"Le Chat au Châtelain", chez "Huberty & Breyne Gallery", jusqu'au 13 Mai
Alors que « Le Chat déambule » se présente en 22 imposantes sculptures en bronze, dans une allée du « Parc Royal », à Bruxelles, jusqu’au vendredi 30 juin, son créateur Philippe Geluck (°Bruxelles/1954) nous propose son exposition « Le Chat au Châtelain », à la « Huberty & Breyne Gallery », à Ixelles, sise au N° 33 de la place du Châtelain, jusqu’au samedi 13 mai.
Dessins, huiles sur toiles, sérigraphies, … nous y attendent, de même que quelque petites sulptures, sans oublier une série de photographies de Thomas Vanden Driessche (« Studio FiftyFifty »), qui, depuis plus de 4 ans, a suivi l’aventure du « Chat déambule », nous montrant, notamment, quelques-unes des sculptures géantes du « Chat » voyageant à l’arrière d’un camion traversant Paris.
Surprenante, une petite photo nous montre comment Philippe Geluck a finalisé la réalisation de : « Le juste Retour des Choses : pour une fois, c’est une Voiture qui est écrasée par un Chat ». De fait, une grue a été utilisée pour déposer une sculpture du « Chat » sur le toit d’une voiture, l’écrasant partiellement.
Au départ, Philippe Geluck, ayant repéré le modèle de voiture qu’il souhaitait utiliser et ayant appris qu’en Flandre, un couple souhaitait se séparer d’un tel véhicule, il alla à leur rencontre. « C’était touchant parce que leurs sentiments étaient partagés entre la joie de savoir que leur véhicule allait servir pour une exposition, et l’émotion de la voir être écrasée après tant de bons souvenirs, comme des départs en vacances », confia-t-il à un collègue de Caen, alors que cette sculpture y était exposée.
Notons l’habituel humour de l’artiste, avec la plaque minéralogique de cette « Trevis », du constructeur japonais « Daihatsu », qui porte la mention « CKC – 2021 », nous évoquant une évidence : « c’est cassé ».
N’étant plus à l’époque du « tout à la voiture », avec son « Chat » , qui nous aide à méditer, Philippe Geluck poursuivait : « La voiture, qui a fait rêver tout un tas de monde à une époque, est devenue un monstre qui nous étouffe. »
Avec d’autres photos, nous retrouvons Philippe Geluck travaillant dans son atelier, des ébauches et maquettes étant, également, exposées.
Mais revenons aux peintures et sérigraphies de Philippe Geluck, certaines nous invitant à une promenade à travers le monde de l’art, rendant des hommages, parfois insolents mais toujours tendres, à ses grands prédécesseurs, tels César Baldaccini (1921-1998), Paul Cézanne (1839-1906), « Christo » (Christo Javacheff {1935-2020} & nJeanne-Claude Denat de Guillebon {1935-2009}), Keith Haring (1958-1990), « Hergé » (Georges Remi/1907-1983), Yves Klein (1928-1962), Léonard de Vinci (1452-1519), Lucio Fontana (1899-1968), Gustav Klimt (1862-1918), Piet Mondrian (1872-1944), Edvard Munch (1863-1944), Pablo Picasso (1839-1906), Pierre Soulages (1929-2022), Johannes Vemeer (1632-1675), Andy Warhol (1928-1987), …, voire à ses contemporains, tels Pierre Alechinsky (°Saint-Gilles/1927), Fernando Botero (°Medelin/1932 ), Daniel Buren (°Boulogne-Billancourt/1938), …
Cette exposition « Le Chat au Châtelain », nous offre l’opportunité de revenir sur l’extraordinaire carrière de Philippe Geluck, un artiste polyvalent, particulièrement accessible, aimant aller à la rencontre de ses lecteurs, des collectioneurs, des journalistes et de tous ceux qui (re)découvrent ses sculptures.
Après ses études artistiques à l’ « INSAS » (« INstitut Supérieur des Arts du Spectacle »), entammées en 1972, Philippe Geluck, en 1974, monte sur les planches du « Théâtre national de Belgique ». Il y interprète, à 100 reprises , « Werther 75 », d’Ulrich Plenzdorf. Viendront ensuite, « Roméo et Juliette », de William Shakespeare ; « L’Opéra de quat’Sous », de Berthold Brecht et Kurt Waill ; ou encore « Faust », de Johann Wolfgang von Goethe. En deux ans, son éphémère troupe du « Théâtre Hypocrite » présente trois pièces, certaines étant jouées à Paris et Lausanne. En 1982, il interprête, seul en scène, « Un certain Plume », d’Henri Michaux.
