Louvain 1968
Louvain la roots 1968 - Poème octosyllabique –
"C’étaient Jan, dit Bruegel de v’lours,
"Et Loui(s)ke, la Tour de Pise,
"Usant le col de leurs chemises
"À boire au moins huit heur’s par jour.
Introduction
L’auteur a fréquenté le café In den Engel, dit aussi Le zinc, grand-place à Louvain dans les sixties.
C’était le local des étudiants Luxembourgeois de l’Université catholique de Louvain.
Il y avait deux seuls clients louvanistes de Louvain "l’authentique".
De l’ouverture matinale jusqu’à vers 15 heures, ils occupaient chacun une table à eux seuls réservée, voisine de l’autre.
Mettaient près d’une heure à boire un verre, perdus dans leurs pensées - ou dans leurs rêves ? - les yeux le plus souvent clos.
Ils appartenaient à une catégorie de citoyens dont on disait, par euphémisme, qu’ils avaient porté l’uniforme. Et n’avaient d’autre droit que de boire ad vitam leur modeste pension.
Loui(s)ke avait ramené de Stalingrad les séquelles d’une paralysie faciale justement nommée a frigore. D’où son surnom de Tour de Pise.
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Louvain la roots 1968
C’étaient Jan, dit Bruegel de v’lours,
Et Loui(s)ke, la Tour de Pise,
Usant le col de leurs chemises
À boire au moins huit heur’s par jour.
Tous les quarts d’heure entre deux sommes
Ils relevaient d’un cran la tête
Pour juste un trait de bière tiède
Mousseuse ou non c’était tout comme.
Louis c’était des Peterman
Qui remplissaient son même verre
Pendant qu’il revoyait la guerre
Et ses revers jusqu’à Postdam.
La Tour de Pise, pif oolithique
Désemplissait tous ses Stella
Plus lentement que son carquois
Quand il tirait les bolcheviques.
Chacun pensant à la Vistule,
Si côte à côte ils éclusaient,
Au grand jamais ne se parlaient.
Et moi je branlais le bidule.
René Dislaire © Houffalize, le 9 novembre 2017
Photo : les membres de la régionale luxembourgeoise dans le café In de Engel, leur local.
À droite, les deux tables qu’on ne voit que partiellement sont celles de Jan et Louis(k)e.
À gauche, le bidule.
Vocabulaire pour les Nuls:
Roots : vrai, authentique (néologisme, donc anachronisme)
Loui(s)ke : Les Flamands ajoutent un « ke » à certains noms, pour le rendre « plus amitieux ». Donc on prononce « Louike ». C’est l’équivalent du suffixe « je » néerlandais, « petit ».
oolithique : de oolithe, minéralogie, petit grain ferrugineux, composé d'un corps central entouré de fines couches concentriques superposées et ressemblant à un œuf de poisson, de maximum 1 mm de diamètre (voir l’illustration).
Bidule : flipper (jeu de café)
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