La "Galerie Huberty et Breyne", sur la Place du Châtelain
Ce vendredi 07 septembre, restera dans la mémoire de Marc Breyne et Alain Huberty, qui inaugureaint leur nouvelle "Huberty et Breyne Gallery", au N° 33 de la Place du Châtelain, à Ixelles, en présence de nombreux artistes.
Rencontre avec Marc Breyne :
"J’ai commencé à collectionner des éditions originales quand j’avais 12/13ans, puis, un peu plus tard, les planches. Mon premier dessin était une planche de 'Félix' , par Maurice Tilleux (1921-1978), vendu 1000 francs belge, soit 25€. A l’époque je n’avais vraiment pas d’argent. Une fois acheté on m’a proposé de me racheter ce dessin 4 fois son prix. A partir de ce jour, je me suis dit que je pouvais à la fois acheter, vendre et collectionner..."
"Bruxellois, comme mon partenaire, Alain, seul, en 1983, à 22 ans, je me suis lancé dans le secteur de la BD, avec un magasin sur la Chaussée de Wavre. Cinq ans plus tard, je m'associais, pour un an, à un premier partenaire, dans son magasin du 'Fantôme Espagnol', sur le Boulevard Lemonier, un Boulevard où, un peu plus loin, je reprenais mon indépendance dans un autre magasin de vente de bandes dessinées."
"C'est l'époque où je fis la connaissance d'un professeur de mathématiques, devenu mon partenaire actuel, Alain Huberty. Avec lui, je déménage à nouveau, pour une troisième adresse sur le Boulevard Lemonier, cette fois près de la Place Fontainas. Et voici que, en 1995, contatatant que la BD était en pleine évolution, plusieurs dessinateurs se lançant sur le marché del'art, proposant à la vente, leurs planches originales, nous décidons de créer une Galerie présentant des planches originales de bandes dessinées."
"Vient le temps, en 2012, de nous installer au 'Sablon', sous un nouveau nom, "Galerie Huberty et Brayne", accueillant aussi, désormais, en différents formats, des recherches plus personnelles de nos artistes. Nous voici en 2018, désormais, sur la Place du Châtelain, où nous avons pu acheter l'édifice sis au N° 33, le prix d'achat de notre ancienne Galerie, au 'Sablon', où nous n'étions que locataires, étant trop élevé. Et si nous gardons un bon souvenir de ces années vécues en ce lieu, davantage consacré aux antiquaires, nous nous trouvons, ici, avec un espace lumineux, avoisinant les 900 m2, sur une Place où d'autres Galeries d'Art sont déjà établies, profitant d'un quartier des plus dynamiques, bien fréquenté par les artistes, étudiants, lintellectuels, ..."
"Notons qu'au 'Sablon', où nous maintenons, néanmoins, notre 'shop', nous étions les premiers à proposer, au niveau de notre galerie, quelques 300 m2, ... trois fois moins qu'aujourdhui..."
Nous lui demandons quelle est l'origine de l'ancien nom du magasin de BD devenu Galerie d'Art ! Pourquoi cette appelation "Les Petits Papiers" ? Serait-ce en rapport avec la dimension des petites cases, propres aux bandes dessinées classiques ?
"Pas du tout ! En fait, en 1983, ne sachant comment appeler mon magasin, je demandai l'avis d'un collègue, dont l'établissement commercial s'appelait 'Petits Papiers'. Par facilité, je repris ce même nom, en le faisant précéder du pronom 'Les', un nom populaire que nous avons conservé près de 30 ans, jusqu'en 2012. Constatant que de nombreuses Galeries portaient le nom de leurs galleristes, nous fîmes de même,'Les Petits Papiers' devenant l' 'Huberty et Breyne Gallery'.
Avez-vous toujours votre Galerie à Paris ?
"Oui, bien sûr, Paris étant une capitale incontournable, afin de présenter le travail des artistes avec qui nous collaborons, nous sommes toujours bien installés à proximité des 'Halles' et du 'Musée du Louvre', dans une propriété du groupe 'Hermès', au N° 91 de la Rue Saint-Honoré."
En dehors de vos Galeries de Paris et Bruxelles, où peut-on trouver "Huberty et Brayne" ?
