"Zoo humain-Au Temps desExhibitions coloniales", à l' "Africa Museum", à Tervuren, jusqu'au 06 Mars

écrit par YvesCalbert
le 16/02/2022

A l’occasion des 125 ans de l’ « Exposition internationale de Bruxelles », organisée du 10 mai jusqu’au 8 novembre 1897, le « MRAC » (« Musée Royal d’Afrique Centrale »), désormais plus connu sous le nom d’ « Africa Museum », nous propose, à Tervuren, jusqu’au dimanche 06 mars, une exposition temporaire qui mérite le détour : « Zoo humain. Au Temps des Exhibitions coloniales », nous montrant ce que fut la « Section coloniale », créée à  Tervuren , selon la volonté du roi Léopold II (Léopold Louis-Philippe Marie Victor de Saxe-Cobourg-Gotha/1837-1909).

Dans l' "Exposition universelle d'Antwerpen, en 1894, pour la première fois en Belgique, 12 Congolais furent exhibés, alors qu'à Tervuren, en 1897, 267 Congolais furent présentés à un million de visiteurs, au sein de trois "villages congolais" reconstitués.

Au siècle dernier, en 1903, une typologie fut éditée, censée expliquer la hiérarchie « naturelle » entre les races humaines, confirmant la supériorité des blancs.

Lors de la visite de presse, à Tervuren, le lundi 08 novembre 2021, l’anthropologue Marteen Couttenier, l’un des trois curateurs de la présente exposition déclara : « Pour se définir soi-même, on regarde l’autre et on voit qu’il est différent. Et on pense qu’on est meilleur que lui … C’est une façon très primitive de penser mais ce n’est pas inné. Les enfants ne sont pas racistes. Cela vient avec l’éducation. Ce sont les adultes qui leur disent que l’autre est différent et donc inférieur. »

Evoquant les « Villages africains » – aussi appelés« Villages nègres » ou « Villages noirs » -, qui étaient  reconstitués au sein des différentes expositions de la fin du XIXè siècle et du début du XXè sicle, il précisa : « Dans ces expositions, les Congolais devaient danser … Ils étaient très peu habillés, revêtus de peaux de bête et devaient faire semblant de vivre dans des cavernes. On ne montrait jamais d’intellectuels ni d’artistes… mais même pas de personnes normales, en fait. »

En Europe, les exhibitions de personnes présentées comme étant des sauvages, venus du bout du monde, étaient devenues une activité lucrative, dans les foires, les cirques et, même, en 1931, à la « Fête de la Bière », à Munich, ainsi qu’à Paris, la même année.

Si la présente exposition porte le titre de « Zoo humain-Au Temps des Exhibitions coloniales », notons qu’à l’époque , sur certaines affiches, le mot « Zoo » apparaissait, comme « Le Pigmée au Zoo ». Une autre annonçait une  « attraction unique sensationnelle » (sic), présentant « Une Négresse de Bornéo » (sic). En 1897, à Tervuren, l’on trouvait, aussi, des panneaux mentionnant : « Ne pas donner à manger aux Congolais, ils sont nourris », ce qui n’empêcha pas que des quidams de jeter, honteusement, des bananes, des cacahuètes, … aux Africains, qui étaient livrés à leur voyeurisme …

Nous ajouterons avoir nous-mêmes constaté, à « Brussels Expo », lors d’un « Salon des Vacances », qu’un voyagiste avait invité, dans les années 1970, des Touareg, qui, dans leurs costumes traditionnels, étaient « exposés », pour assurer la publicité de méharées dans le Hoggar algérien … Et là aussi, quelques visiteurs n’hésitèrent pas à leur jeter des cacahuètes … Nous étions poutant dans les 30 dernières années du XXè siècle …

Pour en revenir à « Zoo humain-Au Temps des Exhibitions coloniales », signalons qu’il s’agit d’une exposition itinérante, qui fut présentée, en 2011, au « Musée du Quai Branly », à Paris, avant qu’elle ne soit organisée  à  Rouen, à Pointe-à-Pitre, et, en 2016, à la« Cité Miroir », à Liège, ce qui nous rappelle que, dans cette ville, sise en bord de Meuse, en 1905, un « village sénégalais » avait été reconstitué, présentant « 150 indigènes » dans le cadre de leur « Exposition universelle ».

