"Tintin c'est l'Aventure" N° 5, en Librairies et dans les Boutiques "Tintin"

écrit par YvesCalbert
le 29/06/2020

« Les plus grandes aventures sont intérieures », écrivait « Hergé » (Georges Remy/1907-1983), une phrase  reproduite dans l’entête du N° 05 de « Tintin c’est l’Aventure », magazine édité conjointement par « Moulinsart »  et « Géo », revisitant l’univers d’Hergé, tout en partant à la découverte du monde d’aujourd’hui, nous avons l’occasion, essentiellement, de revivre les « Aventures de Tintin », en Chine.

Ainsi, en page 35, nous découvrons un entretien avec Tchang Yifei, fille de Tchang Tchong-Jen (1907-1998), l’ami d’Hergé, et co-auteure de « Tchang » (propos recueillis par Christophe Quillien) : « Aujourd’hui, on peut acheter les albums de Tintin dans les librairies. Mais ‘Le Lotus bleu’ et ‘Tintin au Tibet’ sont souvent épuisés, en raison de leur succès ! Ils sont un motif de fierté pour les lecteurs chinois, car ils défendent la culture de leur pays. »

« Mon père était déjà reconnu dès le lendemain de la seconde guère mondiale ! Il avait ouvert l’un des tout premiers studios d’enseignement à Shanghai, puis il avait été nommé directeur de l’Académie de sculpture et de peinture à l’huile de la ville… La Révolution culturelle l’a frappé alors qu’il était à son apogée en tant qu’artiste. Pour lui, ce fut un terrible gâchis.« 

A la question de Christophe Quillien, quant aux planches imaginées par Maryse et Jean-François Charles pour ce  N° 5 de « Tintin c’est l’Aventure », Tchang Yifei répond : « C’est un très bel hommage et un clin d’oeil émouvant à l’amitié qui liait Hergé à mon père. »

Ce couple d’auteurs belges signe une BD originale de 10 planches (p. 52 à 61), précédées de 2 oeuvres de 20,5 x28,8 cm (p. 50 & 51), reproductions issues d’une farde-collector, que Jean-François Charles consacra, en 2018, à leur série « China Li ». 

Lisons ce que déclare Maryse Charles, la scénariste des 2 albumsde « China Li », édités par « Casterman », en  page 49 du N° 5 de « Tintin c’est l’Aventure » :  » Hergé a réussi à signer un album fantastique au plan du respect des éléments historiques, alors qu’il s’agissait, à l’époque, d’une oeuvre destinée aux enfants, avec tous les interdits que cela suppose.Tchang l’a influencé pour en faire un récit exemplaire et positif. Aujourd’hui la bande dessinée s’adresse principalement à un public adulte. La plupart des magazines pour la jeunesse ont disparu. Le regard contemporain des auteurs de bande dessinée sur la Chine n’est plus du tout dans le réalisme idéalisé des aventures de Tintin. »

« Au contraire d’Hergé, nous avons pu nous rendre en Chine pour faire des repérages et aller au contact de la vie locale et de la population chinoise. Au début des années 1930, quand l’histoire du ‘Lotus bleu’ a été dessinée, la Chine était encore un pays très fermé. »

Ci-dessous, une case d’une fumerie d’opium, fantasmée par Jean-Francois Charles, non reprise dans le présent magazine, mais qui illustre le propos de son épouse, Maryse Charles, le temps ayant fait son oeuvre et la bande dessinée ayant fort évolué depuis l’époque du « Lotus bleu », édité en noir et blanc par « Casterman », il y a 65 ans.

Présentant ce magazine, nous lisons : « En 1936, paraît la première aventure de ‘Tintin en Extrême Orient : Le Lotus bleu’, qui offre une vision très nuancée de la Chine, loin des cichés parfois très nombreux des premiers albums. Pour ce voyage fictif, Hergé s’est pour la première fois documenté de près et collabore avec un étudiant chinois en sculpture, Tchang Tchong-jen. Cette rencontre marque un tournant décisif dans son travail de création : non seulement Hergé s’attache désormais à des retranscriptions fidèles, mais l’art du dessin de son ami laissera une empreinte durable sur son oeuvre. C’est la naissance de la ligne claire. »

De son côté, Pierre Baptiste, conservateur du Musée Guimet, à Paris, spécialiste de l’Asie du sud-est, répond aussi, à des questions de Christophe Quillien, dont celle-ci, p. 36 : « La vision d’Hergé est-elle conforme à (la) réalité ? ». Sa réponse : « Plutôt, oui, même s’il l’a adoucie, car il s’adresse à un public d’enfants. Mais la scène de l’inondation, par exemple traduit bien la souffrance du peuple chinois. »

Soulignant l’appui apporté parTchang Tchong-jen, dans la rédaction chinoise fidèle des textes des banderolles et  enseignes présentes au sein du « Lotus bleu », notons encore une autre réponse de Pierre Baptiste, figurant en page 38 : « Tchang Tchong-jen a vraiment joué un rôle de directeur artistique ». Par ailleurs Christophe Quillien  écrit, en page 12 : « Et si la plus belle aventure, c’était la rencontre de l’autre ? En embarquant, ans le ‘Lotus bleu’, pour l’Empire du Milieu, Tintin s’apprête à découvrir une Chine mystérieuse, intrigante recelant mille secrets… Mais le plus beau trésor qu’il gardera de ce voyage en Extrême Orient sera son amitié avec le jeune Tchang. Une histoire qui évoque celle d’Hergé et d’un ami perdu puis retrouvé », qui deviendra un personnage de BD, tant lors de cette inondation qu’au sein de « Tintin au Tibet », édité en 1960, par « Casterman ». 

