"Mobilis", à la "Galerie du Beffroi", à Namur, jusqu'au 09 Avril
A l'initiative de Valérie Sacchi - pensant aux artistes qui avaient dû procéder au décrochage de leurs oeuvres, à peine l'exposition, organisée dans le cadre de la 6è édition de "Chambres avec Vues", avait-ele été ouverte au public, au début du premier confinement -, la Ville de Namur nous propse, jusqu'au vendredi 09 avril, sa nouvelle exposition "Mobilis", à la "Galerie du Beffroi".
.Ceci étant écrit, notons qu'il ne s'agit pas d'une copie conforme de l'exposition prévue en mars 2020, puisque c'est en septembre 2020 que Valérie Sacchi a lancé un nouvel appel à projets, ceux-ci devant répondre à un thème précis ayant trait au mouvement...
Par cette volonté, elle donne raison à une phrase reproduite en seconde page du catalogue, rédigée par Anne Hébert, écrivaine, poétesse, dramaturge et scénariste québécoise : "Ce n'est pas une mince affaire que de demeurer fidèle à sa plus profonde vérité, si redoutable soit-elle, de lui livrer passage et de lui donner forme".
Une réussite que la présente exposition, fort agréablement scénographiée, le choix des projets retenus ayant été réalisé par les deux commissaires, Jean-Luc Martin, directeur de l' "Académie des Beaux-Arts" de Namur, et Bernard Boigelot, professeur retraité de cette même Institution, artiste plasticien ayant exposé, en 2020, à Jambes, à la "Galerie Détour", en septembre, et, à la "Tour d'Anhaive", avec le collectif "Arts Emulsions", dans le cadre de "Chambres avec Vues", une exposition interrompue par le premier confinement.
Mais revenons à la "Galerie du Beffroi", où, à peine entrés, notre regard se lève vers des nuages créés, en couvertures de survie, par Xavier Mossoux, qui écrit : "Cette oeuvre à la fois poétique et politique, souhaite mettre en lumière la problématique de l'accueil des réfugiés qui, tentent de traverser les frontières, en quête d'une sécurité et d'un avenir meilleur."
Quel message, pour entamer notre visite, l'artiste précisant que le matériau de son oeuvre, "la couverture de survie, rappelle la traversée et l'accueil des migrants après leur périple en mer."
La "Galerie du Beffroi" se composant de deux salles, dans la seconde, notre attention est attirée par l'installation de Cathy Peraux, avec des mains virevoltant dans l'air, alors qu'un modèle semblale, mais avec des corps, accueille les personnes arrivant à Namur, étant exposée à l'intérieur du "cube" de la gare ferroviaire. L'originaité de ces deux installations est d'être, comme elle l'écrit, des "sculptures mobiles plastiques, agitées par un souffle d'air mécanique, celui du vientilateur, leur imposant un cycle de vie et de mort"
Parmi les autres oeuvres, subjectivement, voici quelques-un.e.s des artistes dont le travail a retenu notre attention :
* François Xavier Defosse, avec "Signatures du Temps", trois oeuvres aux couleurs vives, paraissant être des peintures, mais qui sont, en fait, des photographies, qui, réalisées en macro, nous sont présentées via un tirage sur plaques d'aluminium "cronalux". Il nous confie : "Ce que vous voyez, ce ne sont pas des photographies de traits de pinceaux, mais bien de coups donnés sur des containers". Vraiment étonnant !
"J'avais 45 ans lorsque j'ai acheté mon premier appareil photographique, bénéficiant d'une formation artistique, à Namur, ayant suivi des cours à l' 'IATA' ('Institut d'enseignement des Arts Techniques, sciences et Artisanats'), j'ai, ensuite, réalisé des peintures monumentales en noir et blanc, à l' 'Académie des Beaux-Arts' de Bruxelles, mes projets étant, désormais, dans la photographie. Ainsi, en mai, je vais exposer à Forest, dans la galerie 'The Palm beach', où j'exposerai, sous le titre 'Minéral Végétal', des photos des roches de Senjojiki, découvertes sur la Côte de Wakayama, au Japon. Elles sont, actuellement, en court d'impression sur papier coton baryté.
