Laboratoire de l’Art nouveau (LAB·AN), installé dans l’Hôtel van Eetvelde
Le LAB·AN x Hôtel van Eetvelde déploie deux belles expositions consacrées à l'Art Nouveau
Une expérience immersive autour de l’hôtel Aubecq, création majeure de Victor Horta. L’installation combine vidéo et mapping sur une pierre de la façade, plongeant le spectateur dans le tourbillon de cette œuvre détruite en 1950. « Aubecq : Fragments » est une expérience immersive sur l’une des créations majeures de Victor Horta: l’Hôtel Aubecq.
De cet Hôtel, nous ne possédons plus que des fragments : une partie de la façade, quelques plans et de rares photos en noir et blanc. Le film est une interprétation libre, sur base des archives disponibles, pour tenter de redonner vie à ce chef-d’œuvre, détruit en 1950. « Fragments » est un voyage dans le temps, qui révèle la splendeur de l’Hôtel Aubecq, tout en interrogeant sur sa démolition, et sur l’avenir de ses éléments de façade sauvegardés. Benoit Lemmens (conception), Gaspard Giersé (direction artistique), Julien Delcroix (musique originale)
L'exposition "Héritières"
Conçue dans le cadre de l’année Art nouveau, « Héritières » souhaite créer un dialogue entre passé et présent en connectant artistes Art nouveau et artistes contemporaines pratiquant les mêmes mediums (textile, peinture sur soie, sculpture, gravure…). L’objectif est de mieux faire connaître ces artistes et d’observer comment la pratique commune crée entre elles un lien véritable.
« Héritières » est un projet collectif créé par l’artiste photographe Barbara Salomé Felgenhauer, l’architecte et autrice Léone Drapeaud et la scénographe florale Elléa Cartier : « La notion d’héritage nous a paru d’emblée évidente. En tant que féministes, nous nous plaçons dans la lignée de ces femmes qui nous ont ouvert la voie et nous nous sentons un désir de mémoire et de visibilisation du passé, au présent, pour le futur. »
Alors que le style Art nouveau prône l’égalité entre tous les arts, à l’époque, la parité en matière de genre est loin d’être réelle. Si l’Histoire a retenu des noms d’artistes Art nouveau, il s’agit rarement de femmes, sinon associées à des hommes. Leur invisibilisation est parfois liée à la fragilité du médium choisi, mais le plus souvent à un effacement devant les dictats de la société.
Cette exposition rend femmage à huit artistes Art nouveau par le travail d’artistes contemporaines. Ce qui les relie : le médium qu’elles utilisent chacune dans leur art dans leur art. La sélection de ces artistes contemporaines a été effectuée par un casting sur les réseaux sociaux, la condition étant de s’identifier comme artiste femme belge et/ou vivant à Bruxelles. Le choix de ces héritières a été effectué sur base de la proximité d’un médium, d’une technique, d’un sujet ou encore d’une certaine parenté visuelle avec le travail d’une des artistes Art nouveau. Ce processus permet de mieux les faire connaître et d’observer comment la pratique commune crée entre elles un lien véritable.
Construits en s’imprégnant de l’univers de chacune, les diptyques photographiques comportent un portrait posé « à mi-corps » rappelant les portraits peints dès le XVIIe siècle, et un détail des mains créatrices de l’artiste. Pour leur portrait, elles sont assises face à nous sur un fond de couleur uni portant leurs vêtements de travail et une imposante coiffe florale pensée et réalisée sur base de leurs univers respectifs.
La coiffe attire l’attention sur le visage, porteur de notre identité profonde, vecteur de liens et d’émotions. Les végétaux sont un des sujets importants du style Art nouveau, ils permettent également la réappropriation consciente d’un discours essentialisant et dévalorisant d’une certaine nature féminine. Quant à la photographie illustrant le médium de l’artiste, elle met l’accent sur le faire grâce à la capture du mouvement de leurs mains agissantes. Le geste est le langage d’une pratique immémoriale qui devient elle-même sujet d’exposition.
