"Gaël Turine. Mémoires de Rivières" et 4 autres Expositions, au "Musée de la Photographie", jusqu'au 24 Septembre

écrit par YvesCalbert
le 26/08/2023

Inauguré en 1987, sis dans l’ancien carmel de Mont-sur-Marchienne, le « Musée de la Photographie » – qui, avec ses 6.000 m2, est le plus vaste musée européen de la photographie, possédant une collection de 100.000 photographies et plus d’1,5 million de négatifs – nous attend jusqu’au dimanche 24 septembre, pour découvrir  ses 5 expositions temporaires :

*** « Gaël Turine. Mémoires de Rivières » :

Dans la salle principale, retour, en noir et blanc, sur les inondations qui ont frappé le sud de la Belgique, durant l’été 2021, ayant provoqué des dégâts humains et matériels sans précédent.

Dès le mois d’août 2021, quelques semaines après les décrues, Gaël Turine a entamé́ un travail photographique « mémoriel », en photographiant les conséquences de ces inondations, dans les vallées de la Vesdre, de la Lesse, de la Lhomme, de la Wamme, de la Hoëgne et de l’Ourthe.

Au cours des 18 mois qui suivirent, il a remonté à plusieurs reprises le cours de chacune de ces rivières, pour  photographier les séquelles des inondations, dues, selon les scientifiques, à l’intensité des pluies diluviennes, en  juillet 2021, résultant du changement climatique.

Ce changement climatique c’est ici et maintenant. C’est pourquoi Gaël Turine a remonté à plusieurs reprises le cours de chacune de ces rivières pour photographier les séquelles des inondations, considérant que notre responsabilité collective est engagée.

Sans chercher à être exhaustif, une méthodologie de travail rigoureuse et une approche photographique  documentaire ont permis de cartographier les destructions occasionnées et les processus de reconstruction en cours.

A l’occasion de la visite de presse du vendredi 02 juin, Gaël Turine nous confia : « Si c’était simplement les remonter une seule fois, ça n’avait pas vraiment d’intérêt à mon sens. Juste faire un constat de l’ampleur de la catastrophe, je crois que tout le monde l’avait compris avec le travail des médias. Je trouvais ça intéressant de  s’inscrire dans le temps et de faire du temps mon allié, pour vraiment réussir à documenter les choses sur une période de deux ans. »

« Par exemple, je remarque qu’aujourd’hui, un potager a été créé près de l’emplacement des anciens terrains de tennis inondés, à Jemelle. C’est exactement ça que je suis venu photographier : la résilience, la transformation des lieux. »

Notons que Gaël Turine (°Nieuwpoort/1972) a étudié la photographie documentaire à l’ « ESA 75 » (« École Supérieure des Arts plastiques Le 75 », à Woluwe-Saint-Lambert.

Ayant remporté plusieurs Prix, dont celui du Ministère de la Culture, en 2000, ou encore l’ « Aftermath Grant Project », aux Etats-Unis, en 2004. Ayant collaboré avec « Médecins sans Frontières » et « Médecins du Monde », pour photographier en Afghanistan, Angola et Erythrée, s’étant concentré, en 2012 et 2013, sur le mur de séparation entre l’Inde et le Bangladesh, il travailla, en 2005 et 2010, sur des rituels vaudous en Afrique, aux États-Unis et à  Haïti, Gaël Turine a illustré plusieurs livres et a publié ses photos, notamment, dans « De Morgen », « Der Spiegel » , « De Volkskrant », « Geo« , « Grands Reportages », « Knack Magazine », « La Repubblica « , « Leica World »,  « Le Monde », « L’Express », « Libération », « Marie-Claire », « New Yorker », « New York Times », « Paris Match » , « Photo », « Photographers International », « Stern », « Time » et « Sunday Magazine ». En outre, sur la proposition des hôpitaux publics bruxellois « Iris-Sud », il réalisa, en 2021, un livre, « Traces », sur la « Covid », regroupant 155 portraits du personnel hospitalier.

Professeur, depuis 2016, à l’École de Journalisme de l’ « ULB » depuis 2016, il s’est investi dans des cycles de formations au Bangladesh, en Haïti, au Sénégal et en Turquie.

*** « Jacquie Maria Wessels. Garage Stills & Fringe Nature » :

Alors que l’informatique et la haute technologie sont désormais les composantes de toute nouvelle automobile,  l’existence même des garages à l’ancienne est mise à mal. Suite à ce constat, la photographe néerlandaise  Jacquie Maria Wessels (°1959) a parcouru le monde pour pénétrer à l’intérieur de garages  traditionnels de réparation, en Afrique du Sud, au Cambodge, à Cuba, en Italie, au Japon, au Maroc, en Pologne,  en Russie et au Sri Lanka.

« Je compte conjuguer la beauté et la tension de l’inconnu, ou de redécouvrir les objets qui font d’un garage ce qu’il est par le biais d’une nature morte intrigante et picturale », écrivit-elle.

