Le 29 mai 1985 : Finale de la Coupe d'Europe des clubs champions opposant Juventus de Turin et Liverpool.

écrit par francois.detry
le 01/06/2020
Dans la presse

Le déroulement des événements

Au Stade du Heysel à Bruxelles, des grilles de séparation et un muret s'effondrent sous la pression et le poids de supporters italiens, acculés par les hooligans anglais. Le bilan est tragique: 39 morts et plus de 450 blessés.

En cette chaude soirée de mai, tout était réuni pour que le football vive une grande journée de fête à Bruxelles. La finale de la Coupe d'Europe des clubs champions oppose deux des plus grands clubs du continent. D'un côté, Liverpool, l’épouvantail anglais, tenant du titre et quatre fois lauréat de la plus grande coupe européenne sur les 8 dernières années. De l'autre, la Juventus, tenante de la Coupe des vainqueurs de Coupe, avec en son sein la majorité des champions du Monde 1982, ainsi que son Maître à jouer, le double tenant du Ballon d'Or, Michel Platini.

Pourtant, le football européen va connaître l’une de ses soirées les plus noires. Tout commence une heure avant le début de la rencontre, lorsque les esprits s'échauffent entre supporters des deux camps.

Pour bien comprendre ce qui se passe, il faut retourner un an en arrière, lors de la finale 1984, qui voit Liverpool s'imposer contre la Roma. Le match se déroule à Rome et Liverpool s'impose aux tirs au but. Après le match, les supporters anglais sont poursuivis à travers toute la ville par les tifosi romains. Ils sont laissés à leur sort par les conducteurs de bus italiens, par crainte de représailles. Certains fans britanniques sont battus et blessés. Une partie d'entre eux doit se réfugier dans l'ambassade britannique.
Le sentiment de revanche est donc bel et bien présent un an plus tard à Bruxelles, même si officiellement les hooligans anglais ont annoncé vouloir mettre de côté leur rivalité pour la finale de 1985, qui se joue à nouveau contre un club italien.

Le Stade du Heysel n'est pas adapté à recevoir autant de personnes. L'installation est vétuste, beaucoup de spectateurs n'ont pas de places assisses. Des failles dans le système de contrôle, ainsi qu’une dalle descellée, permettent à de nombreuses personnes sans ticket de rentrer dans l'enceinte, la transformant en bouilloire à pression. Les contrôles physiques sont quasi-inexistants (selon certaines sources, un supporter sera vu avec une arme à feu lors des affrontements).

Sur le coup de 19h10, les premiers échanges - verbaux dans un premier temps, matériels (jets d'objets et fusées) ensuite - interviennent. Les supporters anglais sont installés dans les blocs X et Y et côtoient le bloc Z, logiquement réservé aux Belges mais dans lequel se trouvent des fans de la Juventus, séparés des Britanniques par une zone déserte de quelques mètres.

A 19h20, près de 200 hooligans anglais forcent la zone neutre où se trouve une poignée de policiers. Les forces de l'ordre, dont la majeure partie est dispatchée en ville pour prévenir les éventuels affrontements pré et post-match, sont dépassées. Les hooligans pressent en plusieurs vagues les Italiens du Bloc Z, qui reculent vers le fond de la tribune. Les grilles d'évacuation du bas sont fermées. Les forces de police repoussent même les supporters qui tentent de se sauver par la pelouse. Ne pouvant s'échapper, les Italiens sont pris au piège. La bousculade est inévitable, des dizaines de personnes sont piétinées, étouffées contre les grillages, qui finissent par céder. Un muret s'effondre sous la pression humaine.

Le bilan est tragique : 39 personnes trouvent la mort dont 34 Italiens, 2 Belges, 2 Français et 1 Irlandais. Plus de 400 personnes sont blessées.

Une partie du reste des supporters italiens, installée de l'autre côté du terrain, voyant ce qui se passe, tente alors de traverser le terrain pour en découdre. L'affrontement direct entre les deux parties est évité de justesse par la police, enfin arrivée en nombre sur le terrain.

L'onde de choc est immense, d'autant plus que ces événements sont vécus en direct à la télévision.

Malgré cela, le match a lieu, pour éviter d'autres débordements de frustration. La rencontre débute vers 21h30, après un appel au calme lancé par les deux capitaines. La Juventus Turin s'impose 1-0 grâce à un penalty litigieux, transformé par Michel Platini.

La Belgique du football a connu la soirée la plus noire de son existence.