Commentant ses photographies dans le catalogue, François Xavier Defosse écrit :"Une égratignure, une griffure, elle donne vie au métal. Une corrosion annoncée, serait-ce une signature calligraphiée du temps ? J'extrais l'imaginaire du réel. L'abstraction et la couleur ont une place dominante ert primordiale dans mon travail pictural. L'observation détaillée du monde, qui m'entoure, me permet de poser un regard photographique transmué.'
* Jacques Moisse nous présente, également, trois photographies, classiques, en noir-et-blanc, quant à elles. Autodidacte, lui aussi, il reçut son premier appareil photographique à l'âge de 12 ans, il abandonna ce loisir, pour ne s'y intéresser à nouveau, qu'au delà de son 55è anniversaire, découvrant le numérique, qu'il exerce à l'occasion de 'workshops'. Il nous confie : "A Montpellier, je reçus les conseils d'une photographe renommée, Nathalie Balsan-Duverneuil, plus connue sous le nom de Nath Sakura."
"Si j'apprécie particulièrement les noirs bien noirs, je ne retouche pratiquement jamais mes photographies, tous les effets étant dans la prise de vue. Mes trois photos accrochées ici on été réalisées lors 'un autre 'workshop', à Malmédy, l'une avec mon fils Autonin, et les deux autres avec Celya, 10 ans, l'une de cinq modèles qui étaient à la disposition de nos objectifs, l'une d'elle étant prise sous l'eau."
* Geneviève Schoumaker, de son côté, nous offre un tableau au graphisme des plus réussi. Elle écrit : "Je travaille sur la trace. Or, cette trace est bien la mémoire remise en cause. La vibration dénote une volonté d’ajouter le mouvement au mouvement, questionnant l’éphémère dans notre société contemporaine. Cette écriture vibrante est le simulacre syncopé d’un déplacement dans l’espace, qui s’inscrit par ce fait même dans le temps. Je récupère et reconstitue le souvenir, la trace, en assemblant les fragments d’une autre entité temporelle : la calligraphie."
* Avec Fabienne Christyn, "le temps se trouve comme suspendu à la limite du bonheur", comme elle l'écrit, poursuivant en ces termes : "Ma démarche est une réflexion en même temps qu'une proposition artistique sur la question 'comment accompgner avec souplesse le mouvement de la vie afin d'en réaliser son ppotentiel ?' "
L'oeuvre qu'elle nous présente est des plus orginales. Que faire des milliers de programmes édités pour "Chambres avec Vues". Utilisant un treillis pour base elle y a placé nombre de pages de ces livrets, enroulées sur elles-mêmes, ces pages blanches étant bordées, sur les quatre côtés, de papier crépon noir, placés de la même manière dans le treillis, ce noir évoquant le deuil qu'elle a dû faire de la présence de son travail dans cette même "Galerie du Beffroi", en mars 2020...
Elle nous confie : "L'an dernier, ici-même, j'avais 'tricoté' des films vidéos, afin de créer mon installation, qui n'avait rien à voir avec les techniques que j'avais expérimentées aux 'Beaux-Arts' de Bruxelles, puis de Namur, à savoir la céramique et la sculpture, ayant bénéficié des conseils éclairés d'excellents formateurs. Appréciant le papier et le fil, cette anée, comme toujours, j'ai d'abord dû m'imprégner du thème proposé, réfléchir ensuite, mon bonheur, telle une étincelle, étant d'arriver à réaliser ce que j'avais penser dans mes réflections. Ce bonheur, c'est de pouvoir me dire, simplement : 'j'ai pu le faire', mon travail n'ayant, ainsi, rien à voir avec un simple bricolage. Ce que vous voyez, ici, constitue, pour moi, la manière la olus pertinente de raconter le thème proposé..."
* Bernadette Demoulin écrit : "Au fil du temps, l'image s'est effacée, ce n'est plus que le souvenir d'une exposition qui aurait dû avoir lieu il y a un an." Même démarche, donc que Fabienne Christyn, mais en utilisant, quant à elle, coupées en bandelettes tissées, les affiches non utilisées de "Chambres avec Vues".
* Ingrid Charlier nous dévoile "Move", avec un personnage hésitant, réalisé, sur une note de cours, traitant de la nutrition du muscle, avec un fil piqué dans le manuscrit, l' hésitation de cette silhouette laissant "flotter un sentiment d’hésitation à avancer. Sentiment ô combien d’actualité !..." De son oeuvre particuière l'artiste écrit : "Le fil est mon trait, le vieux papier ma matière… Ma démarche artistique est celle d’une rencontre entre un sujet et unsupport, une richesse qui ne se trouve qu’à travers une rencontre réussie... Le contenu et la matière délicate de mon support entrent, ici, en relation avec le piqué de mon personnage."