Au sein du nouveau batiment de l’ « AfricaMuseum », nous retrouvrons, au sous-sol, la célèbre pirogue de 22m de longueur, le long de laquelle, une cinquantaine de cartes postales de la fin du XIXè et du début du XXè siècle nous sont présentées, au dessus desquelles les nombreuses villes du monde entier, qui accueillirent des « Zoos humains », sont mentionnées, avec les années d’organisations de ces événements. Edifiant !

Ainsi, nous constatons qu’à Paris, entre 1851 et 1937, 11 de ces expositions furent organisées, 10 autres l’ayant été en Belgique, de 1885 à 1958, à Antwerpen, Bruxelles, Charleroi, Liège et Gent, alors que 15 villes américaines, 13 pays européens, l’Afrique du Sud, l’Australie, la Corée, l’Inde, l’Indonésie, le Japon, Taïwan et le Vietnam  accueillirent, aussi, de tels Zoos humains …

Au sein d’un exemplaire de la revue « Salut et Fraternité », Maarten Couttenier, anthropologue à l’ « Africa Museum », l’un des commissaires de la présente exposition,écrivit, sous le titre « Quand La Belgique montrait les  ‘sauvages’ : « Malgré les mauvaises expériences de la fin du XIXè siècle, le ‘village nègre’  a été réintroduit à l’occasion de l’ ‘Expo 58’ (42 millions de visiteurs, à Bruxelles, du 17 avril au 19 octobre 1958/ndlr). Comme avant, les Congolais devaient y montrer leurs métiers ‘traditionnels‘, confirmant l’image et le stéréotype de l’africain ‘primitif’. »

Sur le site du « Musée de la Vie walonne », les anthropologues Gilles Boëtch et Pascal Blanchard écrivirent : « Les spectacles anthropozoologiques ont été le vecteur essentiel du passage du racisme scientifique au racisme colonial vulgarisé ». J.-M. S., collaborateur aux « Archives générales » de ce Musée, poursuivait : « Ces exhibitions et/ou divertissements de masse, ont contribué largement à diffuser un racisme dit populaire. Pour asseoir la renommée de ces manifestations, on n’hésitait pas à les promouvoir en utilisant des photographies ‘réutilisables’ au gré des expositions et accompagnées de légendes volontairement erronées. En effet, les indigènes exposés ne provenaient pas nécessairement de la région annoncée. On les photographiait et on les habillait différemment pour feindre l’illusion.« 

Dans « Unidivers », un média web breton, notre collègue française Maureen Wilson écrivait, en 2017, reprenant la pensée de l’époque, en 1929, concernant un « Zoo humain » organisé à Rennes : « Des visites scolaires sont organisées. Elles contribuent à ancrer chez les personnes, dès leur plus jeune âge, une nécessité et une légitimité de la  colonisation. En présentant à des enfants ces ‘Sauvages’, quasi animaux, dépourvus de civilisation et d’éducation, on renforçait l’idée que les étudier scientifiquement, les enfermer et les coloniser allait de pair. »

Le sculpteur belge Arsène Matton (1873-1953) fut envoyé au Congo, en 1911 pour réaliser des moulages en plâtre à partir de « Congolais vivants ». « Ils courent tous quand ils me voent arriver », écrivit-il, la même année, dans « Nieuws uit Kongo », beaucoup fuiant dès son arrivée, craignant l’étouffement pendant la pose du moulage, les parents refusant, également, de soumettre leurs enfants à ces procédés étranges. Ces bustes en plâtre furent exposés, de 1912 jusqu’aux années ’50, à Tervuren, dans le batiment historique, inauguré en 1910, alors appelé  « Musée du Congo belge ». Nous en retrouvons quelques-uns au centre de l’une des salles de l’exposition.