Soulignant qu’une sélection de ses photographies a rejoint les collections photographiques du « Rijksmuseum »,  à  Amsterdam, notons qu’étant diplômée, en 1990, du département de photographie de l’ « Académie Gerrit Rietveld » , à Amsterdam, ayant étudié la peinture à l’ « Université Middlesex », à Londres, et la psychologie sociale, à l’ « Université libre », à Amsterdam, Jacquie Maria Wessels débuta sa carrière à Bruxelles.

*** « Sarah Lowie. Sixmille » :

La photographe locale Sarah Lowie (°Charleroi/1994), nous proposant son exposition « Sarah Lowie. Sixmille » écrit : « Six mille est le code postal de Charleroi, (autrefois) appelée ‘La Ville noire’. Petite ville couverte de poussière de charbon, où presque tout le monde se connaît, Charleroi est particulière, étrange, malaisante. »

Evoquant ce qu’était le groupe de rappeurs « Madil City Gang », l’artiste carolorégienne poursuit : « Venant de l’extérieur, je découvre une mentalité africaine sur le territoire européen, un monde fascinant, un univers complètement différent de celui que je connaissais. Ils m’ont laissée venir, sachant que j’étais photographe. Je suis revenue le week-end suivant, et celui d’ après, puis chaque fois que je le pouvais. J’ ai commencé à vivre avec eux, suivant leur routine, entrant dans leur intimité. Leur quotidien étant devenu le mien, je suis devenue l’ une des leurs. »

L’artiste locale Sarah Lowie étudia la photographie à l’ « ESA Le 75 » (« Ecole Supérieure des Arts de l’image Le 75 »), à Woluwe-Saint-Lambert, y complétant sa formation au sein de l’option « Images plurielles imprimées » (gravure, mise en pages de livres, sérigraphie). Son premier projet, « Sixmille », fut exposé, en 2016, à la « Galerie Contretype », à Bruxelles), en 2017, aux « Boutographies », à Montpellier. La même année, elle recevait, à Bruxelles, le « Prix Médiatine », lui permettant d’exposer à la « Centrale For Contemporary Art », à Bruxelles. Ayant exposé aux « Nuits photographiques d’Essaouira », au Maroc, elle y fut créditée d’une « Mention spéciale ».

Membre fondatrice, en 2020, de l’asbl « La Nombreuse », à Bruxelles, elle est notamment publiée, en Belgique, dans « Medor , « The Word » et « Wilfried », ainsi qu’aux Etats-Unis, dans « Burn Magazine« .

*** « Héloïse Boulanger. Canvas » :

Au sein de la « Galerie du Soir »,  Jean-Marie Wynants, chef-adjoint du Service Culture du quotidien « Le Soir », nous présente Héloïse Boulanger.

Comme toujours, Jean-Marie Wynants découvre de nouveaux talents, dont les oeuvres sont exposées face à l’accueil, au pied d’escalier principal. Cette fois, il nous présente une personne, Héloïse Boulanger, qui, au départ, ne se destinait nullement à la photographie. Lisons le propos de cette dernière :

« Au départ, la photographie n’était pas du tout une évidence pour moi. Durant mes études secondaires, j’étais partie pour me former à à l’aquarelle, au dessin, aux pastels, à la peinture, … Mon école offrait, en effet, la possibilité de pouvoir m’inscrire dans une section artistique … Malheureusement, très peu d’étudiants choisissaient cette option. A tel point que la direction décida de la supprimer les deux dernières années. Je fus donc forcée de me réorienter. »

« Parmi les différentes filières proposées, il y en avait une qui m’intéressait plus que les autres, la filière  audiovisuelle. C’était de l’enseignement transitionnel qui me permettait au moins de rester dans quelque chose d’artistique. On avait des cours de cinéma, mais aussi de photographie. Et en prime un cours d’histoire de l’art qui n’existait pas dans la section ‘arts plastiques’. Dans ce cours, la prof donnait la même importance à la photographie qu’à la peinture, m’ouvrant vraiment ouvert les yeux sur les possibilités de ce médium. »

Durant deux années, elle découvrit l’histoire de l’art et s’initia à la photographie, dont elle explora diverses possibilités. Poursuivant dans cette voie, elle choisit alors de s’orienter vers la « Haute Ecole Albert Jacquard », à Namur, réputée pour dispenser un enseignement très technique.

« Un de mes profs de secondaire, apprenant que j’avais fait ce choix, m’a prévenue : tu vas souffrir, leur truc c’est la technique, pas du tout la créativité. Mais j’ai persisté et j’ai choisi la section illustration en me disant que, si ça ne me plaisait pas, je pourrais toujours me réorienter … Nous étions là pour apprendre la technique et rien que la technique. Moi, j’étais le contraire de ça. En même temps, je réussissais bien, mais dès que je créais quelque chose qui me plaisait vraiment, on me remballait en me disant que c’était trop ‘artistique’ », nous confia-t-elle.