* Isabelle Grevisse, toujours avec du papier, ici, avec des fils métalliques et de couture, qui évoquent "une chute joyeuse", écrit-elle, précisant : "C'est l'infiniment léger de la nature qui m'inspire : une herbe, une ombre, le tracé du vent, une ligne sur la roche... Les matériaux que j’utilise sont fragiles comme la vie... C’est une fragilité que je veux transmettre, une fragilité heureuse... Le travail est minutieux et lent, temps de maturation et de sérénité. Ce temps est un temps ami, qui interroge, encourage ou avertit quand il faut aller plus loin, creuser, affiner le propos."
Hitorienne de l'art, Isabelle Grevisse, petite fille de Maurice Grevisse (1895-1980), formée à l' "Académie des Beaux-Arts",de Namur, par Yves Barla et l'un des deux commissaires de la présente exposition, Bernard Boigelot, elle est l'une des cofondatrices de l'association artistique "Be Craft".
* Ayant exposé, à Arlon, en 2017, en duo avec la précédente artiste, Cécile Ahn - qui exposa en Allemagne et en Suisse, aussi bien qu'à Anhaive ou à Bomel, - nous présente, un autre travail en papier finement découpé. Elle nous explique : "Ma démarche artistique est basée sur la récupération de papier, matière première que bon nombre de personnes n'hésitent pas à jeter, voire gaspiller sans réflexion... Je collecte, trie, sauve ce matériau de base pour le retravailler et lui donner une seconde vie, lui rendre de la valeur et amener le public à réfléchir aux multiples et potentielles possibilités qu'offre ce papier."
"Pour cette oeuvre, sur le thème 'Mobilis', j'ai récolté des cartes de 'Namur Mobilité' offetes par la Ville. J'ai transformé ces documents en dentelles de papier. L'ensemble suggère légèreté et fluidité, douceur et patience, et invite à l'évasion." Quelle finesse !
* A l'opposé de ce travail du papier, tout en finesse, Vinciane Wéry nous propose un sculpture métallique qu'elle écrit ainsi : "L'air dans ma sculpture est réprésenté par la spirale en acier rouillé prolongé par une spirale blanche et bleue, symbole du mouvement dynamique, de sa légèreté et de son déplacement. Elle évoque le passage du temps, son rythme, aec ses cycles et ses répétitions, autour du socle en bois, représentant la terre entourée de son atmosphère... L'air éveille tous nos sens... Le mouvement c'est la vie, la rencontre et l'échange..." Une bien belle définition du mouvement, mais aussi de "Mobilis", une exposition se révélant être un lieu de rencontre et d'échange!
* De rencontre, il est question avec Florian Tourneux, un photographe, qui s'il ne présente qu'une photo à "Mobilis", prise sur une autoroute, nous montre ses albums, l'un 'eux présentant son travail sur la shoah, qu'il exposa, il y a peu, aux "Abattoirs de Bomel-Centre cuturel de Namur", lui qui se rendit à Auschwitz,... en auto-stop, inspiré par son arrière grand' mère qui, en Allemagne, abrita des juifs durant la seconde guerre mondiale... Ayant terminé, en 2017, ses études de photographie à Saint-Luc, à Bruxelles, depuis un an de pandémie, il ne peut gagner sa vie, ne pouvant, notamment, réaliser des reportages de mariages... Face à cette situation, ce Jambois écrit néanmoins : " Aller vers l'avant sans reculer, sans savoir si on se dirige dans la bonne direction."
* Et pour l'un des artistes, Samuel Evrard, il convient donner de l'importance au relief dans la photographie, avec l'appui d'insispensables lunettes 3D. Il écrit : "Il s’agit d’un cliché de famille scanné par mes soins, restauré et transformé afin de faire bouger le spectateur... Au travers de ces clichés, j’essaie de replonger dans l’atmosphère d’insouciance et de joie d’après-guerre qui régnait à l’époque et de raconter des fragments d’histoires de personnes qui ont compté pour moi."