En octobre 1883, 14 autochtones d’Araucanie (Amérique du Sud) sont exposés dans le Parc Léopold, à Bruxelles,  où se trouvait auparavant le zoo. Plus tard, des Aborigènes australiens, Khoïsan, Saami, Onas et Samoans ont suivi et ont été exposés au « Musée du Nord ».

Ainsi, comme la présente exposition le démontre fort bien, par nombre d’affiches, de photos, d’extraits de films, les Africains de race noire ne furent pas les seules personnes ainsi exhibées, Phineas Taylor Barnum (1810-1891) étant le précurseur de ce mouvement d’exhibitions aux Etats-Unis, son « Barnum’s American Museum », à New York, organisant le « spectacle exotique » le plus populaire du pays.

A l’époque de « Buffalo Bill » (William Frederick Cody/1846-1917) et de son « Buffalo Bill’s Wild West Show », qui fit le tour de l’Europe, des amérindiens furent présentés à des spectateurs européens en manque d’exotisme, les  voyages inter-continentaux n’étant proposés qu’à des personnes pouvant, financièrement, se le permettre. De même avec des ethnies asiatiques ou des Aborigènes venus de la lointaine Australie.

Curieusement, comme des affiches et des photos nous le prouvent, des « Villages alsacien, breton, … » furent même organisés à Paris, Nancy, … Notons d’ailleurs qu’en 2022, jusqu’au lundi 23 mai, à Strasbourg, au « Musée alsacien », l’on peut découvrir ce que fut la reconstitution, à Nancy, en 1909, d’un « Village alsacien ».

« Il s’agissait d’exhiber l’autre comme primitif, de fabriquer du ‘sauvage’ pour renforcer la supériorité des Blancs …  Des mesures de la taille des crânes étaient censées appuyer la thèse des soi-disant ‘races inférieures’ », expliquent les organisateurs, qui estiment que cette « industrie de l’exhibition humaine », ayant utilisé près de 35.000 « figurants », a attiré environ un milliard et demi de visiteurs, de 1880 jusqu’en 1958.

A noter, dans la seconde salle, une affiche du « Musée anatomique du Château d’Eau de Paris » annonce que des  dissections d’êtres humains étaient organisées en public …

Evoquant ce que la colonisation imposa au Congo, Sir Arthur Conan Doyle (1859-1930) écrivit, dans « Le Crime du Congo belge ») : « Le plus grand crime de tous les temps ».

En 1960, dans son discours de l’indépendance du Congo, son 1er ministre, Patrice Emery Lumumba (1925-1961) déclara : « Nous qui avons souffert dans notre corps et dans notre coeur de l’oppresssion colonialiste, nous vous le disons tout haut tout cela est désormais fini. »

Ce moment était atendu, alors que rôle de la science était resté complexe, essentiellement basé sur la méthode scientifique dite de « la mesure ». Pour exemple, comme on peut le découvrir dans la première salle, après le décès de la ‘Vénus Hottentote’, en 1815, son corps fut disséqué, par l’anatomiste français Georges Cuvier (Jean Léopold Nicolas Frédéric Cuvier/1769-1832), afin de démontrer l’infériorité congénitale des « races à crâne déprimé et comprimé ». N’écrivit-il pas – lui, un scientifique -, dans « Extraits d’Observations » : « Ses mouvements avaient quelque chose de brusque et de capricieux, qui rapelait ceux du singe. »

Mais qui était cette « Vénus Hottentote » ? Il s’agissait d’une Sud-Africaine, Saartjie Baartman (1789-1815), qui s’était retrouvée exhibée en France, en Irlande et au Royaume-Uni, au début du XIXè siècle, nous étant présentée comme une « grande curiosité naturelle« , en raison de son postérieur proéminent. Son squelette, son cerveau  et  ses organes génitaux, ainsi qu’un moulage en plâtre de son corps, furent conservés et exposés au « Musée de l’Homme », à Paris.