« Grâce à vous, ma vie a pris une orientation nouvelle. Vous m’avez fait découvrir quantité de choses : la poésie, le sentiment de l’unité de l’homme et de l’univers », furent les mots d’Hergé, dans une lettre adressée à Tchang.

En page 71, nous trouvons la reproduction d’un dessin original, en noir et blanc, annoté de multiples précisions sur le choix des couleurs et des grisés, destinées à l »imprimeur, pour la couverture du « Petit Vingtième », du 27 juin 1935.

Plus loin, de la page 80 à la page 88, Laura Stioui interroge Sylvain Tesson :« Tintin a-t-il contribué à vous donner le goût de l’aventure ? » L’écrivain-voyageur de répondre : « Il a contribué à creuser mon infinie nostalgie, car le monde dans lequel nous vivons n’est déjà plus celui de Tintin. Ces cinquante dernières années ont vu passer une génération qui a été dévastatrice. hergé décrit un monde de la diversité, avant les grandes mutations globales des années 1980 et l’arrivée d’Internet… Aujourd’hui on voyage toujors aussi rapidement, mais on reste dans la même pièce du musée. Où que l’on aille, on retrouve des gens qui vivent plus ou moins comme nous, qui portent les mêmes vêtements, qui conduisent ls même autos et qui ont tous leurs yeux rivés sur leur smartphones ! »

« Je reviens d’un voyage au Tibet, et cela m’a frappé. C’est incroyable tout ce qui a pu se passer au Tibet en cinquante ans… Aujourd’hui ce pays est entièrement aménagé : il y a des routes, des hôpitaux, de l’électricité… L’esprit de révolte qui animait les Tibétains s’est éteint : les jeunes de vingt ans trouvent ça formidable d’avoir le chauffage et que leurs téléphones captent bien le réseau… »

Le « carnet de voyage », pages 96 à 107, est, quant à lui, consacré à Lorenzo Mattotti, « illustrateur, peintre, auteur de bandes dessinées et désormais réalisateur… (Ce) touche à tout a exploré le monumental site d’Angkor, plongé dans les ambiances survoltées de Rio et s’est perdu dans les ruelles labyrintiques de Venise. En exclusivité, le maître italien nous dévoile ses villes et paysages fétiches, qu’il remodèle jusquà l’abstraction« , écrivent Caroline Ollagnier-Rondeau et Frédéric Granier, en p. 96, précédant un superbe encart coloré, de 8 pages, réalisé par  Lorenzo Mattotti, le réalisateur du dessin amimé « La fameuse Invasion des Ours en Sicile » (France-Italie/ 2019/ 82’/film lauréat, en 2019, du « Prix de la meilleure Réalisation », du« Festival international du Film », à Rome, ayant remporté, en 2016, le « Prix spécial de la Fondation Gan », aide à la création cinématographique). A noter qu’à partir du mercredi 1er juillet, grâce à la réouverture salles, ce film sera à nouveau à l’affiche de plusieurs cinémas,  à Bruxelles et en provinces…

Dans son « Tour du Monde à portée de tous », Maxime Dewilde écrit, page 114 : « Comme Phileas Fogg, Tintin a traversé tous les continents. Autrefois réservés aux plus fortunés ou aux plus aventureux, les voyages lointains font de plus en plus d’adeptes, tout comme le tour du monde. »

Ainsi, à la page 120, nous serons en Egypte, près du Sphinx et des Pyramides, avec les Dupondt, et à la page 121, avec Haddock et Tintin, en Inde, devant le Fort Rouge, de Delhi.

Avec le chapitre suivant, « Arts et Civilastions », de la page 126 à la page 129, sous la conduite de Valérie Kubiak  et Leia Santacroce, nous nous retrouvons à la fois en Amérique latine et à Bruxelles, lisant ce texte, page 128 :  « Dès les premières vignettes de l’ ‘Oreille cassée’, le lecteur parcourt les salles d’un musée etnographique. Un clin d’oeil au musée du Cinquantenaire, à Bruxelles. C’est en arpentant ses allées, dans les années 1930, qu’Hergé  était tombé sur une figurine précolombienne haute de 55 centimètres qu’il allait porter à la postérité. La statuette, toujours visible aujourd’hui, représente une idole vénérée par les Chimus, un peuple établi sur la côte nord du  Pérou, entre le XIIè et le XVè siècle. »