Lors de cette rencontre, une discussion s’est établie avec ces artistes sur leur rapport à l’art en général et leur pratique en particulier pour donner naissance à une phrase accompagnant les photographies. Cette citation fait le lien entre l’artiste contemporaine et l’artiste historique via le médium partagé. Ainsi, nous nourrissons une mémoire, nous tissons des liens qui sont source de résistance et qui peuvent être célébrés dans leur continuité, grâce à la relecture et la réécriture de l’Histoire, mais aussi par la présence des femmes dans l’espace public.L’exposition « Héritières » est un projet collectif développé dans le cadre de Art Nouveau Brussels 2023 avec le soutien de l’asbl Patrimoine & Culture (Halles Saint-Géry) et urban.brussels.
25.000 visiteur.euse.s au LAB·AN x Hôtel van Eetvelde !
Ouvert au public depuis le samedi 13 mai 2023, le Laboratoire de l’Art nouveau (LAB·AN), installé dans l’Hôtel van Eetvelde, a accueilli, le week-end dernier, son 25.000 ème visiteur.
5.000 en juillet, 10.000 début septembre… Depuis son ouverture, avec une moyenne de 650 visiteur.euse.s par week-end (samedi, dimanche et lundi), le LAB·AN x Hôtel van Eetvelde n’a pas cessé d’attiser la curiosité du public. Lors des derniers Heritages days, ce n’est pas moins de 1637 personnes qui ont fait le déplacement. Ils ont évidemment pu admirer la magnifique coupole fraîchement restaurée par l’Atelier Mestdagh, mais pas seulement.
La maison-musée regorge de merveilles à découvrir : de la salle d’exposition permanente et son introduction à l’Art nouveau à l’exposition participative et interactive Ups & Downs, en passant par le film sur l’Hôtel Aubecq et bien entendu les différents espaces réaménagés pour évoquer la vie à l’époque du propriétaire, Edmond van Eetvelde, le LAB.AN est une pépite à découvrir.
Les objectifs pour 2024
L’équipe qui porte le projet souhaite profiter de cet élan pour impulser de nouvelles idées. « L’accueil du public a été incroyable. Il y avait une véritable attente concernant l’Art nouveau et son importance dans le paysage bruxellois. Forcément, cela donne envie de développer notre activité de centre d’interprétation et de promouvoir notre rôle d’ambassadeur de ce mouvement artistique à une plus grande échelle, » explique Hortense de Ghellinck, la coordinatrice du projet.
Ce développement passera en 2024 par la présentation de plusieurs expositions temporaires, dont l’exposition photographique "A sore Calamity" de Max Pinckers et Victoria Gonzalez, l’exposition pluridisciplinaire "Héritières" par l’artiste Barbara Salomé Felgenhauer), la mise en place et la consolidation de partenariats locaux (Classes du patrimoine, associations de guides…) et internationaux (Réseau Art Nouveau Network). Dès l’année prochaine, le LAB·AN souhaite également prendre part à la programmation culturelle et événementielle bruxelloise en continuant à s’associer à des rendez-vous cultes comme les Nocturnes de Brussels Museums ou le festival ARTONOV mais aussi en organisant sa propre programmation impliquant conférences, ateliers, activités variées pour faire découvrir l’Art nouveau sous un nouveau jour et pour un public le plus large possible.
In the wind blow their stories
Le commissaire de l’année Art Nouveau Brussels 2023, Paul Dujardin, a sollicité divers artistes pour commander et assurer l’installation en Région de Bruxelles-Capitale d’œuvres contemporaines en lien avec les thématiques de l’Art nouveau ou en lien avec les bâtiments relevant de l’Art nouveau figurant dans la programmation 2023. Suite à cet appel à projets, plusieurs artistes ont soumis leur proposition pour réaliser les dites œuvres. Ces propositions ont été évaluées par un Comité de pilotage. Le Comité de pilotage a sélectionné la proposition de Laure Prouvost pour la réalisation d’une œuvre constituée d’un drapeau placé sur un mât situé dans le jardinet avant de l’extension de l’hôtel van Eetvelde, avenue Palmerston 2, 1000 Bruxelles.
L’œuvre créée dans le cadre de la stratégie Art nouveau de la Région de Bruxelles-Capitale et de la continuité du projet Art Nouveau Brussels 2023, reprend un processus déjà expérimenté, la création d’une phrase-symbole liée au contexte de création. Le contexte est ici celui de l’Art nouveau et plus précisément l’hôtel van Eetvelde ainsi que ses liens avec la colonie belge. La phrase retenue par l’artiste est : IN THE WIND BLOW THEIR STORIES, phrase qui apparait sur le drapeau, texte en noir sur fond blanc.
