEFF »... Superbe !
Ce film leur donnant la parole, nous pouvons (ré)entendre comment ces anonymes vivent sous le poids de la différence, comment ils acceptent ce qu’ils sont et le font admettre aux autres ?
Ainsi, nous entendons Stéphane Vouillaume, victime d’un cancer, nous dire : « La vraie monstruosité, n’est-ce pas cette norme que la société fait peser, cette obligation de paraître qui exclut immédiatement ceux qui sortent de la norme ? »
Avis en ligne de « film-documentaire.fr » : « Au cœur de ce film, les hommes et les femmes que l’on regarde avec difficulté. Ceux sur qui les enfants s’interrogent à haute voix sans retenue, ceux qui suscitent une curiosité malsaine et dont on se moque parfois. Nos semblables, mais des personnes que l’on observe du coin de l’œil faute d’avoir le courage de les regarder en face. Ce film donne la parole aux faces détruites, aux identités déglinguées par le hasard ou la destinée. Figures malformées de naissance, visages ravagés par les accidents de la vie. Comment vivre sous le poids de la différence ? Par quoi doit-on passer pour accepter ce que l’on est et le faire admettre aux autres ? Qu’est ce que la singularité la plus dérangeante peut nous dire de notre humanité commune ? Ce film est un face à face. Un face à face des témoins avec les spectateurs, et des témoins avec eux-mêmes. »
Avis aux réalisateurs : jusqu’au lundi 1er mars, ils peuvent soumettre leurs films, obligatoirement en ligne, à l’organisation de ce Festival, via cette adresse électronique : film@teff.be, sachant qu’une nouvelle catégorie est réservée aux amateurs ou professionnels belges, leurs courts-métrages, exclusivement tournés avec un… smartphone, ne pouvant dépasser deux minutes. Site web : http://www.teff.be.
Luc Boland, cinéaste bruxellois, créateur et directeur artistique du « TEFF », vient de nous confier :« Nous avons déjà reçu des films de 15 pays (Allemagne, Australie, Canada, Croatie, Espagne, Etat-Unis, France, Italie, Nigéria, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse, Turquie et Belgique). Des réalisateurs d’autres pays (Corée du Sud, Inde, Iran, Tunisie et Venezuela) ont, également, inscrit leurs films dans la catégorie des films publicitaires. »
A noter ce que Luc Boland tient à ajouter : « Si nous devons casser les prejugés et demystifier le handicap, soulignons que le « TEFF » est un Festival ouvert à tous. De fait, les personnes porteuses d’un handicap ne représentent que 7 à 8% de nos spectateurs. Depuis les sorties de deux films, ‘Intouchables’ (2011) et ‘Hors Normes’ (2019), des réalisateurs français Olivier Nakache et Eric Toledano, nous sommes heureux de constater une réelle évolution, tant dans la production que dans le regard de la société, un peu comme pour les films mettant en scène des homosexuels, qui étaient rares jusqu’à la fin des années ’80, alors qu’aujourd’hui , il sont devenus communs, une comédie se devant de compter, parmi les acteurs, au moins un noir et un homosexuel, voire, maintenant, une personne porteuse d’un handicap. »
« Conscients de l’actuel problème sanitaire, nous avons prévu trois plans : A, un Festival normal ; B, du présentiel réduit et une présence en ligne ; C, tout sur internet… Mais je ne pourrais que regretter ces deux dernières solutions, car notre ADN est la rencontre entre les gens, qui se découvrent dans leur réalité. »
Dans cet espoir d’une situation culturelle de retour à la normale, n’oublions pas cet important rendez-vous namurois, dans les trois salles du « Delta », chaque film étant projeté à deux reprises, entre le mercredi 10 et le dimanche 14 novembre 2021.
En attendant, dès aujourd’hui, n’hésitons pas à nous rendre sur« Auvio », afin de (re)découvrir un document particulièrement humain, « La Disgrâce ». Respect !
Yves Calbert.