En 1994, sous Nelson Mandela (1918-2013), le rapatriement de sa dépouille fut demandé, cette requête n’ayant été accordée que 8 ans plus tard, en 2002. Aujourd’hui, enterrée à Hankey, en Afrique du Sud, Saartjie Baartmat est devenue l’un des symboles du racisme du début du XIXè siècle.

Au niveau des physiques non conventionnels, l’un des panneaux de l’avant dernière salle cite « Elephant Man »  (David Lynch/USA/1980/124’/avec John Hurt & Anthony Hopkins/film lauréat, en 1981, de 3 « British Academy Film Awards » & du « Grand Prix du Festival du Film fantastique d’Avoriaz, ainsi qu’en 1982, du « César du meilleur Film étranger »).

« Propriété » d’un citoyen britannique, Joseph Merrick, qui inspira ce film, fut, lui aussi, à l’image de Saartjie Baartman, exhibé au public, dans des foires, au Royaume-Uni et à Ostende, dès 1884, alors qu’il était âgé de 21 ans.

Une phrase nous rappelle, en outre, qu’en 2002, à Yvoir, des pygmées bakas camerounais furent exhibés, au sein du « Parc Rainforest », chantant et dansant pour les visiteurs.

Cette salle rassemble, outre un court-métrage de l’époque, des souvenirs de l’ « Expo ’58 », à Bruxelles,  dernière  « Exposition universelle » à avoir accueilli un « village nègre », un enfant congolais, Juste Bonaventure Langa, y étant décédé à, l’âge de 8 mois.

Egalement, différentes affiches de films de l’époque nous sont proposées, dont « Les Seigneurs de la Forêt »  (Henry Brandt/Bel./1958/88′), dont la version en langue anglaise était dite par l’acteur-réalisateur américain Orson Welles (1915-1985), ou encore « Bongolo et la Princesse noire » (André Cauvin/Bel./1953/85′), qui fut projeté, en 1953, au « Festival de Cannes ».

Notons que l'un des commissaires de la présente exposition, Pascal Blanchard, réalisa, avec Bruno Victor-Pujebet, réalisa un long-métrage documentaire, pour "Arte" : "Sauvages, au Coeur des Zoos humains" (2018/90').

Dans la salle suivante, l’artiste contemporain, exilé d’opinion, Teddy Mazina (°Bujumbura/Burundi/1972), qui se définit comme étant un « activiste de la mémoire », a imaginé, artistiquement, la dissection de corps de personnes de race blanche par d’autres personnes de race noire ! Pourquoi pas ?

Cette « reconstitution » artistique, avec une dizaine de photos et un court-métrage noir-et-blanc, muet, tourné comme dans les années 1900, s’inspire de l’arrestation, à Anderlecht, dans la nuit du 20 février 1972, de 4 étudiants Africains (deux Congolais, un Rwandais et un Sénégalais) qui furent privés de leurs bourses d’études, avant de recevoir un ordre de quitter le territoire.

Un « laboratoire scientifique », non déclaré, de mesures anthropométriques – nommé « Muzungu Tribes » – venait d’être découvert, ce fait divers ayant été gommé de l’histoire officielle – caché à la presse, comme étant  « confidentiel », des centaines de photographies et tout le matériel de mesures ayant été saisis.

Grâce à l’artiste contemporain Teddy Mazina (°Bujumbura/Burundi/1972)- ayant reçu, en 2017, à Genève, le « Prix des Droits de l’Homme Martine Anstett », lors du « Festival du Film et Forum international sur les Droits humains », et, au Burundi, le « Prix Martine Anstett« , pour son engagement en faveur des droits humains -, nos regards sont, ainsi, inversés, afin de questionner l’imagerie coloniale et les stéréotypes racistes qu’elle a produit.