La réalisation et la réussite du projet LAB·AN ont été rendues possibles grâce au soutien du gouvernement régional bruxellois.
photos : copyright Luc Viatour
L’hôtel van Eetvelde
Le commanditaire de cette construction remarquable n’est autre que l’un des proches conseillers de Léopold II, Edmond van Eetvelde (1853–1925). Nommé en 1885 au poste d’administrateur général des Affaires étrangères de l’État indépendant du Congo (EIC), il devient un acteur-clé dans l’administration de l’EIC à partir de 1891 en cumulant la gestion des 3 départements : Affaires extérieures et intérieures et Finances de l’EIC. Il sera notamment chargé de négocier la délimitation des frontières de la colonie avec la France, la Grande-Bretagne et le Portugal. En 1897, il supervise l’exposition coloniale de Tervuren à la suite de laquelle il reçoit du souverain le titre de baron.
Personnage controversé comme beaucoup de ses contemporains, il a joué un rôle essentiel dans la mise en place du système administratif de l'État indépendant du Congo ainsi que dans la politique d'exploitation des ressources de la colonie.
Fidèle au roi Léopold II et à la Belgique, son absence de réactions et son apparente complaisance face aux exactions commises contre les populations congolaises ont fait et font toujours l'objet de vives critiques et de débats animés. Sans vouloir édulcorer les faits, avérés et déjà développés par des auteurs historiens reconnus comme Jean Stengers ou Jean-Luc Plasman, l'espace d'exposition qui lui est consacré au sein du LAB.AN permet de découvrir une autre facette de ce fonctionnaire d'État, dont le désir de réussite tant matérielle qu'honorifique, bien réel, ne doit cependant pas occulter l'homme qu’il a été.
Situé dans le quartier des Squares, à l’angle du square Marie-Louise et de l’avenue Palmerston, dans un environnement de demeures patriciennes bâties au XIX e siècle, l’hôtel van Eetvelde a été commandé en 1895 à Victor Horta. L’architecte de 34 ans signe ici l’une de ses réalisations les plus abouties.
L’ensemble a été érigé en trois phases : de 1895 à 1897 la partie centrale, de 1899 à 1900 l'aile ouest et de 1900 à 1901 l'aile est. Victor Horta a assuré chaque phase du projet, garantissant la cohérence du résultat.
Avec sa façade de 9 mètres de largeur présentant une structure métallique apparente et son imposante verrière centrale, le bâtiment principal, datant de 1895, (avenue Palmerston 4) est l’un des projets les plus audacieux et novateurs construits par Horta.
À l’intérieur de l’hôtel, Victor Horta a utilisé des matériaux provenant du Congo et certains motifs évoquent l’ancienne colonie. Dans l’entrée, deux portes vitrées s’ouvrent sur un escalier de mosaïque qui accueille les visiteurs et les emmène de l’ombre du hall à la lumière du bel étage.
Le jardin d’hiver, point central de l’édifice, a une triple fonction : conçu comme espace de réception, il fait aussi office de centre dynamique et d’espace de communication entre les différentes pièces de l’hôtel particulier. Coiffé d’une splendide verrière, joyau de ce bâtiment, il constitue également le chaînon essentiel pour permettre la diffusion de la lumière au sein du bel étage.
Le salon, grâce à ses grandes fenêtres, est baigné de lumière. Il est garni de lambris en plaques d’onyx vert avec des incrustations en bronze doré. Le plafond se divise en voussettes enduites, peintes d’un motif répétitif. Le parquet en chêne à dessin géométrique est bordé d’un liseré de bois plus foncé. Un châssis métallique enserrant un vitrage biseauté ouvre sur le jardin d’hiver.
Quant à la salle à manger, décorée d’arbustes aux gracieuses inflexions, elle a conservé sa tapisserie gaufrée aux tons ocre, vert et brun, qui met en scène plantes, éléphants et étoiles. La distribution de la lumière naturelle grâce à la coupole récemment restaurée donne à ce bâtiment un éclat vertigineux.
