Liège. Exposition sur Noël et les tsars?

écrit par ReneDislaire
le 23/12/2012
Exposition. Le froid.

On est toujours un peu mal à l’aise de ne pas dire que du bien d’un événement dont les organisateurs, après bien des efforts de bonne volonté, n’espèrent que des éloges.
L’exposition « Noël en Russie des tsars » axe sa publicité, depuis le début, sur le fait qu’elle est abritée par l’ancienne poste de Liège, prestigieux bâtiment à l’abandon depuis de nombreuses années : « chacun se souvient de… ». Et aussi sur le fait que Lara Fabian, dont on a eu l’occasion d’apprendre qu’elle est le « chantre de l’âme russe » et qu’elle fait la promotion pour l’instant d’un album intitulé « Mademoiselle Jivago », était à l’inauguration.
« À Liège, rien n’est trop cher si ça fédère »
Dès l’ouverture de l’exposition, en octobre, les réseaux sociaux y ont été d’un tir de commentaires sur les prix : pas celui du cachet de Laura Fabian, mais celui de l’entrée de l’expo. Avec les traditionnels amalgames qui font la renommée de la cité ardente : du mégalo, le citoyen crachera ensuite au bassinet. « À Liège, rien n’est trop cher si ça fédère », a-t-on coutume de dire quand on a échoué dans une opération ambitieuse.
Se promener dans l’exposition sera agréable : mais pour le commun, ça prend 15 minutes, dont 5 pour trouver la sortie. Un loisir à 51 euros de l’heure, c’est vrai que ce n’est pas donné.
Handicapé ? Pas avant 60 ans svp
L’entrée est à 8,5 euros : un prix normal, non ? À l’entrée un homme bcbg nous bouscule et s’adresse au préposé assis dans un cadre dont ce n’est pas la veille qu’on a pris les poussières : c’est combien l’entrée ? " 8 euros 50". Vous n’êtes pas gênés ? Et l’homme de s’en aller serein, comme s’il avait accompli une mission. Une famille nous suivait et intervient : et pour les handicapés ? Le préposé toise un jeune trisomique, 20 ans bien sonnés, mais pas 30. "Vous voyez bien que votre fils n’a pas 60 ans, il faut 60 ans pour avoir une réduction" (il n’a pas dit "d'handicapé"! ouf!). Puis sur un ton qui en dit long : "c’est une exposition privée ici, on ne sait pas faire de cadeaux à tout le monde"(1). La famille du trisomique s’en va, sur la pointe des pieds.
Un Noël nommé Derrick
Quand on entre dans une expo, la première pièce attire toujours l’attention, on s’y attarde, avant que la lassitude vous gagne ensuite.
Dans une pénombre, des maquettes de derricks dignes de la ville la plus laide du monde vous captent, avec d’instructifs commentaires. L’exploitation du pétrole (le naphte, pour citer Alexandre Dumas) à Bakou. La situation il y a un siècle, la situation aujourd’hui. Avec les réserves du gisement, il y a un siècle, et aujourd’hui. On apprend que Nobel y a fait fortune.
Intéressant. Mais qu’en ont donc à cirer, du naphte, de la fortune de Nobel, et des derricks de Bakou, les enfants à qui on a promis Noël ?
C’est beau quand même !
Puis, on accède enfin à la féérie : l’hiver en Russie jadis. Des couleurs et des couleurs, vives et brillantes, sous des lumières aussi éclatantes qu’un éclairage de Swarovski.
On se promène dans un environnement de maquettes, de figurines, de miniatures. De hauts personnages en habits comme on les aime. On ne fait même pas attention aux quelques indications explicatives, vraiment sommaires (on est loin du naphte de Bakou).
C’est la Russie d’antan, l’hiver russe mythique, présenté comme un bonheur.
Des heures et des heures de travail, qui valent le coup d’œil.
Presque autant que le vrai marché de Noël, qui bien à tort craignait la concurrence...
Car question convivialité, ambiance, un peu tristounet.
C’est où la sortie ?
Un moment qui vaut ses 8,50 euros.
Trois vieilles dames dignes, qui ont donc payé 7,50 euros puisque seniors, typiquement liégeoises, font un conciliabule au milieu de nulle part.
- Monsieur, vous savez par où c’est la sortie ?
- ?
- On cherche, on cherche, mais on ne trouve pas.
- Si encore on savait par où on est entrées, mais pas moyen de s’y retrouver !
- Heureusement qu’on ne doit pas aller à la toilette !
- Et il n’y a vraiment personne pour nous renseigner, on ne voit pas d’organisateurs, et vous êtes le seul visiteur depuis que nous sommes là.
- On pourrait voler ce qu’on veut, ni vu ni connu.
- Heureusement qu’ici, il n’y a pas d’arabes.
- C’est pour ça qu’on a dit que c’est une exposition sur Noël, les arabes ne peuvent pas venir ici parce que leur religion leur interdit.
- Pourtant ici ce n’est pas sur Noël, l'exposition, on n’a pas vu de petit Jésus.
- Avec ça on ne trouve pas notre chemin, on est passées plusieurs fois à la même place.
- Si jamais il y avait le feu !
- Ils auraient dû mettre des flèches par terre comme à Ikea.
- Pour le prix qu’on paye !
- Oui, mais il a fallu payer la marraine, comment ç’qu’elle s’appelle ?
- Ah ! oui, la ministre ! C’est vrai qu’il y a eu des fameux frais de réception, tout ça pour avoir des subsides.
- Mais non, ce n’est pas une ministre (2), c’est une chanteuse…
- Ah ! Si au moins on elle chantait aujourd’hui, c’est quand même un peu lugubre ici, il n’y a personne!
- C’est dommage qu’on n’entend pas des chansons d’Ivan Rebroff!
Ceci dit, c’est vrai qu’il n’y a pas de sortie. Il faut lever un cordage qui protège une table couverte de souvenirs, que personne ne tient -pour espérer quelle recette ?- et s’en aller un peu comme un voleur. Comme un arabe, quoi ! lol !
Vraiment une exposition bon enfant. À voir. Si on a le temps et des thunes.
Sinon, regardez l’affiche. Indiscutablement, elle est belle.

René Dislaire

(1) À bien regarder les affiches, aucun pouvoir public n'a mêlé son nom à cette manifestation.
(2) Confusion avec la ministre de la culture Fadila Laanan, sans doute.

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