Maëlle Dufour & Jean-Michel François, au "Delta", à Namur, jusqu'au 08 Janvier 2023
Jusqu'au samedi 08 janvier 2023, le "Delta", à Namur, accueille une jeune plasticienne belge, Maëlle Dufour (°1994) et un peintre bien connu en ce lieu, Jean-Michel François (°St.-Trond/1955), puisqu'il fut l'un des chefs du service des Arts plastiques de l'ancienne "Maison de la Culture de la Province de Namur", inaugurée le 24 mai 1964, transformée, ré-inaugurée le 21 septembre 2019, sous le nom de "Delta", l'ancien édifice étant l'oeuvre de l'architecte carolorégien Victor Bourgeois (1897-1962).
Soulignons que ces deux artistes nous proposent des créations récentes, Maëlle Dufour vivant et travaillant à Gand et à Bruxelles, où elle étudia la sculpture à l' "UNSAV" ("École Nationale Supérieure des Arts Visuels") de "La Cambre", à Bruxelles. Ayant étudié, également, à la "Finnish Academy of Fine Arts", à Helsinki, elle poursuit, en 2022-2023, un post-master, à l' "HISK" ("Hoge Instituut Voor Schone Kunsten")-Vlaanderen, à Gand.
Elle est la lauréate, en 2018, du « Prix de la Commission des Arts de Wallonie », à Namur, & du « Prix du Hainaut », à Mons ; en 2019, du « Prix Sofam", à Bruxelles ; en 2020, du « Prix du Public de la Jeune Sculpture de la Fédération Wallonie Bruxelles », à Seraing ; ainsi qu'en 2021, du « Prix Macors », du Prix de la COmission COmmunautaire Française" ("COCOF") & du « Prix d’Encouragement de Sculpture ».
De son côté, Jean-Michel François est le lauréat, en 1988, du "Prix Médiatine", à Bruxelles ; en 1992, du "Prix René Janssens" & en 1997, du "Prix Jos Albert", ces deux derniers Prix étant décernés par l' "Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique", à Bruxelles.
Le concernant, nous pouvons faire nôtre le propos de l'artiste américano-bulgare "Christo" ("Christo Vladimiroff Javacheff/1935-2020) : "C'est l'ensemble du voyage de plusieurs décennies sur un même projet qui constitue l'oeuvre d'art".
À l’abri des tendances actuelles, Jean-Michel François - qui exposa, à Jambes, à la "Galerie Détour", il y a trois ans - réalise des œuvres picturales hors du temps, restant fidèle, depuis plusieurs années, à son propre stylle, sa technique mixte combine l’utilisation d’acrylique et crayons de couleur, aux teintes souvent grises, bleues et noires.
Les matériaux recouvrent l’entièreté du support, créant le sentiment d’une matière pierreuse et charbonneuse, donnant naissance à un monde mystérieux et silencieux.
À première vue, les œuvres "sans titre" de Jean-Michel François peuvent sembler déroutantes, tant elles semblent répétitives. Sous des tonalités toujours nocturnes, sobres et sombres, elles ne révèlent leurs secrets qu'à l'observateur attentif, qui parvient à déceler les formes dessinées. Car sous les tonalités toujours sombres, sobres et nocturnes, émergent des formes géométriques intrigantes, des objets ou des architectures étranges ressemblant à des pyramides, des stèles, des bornes ou des dalles, qui donnent aux visiteuses et visiteurs un sentiment d'anxiété, de mystère et de solitude ...
"Pourqoi certains visiteurs attendent-ils qu'on leur explique des toiles ? La peinture doit parler toute seule", nous confia-t-il, ajouutant : "J'aime travailler par séries et si j'apprécie l'architecture militaire, je ne suis nullement intéressé par les portraits figuratifs".
Sur un mur jouxtant ses toiles, nous trouvons un texte - "Au Coeur des Ténèbres - de Joseph Conrad, qui l'inspira dans ses créations : "Pour comprendre ce que j'ai ressenti, il faut que vous sachiez comment je suiss allé là-bas, ce que j'ai vu, comment j'ai remonté ce fleuve, jusqu'à l'endroit où j'ai d'abord rencontré le pauvre type. C'était au terme ultime de notre navigation, le point culminant de mon expérience. On aurait dit que cela jetait une sorte de lumière sur tout ce qui mentourait - Et sur mes pensées. La chose était, il faut le dire, assez sombre - Et lamentable - sans rien d'extraordinaire - pas trop distincte non plus. Non, pas trop distincte. Et pourtant cela jetait, comme une sorte de lumière."