Quant à son collègue béninois Roméo Mivekannin (°Bouaké/Côte d’Ivoire/1986), il nous présente « Hommage aux 7 », une peinture – présentée, en 2020, à la « Biennale de Dakar » – inspirée par une photographie, prise en 1930, de soldats congolais rendant hommage, devant leurs tombes, à Tervuren, aux sept Congolais décédés durant l’« Exposition universelle » de 1897.

Dans « Anthropologie structurale 2 » (Ed. « Plon »/1962 & 1973), l’anthropologue et ethnologue français Claude Lévi-Strauss (1908-2009) écrivait : « Jamais mieux qu’au terme des quatre derniers siècles de son histoire, l’homme occidental ne put-il comprendre qu’en s’arrogeant le droit de séparer radicalement l’humanité de l’animalité, en accordant à l’une tout ce qu’il accordait à l’autre, il ouvrait un cycle maudit … »

Dans le quotidien français « Le National », le 10 juillet 1897, l’on pouvait lire : « Ils sont là, bénéficiant d’un décor merveilleux, donnant l’impression, dans leur vie en plein air – réglée comme pour un spectacle forain – d’un Congo de fantaisie, avec des simili-villages, créés pour faire pendant au Palais de la réclame noire, en face ... Il y a même quelques chose de passablement dégradant pour l’humanité, à voir ces malheureux ainsi parqués, livré aux réflexions parfois navrantes, et dégradantes aussi, des blancs qui accourent au nouveau spectacle. »

« Il faut remarquer une chose : tous ces essais de classification ne reposent que sur des principes personnels et arbitraires » écrivit, en 1885, l’ intellectuel haïtien Anténor Firmin (1850-1911), dans « De l’Egalité des Races humaines : Anthropologie positive ».

De son côté, l’ intellectuel sierra–léonais Africanus Horton (1835–1883) écrivit, en 1868 : « Quand arrivera le temps bienheureux où les anthropologues et philosophes modernes … cesseront de fabriquer des études, dont le seul but est de calomnier des races opprimées ? »

« Ne demandez jamais quelle est l’origine d’un homme ; interrogez plutôt sa vie, son courage, ses qualités et vous saurez qui il est », écrivit, en 1860, Abd el-Kader (1808-1883), héros de la révolution algérienne.

La visée pédagogique de la présente exposition étant évidente – devant contribuer à déconstruire les mécanismes à l’œuvre dans le racisme, fort malheureusement toujours d’actualité au XXIè siècle -, n’hésitons pas à la visiter, en famille, afin que tous, nous puissions sortir de l’anonymat les populations exhibées, nous questionnant sur nos propres représentations du monde d’aujourd’hui, où, notamment, des sportifs non blancs se font insulter …

… Notons que, depuis 2020, l’ « AfricaMuseum » est impliqué dans le projet « HOME » (« Human Remains Origin{s} Multidisciplinary Evaluation »), pour dresser un Notons que, depuis 2020, l’ « AfricaMuseum » est impliqué dans le projet « HOME » (« Human Remains Origin{s} Multidisciplinary Evaluation »), pour dresser un Notons que, depuis 2020, l’ « AfricaMuseum » est impliqué dans le projet « HOME » (« Human Remains Origin{s}  Multidisciplinary Evaluation »), pour dresser un inventaire dans les collections belges et étudier les provenances des « restes humains »; La possibilité d’une restitution de ces corps est actuellement discutée en collabration avec des membres de la diaspora , en Belgique et avec des partenaires impliqués, au Congo.