Mais revenons à sa photo prise sur l'autoroute, en pensant à ce que le photographe américain Elliott Erwitt écrivit : "Pour moi, la photographie est l’art de l’observation. Il s’agit de trouver quelque chose d’intéressant dans un endroit ordinaire (comme une autoroute/ndlr). Cela n’a pas grand-chose à voir avec les choses que vous voyez, mais cela a tout à voir avec la façon dont vous les voyez."
Ne pouvant détailler le travail des 24 artistes retenus par les Commissaires, voici les noms des autres exposants : Françoise Bastin, Hennou Ben Houssine, Katerine Bernier, Gérard Béthume, Frédéric Capieaux, Anne Champion, Fred Collin, Philippe Kesseler, Françoise Laporte, Sébastien Roberty et Michel Somville.
Interrogreant Valérie Sacchi sur l'origine du titre de cette intéressante exposition, elle nous confia : "Nous aurions pu choisir "Mobilité", mais ce mot faisait un peu trop référence à la circulation train-bus-voiture. D'autre part ''Mobilis' évoque la dynamique culturelle et toutes les synergies qui continuent à se mettre en place au sein de la Ville", du "Delta", en bord de Sambre, jusqu'au "Pavillon numérique", qui vient de s'ouvrir sur l'esplanade de la Citadelle, là où va bientôt arriver le nouveau téléphérique, en passant par l'ouverture prochaine du Musée Archéologique au "Pôle des Bateliers"... Que de mouvements à Namur !
Découvrons donc bien vite "Mobilité", à la "Galerie du Beffroi", une expo qui - pour Valérie Sacchi et son équipe du Service de la Cuture - "laisse place à des cogitations, des remue-méninges, des audaces et idées créatives de la part du monde artistique, chaque plasticien s’interrogeant sur l’exploration de l’espace et la notion de mouvement. Certains se réapproprient les techniques traditionnelles, d’autres explorent de manière participative et critique des technologies expérimentales."
"L’axe essentiel qui prévaut est la manière dont la mobilité est envisagée dans chacune des propositions plastiques. Il s’agit pour l’artiste de fixer conceptuellement la notion de mouvement entre l’œuvre et le spectateur, et cela dans le cadre d’un échange créatif immédiat. La notion d’interactivité, n’est-elle pas en soi synonyme de mobilité 'douce', facteur humain qui fait du spectateur un acteur du projet de l’artiste ?"
"L’aspect multidisciplinaire de l’exposition met en exergue cette particularité de l’artiste : un chercheur qui conceptualise, intègre des découvertes, dégage du sens en permettant de relier ensemble des éléments du problème, ce qui contribue ainsi à l’émergence d’une conscience nouvelle, ce nouveau 'paysage d’idées', permettant de reconstruire une nouvelle représentation."
Soulignons que nous pouvons offrir 500€ à l'artiste qui remportera le "Prix du Public". N'oublions donc pas à déposer notre bulletin de vote dans l'urne...
Ouverture : jusqu'au vendredi 09 avril, du mardi au samedi de 11h à 18h et le dimanche de 12h à 18h. Entrée libre. Catalogue broché offert. Réservations obligatoires : en ligne, sur www.namur.be/galeriedubeffroi ou au 081/ 22 84 76. Obligations sanitaires : port du masque bucal et respect d'une distanciation physique d'1m50 entre les "bules".
Pensant plus spécialement aux lecteurs namurois, signalons qu'une exposition au "BPS 22", à Charleroi, mérite le détour, nous replongeant dans les années '70, avec le collectif d'art vidéo "Ruptz", dont les membres, Jean-Louis Sbille (qui, de 1985 à 1990, présenta "Cargo de Nuit" à la "RTBF"), Marc Borgers et Anne Frère se réunissaient à Namur, au "Puits Connette", dans la rue des Brasseurs, le titre de l'exposition étant : "Ruptz (1975-1977) des Fous qui seront des Classiques"...
En ce même lieu, ouvert du mardi au dimanche, de 10h à 18h, le co-commissaire de "Mobilis", Bernard Boigelot, expose avec son comparse Eric Adam, ses oeuvres d'art postal... Réservations obligatoires : 071/27.29.71 ou www.bps22.be/fr/infos-pratiques/tarifs-et-reservations. Prix d'entrée : 6€ (réduits : 4€, 3€ & 1€25).
Yves Calbert,
avec des extraits du catalogue, rédigés par Marie-Odine Puiatti.