L’année suivante, en 1983, on le retrouve au cinéma, aux côtés de Fanny Ardand, dans un film d’André Delvaux, « Benvenuta » (Bel.-Fra.-Ita/105′). Il faut dire que, durant son enfance, son père étant distributeur de films d’Europe de l’Est, il eut l’occasion de côtoyer, à la maison, Milos Forman, Roman Polanski, Andreï Tarkovski et autres réalisateurs talentueux.
Au « Magic Land Theatre », en 2010, il crée son second seul en scène : « Je vais le dire à ma Mère ». Entretemps, en 1977, à la « RTBF », il anime « 1, 2, 3, j’ai vu », puis dès 1978, « Lollipop », avec la marionnette « Malvira », avant de créer le « Docteur G », en 1987, qui sera publié en albums, par les Ed.« Casterman », dès 1990. Entre 1987 et 1999, il devient le partenaire de Jacques Mercier, dans « Le Jeu des Dictionnaires »,puis dans « Monsieur Dictionnaire », dans les années 2010. 1991 Son émission « Un peu de tout » bat des records d’audience, remportant, en 1991, le « Prix de l’Emission la plus drôle », à la « Rose d’Or de Montreux ». Plus tard, sur « France 2 », il est l’un des chroniqueurs de « Vivement Dimanche », sur le divan de Michel Drucker, épaulant Laurent Ruquier, de 2000 à 2007, dans« On a tout essayé », qu’il rejoint, en radio, sur« Europe 1 », dans « On va s’gêner ».
Quant à ses débuts dans le dessin, il n’avait que 14 ans lorsqu’il publie ses premières illustrations dans « Azimut », une brochure de la « Régie Renault ». En 1971, Bob De Groot, rédacteur en chef d’un mensuel destiné au corps médical,« L’Oeuf », publie ses dessins humoristiques. En 1980, il illustre le carton de remerciements, suite à son mariage avec Dany , qu’il avait rencontré sur le tournage d’un court-métrage intitulé « Le Coq mouillé » : « J’ai dessiné une Madame Chat tout sourire, et à l’intérieur, on voyait Monsieur Chat qui était monté dessus, ce qui n’a pas plus à deux vielles tantes, à l’époque ! C’est comme ça que tout a commencé ! Plus tard quand ‘Le Soir’ m’a demandé d’inventer un personnage, je me suis souvenu du carton. La bestiole est devenue mon interprète, comme un acteur pour qui j’écris des sketches ! En fait, c’est un autre moi-même. À travers lui, je me libère. Je joue parfois avec le feu, mais c’est le rôle de l’humoriste ! ». Le mardi 22 mars 1983, dans « Le Soir », « Le Chat » venait de naître !
Pour l’anecdote, Philippe Geluck signale que « Le Chat » a été dessiné, pour la 1ère fois, le 03 mars 1983, vers 22h30, au moment même où un maître absolu de la BD, « Hergé » (George Remi/°Etterbeek-1907) rendait son dernier souffle… Le père de « Tintin » nous quittait lorsque « Le Chat » naissait…
Le succès ne fut pas direct. Ainsi après ce 1er strip, Philippe Geluck reçut une 1ère lettre, anonyme, qui disait, évoquant « Le Chat » : « Votre ours ne me fait pas rire ». En 1985, pour le magazine « A suivre », « Le Chat » prend des couleurs, alors qu’en 1986, son 1er album est publié aux Ed. « Casterman ». Le 23 mars 2003, pour le 20è anniversaire du « Chat », « Le Soir » publie son quotidien sans une seule photo, mais avec 80 dessins de Philippe Geluck. En 2008, « Le Chat » a 25 ans et « Télérama » lui dédie un « Hors Série » de 100 pages.