Devant cette incompréhension de ses professeurs, elle entreprit un apprentissage à la dure, qui culmina avec son  travail de fin d’études. Ainsi, elle nous dit : « Durant un an, j’ai sillonné l’Europe pour un travail en photo argentique,  qui afut validé par mes profs tout au long de l’année. Et puis au moment du Jury, je me suis fait allumer. On m’a dit qu’on m’offrait une deuxième chance. J’avais un mois pour présenter un autre travail. Et on m’a précisé qu’il fallait que ce soit plus technique et moins artistique. »

Elle poursuivit : « J’ai fait, volontairement, tout l’inverse de ce qu’on m’avait demandé. On me demandait un petit truc technique et j’ai décidé de présenter un gros truc artistique, autour de ressentis personnels. » Cette prise de risque maximale s’avéra payante. De fait, outre sa qualité intrinsèque, sa série « Canvas » est une exploration de toutes les techniques utilisables pour un tel travail : collages, couture, disques vinyles, impressions 3D et sur toile,  peinture, photographie, sérigraphie sur papier, superpositions de papiers calques, vidéo, … »

« Je suis très intéressée par le mélange des médias … J’ai utilisé les techniques en fonction de ce que je souhaitais exprimer », nous déclara Héloïse Boulanger.

*** « Randa Maroufi. Bab Sebta » :

Empruntant l’escalier, faisant face « Canvas », nous gagnons la « Black Box », afin de visionner un court-métrage de Randa Marouf (°Casablanca/1987), intitulé « Bab Sebta » (2019/19′).

Il s’agit, ici, d’une suite de reconstitutions de situations observées à Sebta, ville espagnole, enclavée sur le sol marocain, théâtre d’un trafic de biens manufacturés vendus au rabais, les histoires de contrebande y étant légion.

Nous assistons, ainsi – dans un espace-temps particulier -, à une authentique chorégraphie d’individus en  mouvement, mêlant des milliers d’employés de la douane, de la police et des personnes en attente de pouvoir passer, sur le continent africain, d’un pays européen à un pays africain.

Cette réalisatrice marocaine, travaillant à Paris, possède des diplômes, octroyé en 2010, de l’ « Institut National des Beaux-Arts », à Tétouan, au Maroc, en 2013, de l’ « École Supérieure des Beaux- Arts », à Angers, ainsi qu’en 2015 , du « Studio national des Arts contemporains-Le Fresnoy », à Tourcoing.

Ayant été membre artiste, en 2017-2018, de l’ « Académie de France-La Casa de Velázquez », à Madrid, le travail de Randa Maroufi fut présenté, notamment, en 2022, à la « Biennale de Lyon » ; en 2021, au « Musée Reina Sofía », à Madrid ; en 2020, au « New Museum », à New York ; en 2019, au « MUMAQ » (« MUsée des Métiers d’Art du Québec »), à Québec, au Canada ; en 2018, à la « Biennale de Dakar », au Sénégal ; en 2017, à la  « Biennale de Sharjah », au Liban ; à l’ « IFFR » (« International Film Festival Rotterdam » ; en 2015, aux  « Rencontres photographiques de Bamako », au Mali ; et en 2014, à la « Biennale de Marrakech », au Maroc.

En outre, ses films, « Le Park » (2015) & « Bab Sebta » (2019), remportèrent plusieurs Prix, en  Allemagne, en  Espagne, en France, aux Pays-Bas, au Royaume–Uni, en Suisse et en Belgique.

Ouverture : jusqu’au dimanche 24 septembre, de 10h à 18h, du mardi au dimanche. Prix d’entrée (incluant l’accès aux collections permanentes) : 8€ (6€, pour les membres d’un groupe & les seniors / 4€, pour les étudiants, les enseignants, les PMR & les demandeurs d’emploi / 1€25, pour les « Art. 27 / 0€, pour les moins de 12 ans). Pour les détenteurs d’un museumPASSmusées et pour tous, le dimanche 03 septembre : 0€, pour l’accès aux collections permanentes / 4€ (2€50, en tarif réduit), pour visiter les expositions temporaires. Contacts : 071/43.58.10. Site web  : https://museephoto.be/ (en cliquant sur « lire l’article », une version audio des textes nous est offerte).

Organisation de deux visites guidées particulières (Réservation obligatoire, via le site web, rubrique « activités ») :

** dimanche 17 septembre : visite et méditation guidées en pleine conscience (Prix d’accès : 10€) :

La pleine conscience, c’est être présent ici et maintenant. Regarder en pleine conscience est une invitation à se laisser aller à un regard non jugeant et bienveillant. La visite propose, grâce à des exercices simples, de méditations, ayant comme support les photographies du musée. Une occasion d’échapper au stress du quotidien.

** jeudi 20 septembre : visite guidée « inoubliable » (Prix d’accès : 0€) :

Adaptée aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et assimilées, ainsi qu’à leurs proches, la visite guidée « inoubliable » les plonge dans les collections permanentes et expositions temporaires. La visite tente de favoriser la cognition, les échanges, les émotion & l’expression orale, les émotions. Le médiateur culturel amène les personnes malades à faire appel à leurs capacités de communication préservées, en privilégiant, si nécessaire, la communication non verbale.

Yves Calbert.

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