Le "Procès du Heysel"

A l'issue du procès, débuté en octobre 1988, 14 supporteurs de Liverpool sont condamnés à trois ans de prison. Certaines peines seront revues à la baisse en appel, un an plus tard.
Albert Roosens, Président de l'Union Belge, est condamné à 6 mois de prison avec sursis. Le capitaine de gendarmerie Mahieu se voit infliger 9 mois de prison, également avec sursis.
En appel, le capitaine Mahieu verra sa peine réduite à 6 mois. Le secrétaire général de l'UEFA, Hans Bangerter, est condamné à 3 mois de prison avec sursis et l'UEFA est déclarée civilement responsable.
Liverpool est interdit de compétition européenne durant 10 ans (peine au final réduite à 6 ans). Les clubs anglais interdits de confrontations européennes durant 3 ans (finalement augmenté à 5 ans suite aux débordements des hooligans britanniques durant l'Euro 1988 ).  ( RTBF )

 

35 ans plus tard, des spectateurs racontent  et autres commentaires d’après rencontre :

- «  J'ai déjà raconté cette histoire ici mais, tous les 5 ans, les mêmes images refont la Une et les souvenirs reviennent...
Il y a 35 ans jour pour jour, je suis retourné à l'école après avoir assisté à ce match, au cœur de la "tribune Z" du Heysel. Je me souviens des attroupements dans la cour de récréation autour de mes potes de l'époque, du club de foot de Malmedy. Nous étions une quarantaine de jeunes ce jour-là à raconter ce que nous avions vu, ou plutôt vécu la veille...
Personnellement, j'ai gardé des images très précises de ces événements mais elles ne sont pas aussi terribles que celles vues en direct par les téléspectateurs (attention donc au reportage ci-dessous). En réalité, je n'ai pas eu conscience sur le moment de ce qui se "jouait" en contrebas de la tribune. Grâce au sang froid de mon entraîneur ( M. Harold Krings ), je suis resté agrippé avec quelques autres à une rambarde, juste sous l'horloge du stade. Nous avons subi les vagues d'assaut ( dans les 2 sens ) et reçu pas mal de coups ou de projectiles.
Mais ce n'était rien à côté de l'enfer que vivaient ceux qui ont fui vers le mur qui a fini par s'effondrer. Ni celui de mon père qui, responsable de notre groupe, a passé sa soirée à "soulever des draps blancs" afin de vérifier qu'aucun jeune n'y était resté. Sans oublier les parents, dont ma mère, qui assistaient impuissants à ce "spectacle" devant leur poste de télévision.
Il faisait chaud, les téléphones portables n'existaient pas et le ticket avait coûté 300 francs belges (7,5€). C'aurait dû être une belle fête. Je n'ai plus jamais regardé le foot de la même manière depuis ce jour-là..." ( un jeune Malmédien, Stéphane Wintgens, présent dans le stade )

- «  Je me trouvais dans le bloc Z, contre le grillage à poules que les anglais ont démoli. Les italiens bénéficiaient des blocs M,N,O côté Atomium et les fans de Liverpool seulement X et Y. Le bloc Z avait été vendu aux italiens de Belgique avec un marché parrallèle. Les provocations des DEUX CAMPS, la canicule et la boisson "aidant", sans compter la panique des 15 pauvres jeunes policiers dans les gradins, le drame était inévitable. »   ( Luc Depoorter, présent dans le stade )

- « Nous sommes sur un stade de foot, pas sur un terrain de guerre, alors pourquoi les Anglais ont-ils chargés sur les Italiens comme si nous étions lors de la seconde guerre mondiale. Non, sérieux, ces derniers n'ont eu aucun scrupule à frapper femmes et enfants, et des hommes qui n'avaient rien demandés à part venir"

- « Une tribune avec des familles de tout âge et juste à côté une tribune de hooligans. Les tiffosis organisés étaient de l'autre côté du terrain. Les images sont horribles je m'en rappelle à la télé, et le match a eu lieu. » ( tunisiendemarseille )

- « C'est l'année où la Belgique - et aussi le reste de l'Europe - a appris à connaître les hooligans anglais... parce que ce qui était un événement dramatique pour les uns, c'est ce que vivaient chaque week-end les Anglais dans leurs stades avec tous ces excités qui ne venaient que pour une chose : massacrer du supporter adverse après s'être bien chargés à la bière. Il aura fallu ce drame du Heysel pour que les autorités prennent enfin des mesures : interdiction de vendre de l'alcool à proximité des stades, renforcement des barrières de protection, supporters cloisonnés, etc. et surtout la mise en place d'un fichier des individus violents afin de les exclure des stades. »  ( Yann M.)

- « Je n'y étais pas, mais j'en avais entendu parler aux infos. J'avais 19 ans, j'étais devenue maman. Ce drame m'a marquée comme tant d'autres. Ce drame marquera pour longtemps d'une pierre noire cette finale Juventus de Turin-Liverpool. À cause de la connerie des hooligans. Aujourd'hui, le Stade du Heysel s'appelle "Stade du Roi-Baudouin". Mais l'ombre de cette tragédie plane au-dessus de ce stade, et elle planera encore longtemps ». ( Claudine Pierre )

- «  Je m'en souviens comme si c'était hier, j'avais 11 ans à l'époque et ces images m'avaient retournés pendant plusieurs jours, j'en étais malade. Depuis j'ai une vision plutôt négative de ces supporters hystériques qui confondent sport et barbarie, leurs capacités cérébrales ne leur permettent peut-être pas de faire la différence » ( tof 2017 ) 

Voir le reportage - vidéo de la RTBF

François DETRY

 

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