Vient 2013, les 30 ans du « Chat » et sa décision, le vendredi 22 Mars, d’abandonner ses publications dans « Le Soir », l’occasion d’un hommage dessiné, offert par 40 collègues , ce brillant auteur écrivant : « Après 1.560 semaines de publications assidues, je me dis que j’aimerais parfois prendre le temps de partir huit jours par-ci ou dix jours par là, que j’aimerais me consacrer à certains projets différents sans être astreint à cette échéance hebdomadaire de devoir remettre mes dessins au journal. »
« Je crois que ‘Le Chat’ tire son succès de ce qu’il est sympathique et gros, un bon gros. Ce côté nounours plaît aux enfants, même si ce n’est pas à eux que je m’adresse. Il est aussi insolent et ne ménage parfois pas le lecteur. Il a tendance à exprimer ce que les gens n’arrivent pas toujours à formuler. Il est gros et lourd, mais aussi drôle et léger. J’aime cet oxymore du gros léger », déclara Philippe Geluck.
Notons que « Le Chat » illustra des timbres-poste belges et français, alors que, grâce au « street art » , nous le retrouvons sur une façade bruxelloise, ceci en n’oubliant pas, en 2001, la production de « La Minute du Chat », des séquences animées de 48″, qui étaient diffusées avant les « J.T. » de la « RTBF » et de « France 2 ».
Fait « Officier des Arts et des Lettres », en 2017, recevant les insignes des mains de l’Ambassadrice de France en Belgique, Claude-France Arnould, il était, déjà,« Commandeur dans l’Ordre de la Couronne », en Belgique, en 2009, année durant laquelle il reçoit le « Globe de Cristal de la meilleure BD », pour « Une Vie de Chat », le 15è tome de cette série, édité par « Casterman », en 2008. En 2013, à Bruxelles, Le « Grand-Prix Saint-Michel » lui est décerné, alors qu’en 2017, à Louvain-la-Neuve, il est le lauréat du « Prix Diagonale spécial 10 Ans », alors qu’en 2006, il avait gagné le ciel, l’astéroïde 181627 ayant été baptisée « Philgeluck ». Plus près de nous, en 2008, à Hotton, dont il est devenu citoyen d’honneur, l’on inaugurait la Place du Chat, avant qu’une école primaire ne soit baptisée « Ecole Philippe Geluck », en 2009, à Herseaux, son nom étant repris dans le« Petit Larousse », depuis 2011.
En juin 2017, lors de sa réception à l’Ambassade de France, à Bruxelles, face à sa famille et autres invités, Philippe Geluck déclara : «J’ai l’impression d’être récompensé pour m’être follement amusé au cours de toutes ces années … Alors si on commence comme ça, sachez mes chers amis et mes chéris, qu’à mon tour je voudrais vous élever au plus haut rang de l’Ordre de l’amour et de l’amitié! Car ce que j’ai vécu avec vous tous en rigolade, en tendresse et en moments partagés mérite les plus hautes distinctions»… Qu’écrire de plus !
Alors, n’hésitons pas à pousser la porte de la « Huberty & Breyne Gallery », sur la place du Châtelain, à Ixelles, afin de (re)découvrir le travail de Philippe Geluck, exposé précédemment au « Musée Soulages », à Rodez, au « Scriptorium » de l’Hôtel de Ville, à Caen, au « Musée en Herbe », à Paris, à la « Galerie Huberty & Breyne », à Paris, et à la « BRAFA », à Bruxelles.
Ouverture de l’ « Huberty & Breyne Gallery » : jusqu’au samedi 13 mai, du mardi au samedi, de 11hà 18h, ainsi que les dimanche 30 avril et 07 mai, de 11h à 17h. Entrée libre. Contacts : 02/893.90.30. Site web : https://hubertybreyne.com/.
Face aux critiques qui lui furent adressées, quant au musée consacré à son célèbre « Chat », dont la construction vient de débuter, ce brillant artiste bruxellois déclara : « Si on estime que ce que je fais n’est pas de l’art, je m’en fous ! »
Soulignons qu’à l’issue de son exposition sur les Champs Elysées, Philippe Geluck confia : « Quand je vois la joie et l’émotion que ça a apporté aux gens, je me dis : quel cadeau de la vie que de pouvoir partager ça ! »
Alors, n’hésitons pas à partager ce cadeau, en n’oublions pas, également, de profiter d’une petite déambulation dans l’une des allées du Parc Royal, où, jusqu’au vendredi 30 juin, « Le Chat », se décline en 22 sculptures, signées Philippe Geluck.
Yves Calbert.