Le travail de Jean-Michel François est cité dans divers ouvrages de référence, tels « Art belge XXè siècle », par Serge Goyens de Heusch, « Dictionnaire des Arts plastiques modernes et contemporain », par Jean-Pierre Delarge, ou encore « Dessins d’Artiste belges contemporains », par Ignace Vandevivere.
Revenons à Maëlle Dufour, qui nous présente son installation de sculptures, qui crée des systèmes complexes, qui questionnent le progrès, au cœur des époques passées, connues et futures. Elle y explore les traces de décadence et des prémices d’espoir, interrogeant le progrès à double tranchant et portant des éveilleurs de conscience, qui, à travers des gestes de sauvegarde, réfléchissent au sens de l’évolution humaine.
Quoiqu'ayant vécu son enfance à Binche, elle demeure marquée par la première guerre mondiale et les obus trouvés dans la région de Knokke
"Que laisse-t-on aux générations futures ? Où stocker les échets nucléaires ?", s'interroge Maëlle Dufour, qui nous montre des oeuvres - recouvertes, partiellement, de poudre grise ou de différents liquides - qui évolueront d'ici le 08 janvier 2023.
Elle interroge l’origine, la mémoire et la renaissance des choses (ou leur absence). Les ruines ont-elles été détruites par la nature elle-même ou par les hommes, qui se sont battus pour des territoires ? Sont-elles les fondations d’un renouveau
Au "Delta", son installation retient toute notre attention, reposant sur les traces (déchets) que l'Homme enfouit au plus profond des entrailles de la terre et, peut-être, de lui même. Et si ses "fûts", qui nous rapprochent des barils de pétroles de "Chrito", sont des symboles de la transmission de matières toxiques, de la beauté ressort de son travail, comme un magma d'espoir ...
A l'occasion de la visite de presse, le vendredi 21 octobre, Maëlle Dufour nous confia : "La confrontation physique entre mon travail et le spectateur est déstabilisante, la taille et le poids des pièces dépassant toute échelle humaine nous rappellent constamment la vulnérabilité de notre propre existence."
La concernant, le conservateur de la collection de la "Banque nationale de Belgique", Yves Randaxhe écrit : "En s’incarnant, son imaginaire fait aussi largement usage des ressources de la rêverie matérielle que théorisait Bachelard, et d’une palette métaphorique d’une richesse peu commune. Ainsi se nourrit le charme paradoxal de son œuvre, sans perdre jamais son fil, amèrement abouché au plus rugueux de l’histoire présente."
Ouveture : jusqu'au dmanche 08 janver 2023, du mardi au vendredi, de 11h à 18h, le samedi et le dimanche, de 10h à 18h. Entrée gratuite. Contacts : info@ledelta.be & 081/77.67.73. Site web : www.ledelta.be.
Avec l’aide du "Secteur des Arts Plastiques" de la Province de Namur, à l’occasion de sa présente exposition, Jean-Michel François illustre un ouvrage poétique de Françoise Lison-Leroy : « Jean-Michel François, les Ailes brûlées » (Ed. "Espace B"/broché/16,5 x 21 cm/44 pages/20 illustrations/prix : ).
Outre la présence de son espace muséal, nous présentant, entre autres, des oeuvres de l'artiste namuroise Evelyne Axell (1935-1972), trois autres expositions nous attendent au "Delta" : "Deux Maisons, un chez-soi ? Expériences et Paroles d'Enfants", accessible jusqu'au samedi 17 décembre, ainsi que "Fais pas ton Genre ! Stéréotypée, la Pop Culture ?" et "Sans Vue, cent Perception", ouverte jusqu'au dimanche 08 janvier 2023. L'entrée est gratuite, tant pour ces trois expositions que pour l'espace muséal.
Notons enfin, le mardi 29 novembre, une projection de l'association "Jeunesse et Arts plastiques" : « Le Douanier Rousseau, ou l'Eclosion du Moderne » (Nicolas Autheman/Fra./2015/52’). Prix d'entrée : 5€ (4€, avec le pass "Delta").
Synopsis : "Le portrait inspiré d'un artiste inclassable, autodidacte visionnaire, incompris et sûr de son génie. Un solitaire épaulé par Apollinaire et Picasso. Henri Rousseau (1844-1910), dit "Le Douanier Rousseau", est un cas unique dans l'histoire de la peinture ..."
Murielle Lecocq et Yves Calbert.