En 1899, l’architecte agrandit l’hôtel d’une travée vers l’angle de l’avenue, avec un bureau d’apparatouvrant sur le jardin d’hiver de l’habitation. L'ancien bureau d’Edmond van Eetvelde a conservé son mobilier d'origine en acajou africain, padouk et loupe d’érable. C'est l'un des ameublements conçus par Horta les mieux conservés aujourd'hui. Le manteau de cheminée masque un ingénieux système de chauffage. Marbre rose, bronze doré et bois s'y combinent. Le panneau surmontant le foyer était jadis orné d'une broderie japonaise, actuellement conservée au Musée Horta mais dont une reproduction permet de se figurer l’ensemble.
Au numéro 2 de l’avenue Palmerston, Victor Horta conçoit, lors de la même demande de permis, une maison destinée à la location. En 1901, il ajoute une seconde travée supplémentaire à l’hôtel, de l’autre côté de la bâtisse principale. Suite au décès de son épouse en 1919, Edmond van Eetvelde procède à la division du bien en deux propriétés distinctes et le bureau, autrefois lié à l’hôtel, est depuis séparé de la partie principale.
Dans les années 1920-21, l’hôtel van Eetvelde (avenue Palmerston 4) est vendu à la famille Pouppez de Kettenis qui l’occupera pendant près de 30 ans. En 1950, il est acquis par son actuel propriétaire, la Fédération de l’Industrie du Gaz (FIG), devenue Synergid, qui y a installé une partie de ses bureaux.
Après plusieurs mutations immobilières, l’immeuble abritant le somptueux bureau van Eetvelde, mis en vente par la Chambre de Commerce croate en 2020, a été acheté par la Région bruxelloise grâce à la mise à disposition des moyens financiers de Beliris (à hauteur de 2 millions d’euros pour l’achat et la restauration du bâtiment). Depuis juillet 2022, la Région (via sa régie foncière) est officiellement propriétaire du bâtiment situé avenue Palmerston 2.
Le LAB·AN : Un centre d’interprétation et de promotion de l’Art nouveau
Par sa situation géographique stratégique, l’hôtel van Eetvelde a été tout naturellement pressenti pour devenir le point d’information sur l’année Art nouveau.
Particularité des lieux, il est divisé en deux entités, la partie gauche (avenue Palmerston 2) -récemment acquise par la Région de Bruxelles-Capitale - accueille un centre d’interprétation de l’Art nouveau, le LAB·AN avec un large programme d’activités (conférences, workshops, etc.). Les visiteurs peuvent également y découvrir une exposition présentant les caractéristiques principales de ce courant, ainsi que ses rapports avec la colonie belge. L’objectif est en effet d’en faire un lieu de dialogues avec la création contemporaine, mais aussi un espace de recherches et de débats, en y questionnant entre autres les liens avec notre passé colonial.
Comme l’explique Hortense de Ghellinck, la coordinatrice du LAB·AN, « L’un des objectifs fondamentaux au cœur de ce projet de centre d’interprétation est la création d’un espace qui valorise et mette en relation les partenaires et bâtiments Art nouveau existants à Bruxelles, en Belgique et en Europe. Une sorte d’émulation positive permettant de faire rayonner Bruxelles, la Belgique et l’Art nouveau dans le paysage culturel national et international ».
Le LAB·AN est géré par l’asbl Patrimoine & Culture, également responsable/gestionnaire des Halles Saint-Géry. Le bâtiment consacré au LAB·AN abrite également les bureaux et des expositions du B.A.A.C, centre d’art dédié à la création contemporaine africaine ainsi que le bureau de coordination du Réseau Art Nouveau Network (RANN), qui y a installé son siège. Pour rappel, Bruxelles accueille le secrétariat international de ce réseau qui fédère les grandes villes ou musées de l’Art nouveau en Europe et dans le monde : Bruxelles, Barcelone, Nancy, Budapest, Riga, Palerme, Wiesbaden, etc. (www.artnouveau-net.eu)
Infos :
Ouvert les samedis, dimanches et lundis de 10h à 17h
Visite libre avec ou sans réservation
Visites guidées sur réservation via
team@lab-an.be
lab-an.be