Et nous voici en pleine actualité, puisque c’est ce mardi 30 juin, que le « Musée Art et Histoire » rouvrira ses portes au public, après trois mois et demi de fermeture sanitaire. Ayant été invités à une visite de presse de cet important musée, ce dernier jeudi 25 juin, nous avons suivi le nouveau parcours – qui sera, dans un premier temps le seul autorisé, pour raisons sanitaires -, découvrant, salle après salle, une statue en bronze de Shiva, présente dans  « Les Cigares du Pharaon » (4è album, édité en noir et blanc, en 1934) ; un superbe lit-alcove, reproduit dans « Le Lotus bleu » (5è album, édité en noir et blanc, en 1935) ; la momie dite de Rascar Capac (du nom créé par Hergé, pour cette authentique momie qui devint un personnage de BD, dans les pages des « Sept Boules de Cristal » (13è  album, édité en 1948) ; des poteries précolombiennes, représentées dans « Le Temple du Soleil » (14è album, édité en 1949) ; sans oublier la fameuse statuette en bois qui fut vénérée par les Chimus, ayant donné l’idée à Hergé de la dessiner avec… « L’Oreille cassée » (6è album/édité en noir et blanc en 1937), la figurine originale, exposée au musée, ayant un bras et un pied cassés, … mais possédant bien ses deux oreilles…

… Voici donc, dans les circonstances actuelles – certaines frontières n’étant pas réouvertes et les séjours hors de l’Europe n’étant toujours pas autorisés -, une excellente idée de visite à Bruxelles, nous permettant de voyager,  virtuellement, en Asie et en Amérique latine, à la suite d’Hergé, 90 ans après lui, tout en n’oubliant pas de feuilleter le N° 5 de « Tintin c’est l’Aventure », qui nous apprendra tant de choses sur l’univers hergéen…

… Autre visite à programmer, celle bien sûr, du « Musée Hergé », à Louvain-la-Neuve, présentant de nombreuses  planches originales de l’ensemble de l’oeuvre d’Hergé, quelques-unes de ses fiches d’informations et de ses peintures, des publicités qu’il dessina, des photos, des diapos en 3D, des films, des maquettes, des objets divers, …, ainsi que, jusqu’à la fin de l’été, une exposition gratuite intitulée « En voiture avec Tintin », l’entrée du Musée  étant gratuite les premiers dimanches du mois. Sites web : https://www.ardenneweb.eu/reportages/2020/en-voiture-avec-tintin-entree-....

Et c’est l’occasion, ici, de citer le propos de Daniel Couvreur, responsable du Service de la Culture du quotidien « Le Soir », jounaliste spécilalisé en Bandes dessinées, alors qu’il s’apprêtait à être l’un des rédacteurs du N° 1 de ce  nouveau magazine : « Il s’est avéré assez rapidement qu’il était possible de déterminer une liste d’ingrédients de l’aventure chez Hergé parfaitement dans l’air du temps. Sans les citer tous, il y a dans la plupart des albums de  Tintin des éléments inspirés de l’actualité immédiate, des personnalités du monde réel confrontées à des personnages de fiction, des anticipations réalistes du progrès scientifique, des regards prospectifs sur les questions de géopolitique, de société, d’environnement, de vivre ensemble… A partir de là, le concept de ‘Tintin c’est l’Aventure’ était tout tracé. » 

Soulignons que si cet article s’est attaché à l’oeuvre d’Hergé, l’un des attraits de « Tintin c’est l’Aventure »,co-produit par « GEO », c’est la publication de superbes photos de voyages de « GEO », tantôt mises en rapport avec des cases extraites des différentes « Aventures de Tintin », certains chapitres étant consacrés à des reportages « made in GEO », tel dans ce présent N° 5, celui consacré, pages 136 à 146, à « La Vallée oubliée de l’Afghanistan », un sujet n’ayant aucun rapport avec Tintin, avec un texte d’Anne Chaon, journaliste de l’ « AFP »,  basée à Kaboul, et des clichés du photojournaiste australien Andrew Quilty, lauréat, en 2016, du « Gold Walkley Award », pour une photo qu’il réalisa en Afghanistan. Un récit de voyage de reporters en marge du monde…

Autre reportage « made in GEO », de la page 130 à 135, celui consacré aux « Nouveaux Guerriers du Web », nous dévoilant le combat de 1.200 Kichwas, à Sarayaku, au fin fond de l’Equateur, ces Kichwas, défendant leur territoire, étant devenus, grâce à Internet, des icônes mondiales de la préservation des forêts primaires, la révolte d’une  ethnie jivaro, les Shwars, étant, aussi, évoquée, de même que l’existence d’autres peuples en danger, au Brésil…

Voici donc deux raisons supplémentaires d’acquérir le N° 5 de « Tintin c’est l’Aventure »…

Caractéristiques du présent trimestriel : Ed. « Prisma Media-Moulinsart »  / Juin 2020 / 144 p. / 205 x 288 mm / couverture souple, avec rabats / 15€99 / Abonnement annuel (4 exemplaires) : 59€.

Yves Calbert.

 

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