Faisons nôtre le propos de Nelson Mandela (1918-2013), « Prix Nobel de la Paix », en 1993 : « Personne n’est né avec la haine pour l’autre du fait de la couleur de sa peau, ou de son origine, ou de sa religion. Les gens doivent avoir appris à haïr, et s’ils peuvent apprendre à haïr, ils peuvent apprendre à aimer, car l’amour jaillit plus naturellement du coeur humain que son opposé. »

« Toute ma vie je me suis consacré à la lutte pour le peuple africain. J’ai combattu contre la domination blanche et j’ai combattu contre la domination noire. J’ai chéri l’idéal d’une société libre et démocratique dans laquelle toutes les personnes vivraient ensemble en harmonie et avec les mêmes opportunités. C’est un idéal pour lequel j’espère vivre et agir. Mais, si besoin est, c’est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir. »

Le catalogue (Pascal Blanchard, Maarten Couttenier & Mathieu Zana/Ed. « AfricaMuseum »/livret broché/68 p./2021 /7€50), agréable à parcourir, complête merveilleusement cette fort intéressante exposition.

Soulignons la projection du film « Boma Tervuren, le Voyage » (Francis Dujardin/Bel./1999/54’/film lauréat du « Prix du meilleur Documentaire », au « Festival Média Nord-Sud », & du « Grand-Prix », au « Festival du Film indépendant », à Bruxelles), le samedi 19 février, à 15h. Gratuité pour la vision du film. Prix combiné avec l’accès à l’exposition : 4€.

Critique de ce documentaire, par Francis Simon, pour « Cinergie » :

«  ‘Boma – Tervuren, le Voyage’ fait un sort à (la) pratique de l’amnésie en faisant le lien entre les ‘premiers jours’ de la colonie et l’époque actuelle. Son propos est simple. Il nous raconte l’épopée étonnante et tragique de 267 Congolais amenés à l’ ‘Exposition universelle’, à Bruxelles, en 1897, où ils furent exhibés dans des cases et forcés de jouer leur vie quotidienne de ‘sauvages primitifs’ devant plus d’un million de visiteurs. Confrontés à des conditions de voyage difficiles, ne supportant ni le froid d’un climat tempéré, ni la rudesse d’un exil qui en faisait les protagonistes d’un véritable zoo humain. »

« Le récit du séjour des Congolais de 1897 est avant tout le prétexte à tirer ces fils de mémoire qui tissent la toile de fond de notre présent commun. Donnant la parole à quelques Congolais, un écrivain, un historien, un homme qui se souvient, Francis Dujardin nous renvoie à cette image de l’Afrique et des Africains que l’histoire officielle propose et bien souvent impose. Il nous en montre les zones d’ombres, les non-dits, les contre-vérités, et focalise l’enjeu de son film sur la question essentielle de notre rapport à l’autre, que l’on soit Belge ou Congolais, d’ici ou d’ailleurs. »

« Filmé avec sobriété, recréant ces premiers temps de la colonie à partir de documents d’époque, ce film trouve un langage simple et efficace, pour les ramener au présent … Francis Dujardin nous laisse clairement entendre qu’il est une Afrique moderne, vivante, en prise directe avec notre monde. »

Critique par « Africiné » : « Ce film, oscillant entre paternalisme et mépris, nous renvoie à nos interrogations sur l’image de l’Afrique et des Africains et nous demande implicitement de mesurer en quoi cette perception a changé aujourd’hui pour chacun d’entre nous … Sa pertinence et son actualité s’inscrivent dans le questionnement de nos consciences tant sur le plan anthropologique que psychanalytique. »

Ouverture de l’exposition : jusqu’au dimanche 06 mars, du mardi au vendredi, les jours fériés et de congés scolaires : de 10h à 17h, le samedi et le dimanche : de 10h à 18h. Prix d’accès à l’exposition : 10€ (8€, à partir de 65 ans & pour les membres d’un groupe de minimun 15 personnes / 4€, pour les étudiants de 18 à 26 ans, pour les enseignants, pour les bénéficiaires sociaux, pour les personnes porteuses d’un handicap & pour un accompagnateur d’une personne porteuse d’un handicap / 0€, pour les moins de 18 ans). Prix combiné avec la collection permanente : 16€ (14€, à partir de 65 ans / 8€, en prix réduit / 0€, pour les moins de 18 ans. Site web :  www.africamuseum.be.

Yves Calbert,

avec des extraits du livret-catalogue.

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