"Pour ce qui concerne nos présences extérieures, à Bruxelles, nous nous rendons à la 'BRAFA' ('Brussels Art Fair'), à 'Tour et Taxis', en janvier, dépuis 12 ans déjà, à une époque où nous avons introduit la BD au sein de ce prestigieux Salon d'Art et d'Antiquité (prochaine édition, du samedi 26 janvier 2018 au dimanche 03 février 2019."
"Plus près de nous, du vendredi 14 au dimanche 16 septembre, nous serons présents à la 'Fête de la BD', dans le Parc de Bruxelles. A Paris, nous participons, au 'Grand Palais' à l' 'Art Fair', consacrée à l'art contemporain, et à 'Drawing Now', au 'Carousel du Louvre', un Salon centré sur l' art du dessin."
Quelle est le sujet de votre prochaine exposition ?
" 'Kivu', dessiné par Christophe Simon et scénarisé par l'inaltérable Jean Van Hamme."
Alain Huberty rejoint Marc Breyne :
"J’étais vraiment décidé à faire l’acquisition d’une planche de Gaston Lagaffe. J’avais rassemblé toutes mes économies soit à l’époque 2 000 Francs belge (50€). Marc n’avait pas de planche de Gaston mais je connaissais quelqu’un qui en vendait deux. Je n’avais pas la somme pour l’ensemble alors j’ai convaincu Marc Breyne d’acheter la seconde puis de la revendre. A cette époque, tout était disponible, à des prix bien plus accessibles qu'aujourd'hui. Au départ, on ne cherchait pas à vivre de la revente, mais, simplement, à financer notre collection. Ensuite, avec le bénéfice, nous avons investi dans d’autres originaux. C’est comme ça que tout a commencé, un jour de 1988..."
L'actuelle exposition de "Midam" :
Dès notre entrée dans la Galerie, nous découvrons le monde de "Midam" (Michel Ledent/°1963), un Bruxellois né à Etterbeek, une localité qui vit naître deux grands noms de la bande dessinée, "Hergé" (Georges Remy/ 1907-1983) et André Franquin (1924-1997).
Ayant vécu son Service militaire comme dessinateur-décorateur au sein de la "Force navale belge", "Midam" fut, durant une dizaine d'années, l'un des guitaristes du groupe "Boy Band' Dessiné", avant de se consacrer exclusivement à la BD, créant "Kid Paddle", en 1993, au sein du N°2887 de l'hebdomadaire "Spirou", pour lequel il animait plusieurs rubriques depuis 1992. Son premier album fut édité par "Dupuis", en 1996. Suite à un différent avec cet éditeur, en 2014, il rejoint les auteurs des "Editions Glénat", son dernier album, le N° 15, "Men in Blork" étant publié en novembre 2017, l'ensemble des ventes des 15 tomes atteignant les 8 millions de livres vendus, alors que 104 épisodes d'animation sont diffusés dans plus de 20 pays.
Lauréat, en 2005, à Bruxelles, du "Prix St.-Michel Jeunesse", pour "Game Over", une série "spin off" de"Kid Paddle", créée en 2004, mettant en scène l'avatar virtuel de ce dernier, à savoir "Le Petit Barbare", "Midam" connaît Marc Breyne et Alain Huberty de longue date, puisque les ayant rencontrés dans leur ancienne Galerie du Boulevard Lemonier.
"A l'occasion des 25 ans de Kid Paddle et de ma carrière, Alain et Marc m'ont proposé d'investir leur toute nouvelle 'Huberty et Breyne Gallery' ", nous confie "Midam", ajoutant : "Néanmoins, ayant horreur des expos de bandes dessinées, avec des cases, en noir et blanc, de 7,5 cm de hauteur, je me devais de passer à d'autre formats à cette occasion, les grandes illustrations, de différents formats, peintes en couleurs, que je présente ici , étant plus pertinentes pour une telle exposition.
Alain Huberty de réagir : "Ce que 'Midam' nous présente aujourd'hui, et ce jusqu'au samedi 13 octobre -, de ses agrandissements de plusieurs cases de BD, à des créations originales de plus grands formats -, est une démarche artistique correspondant à ce que nous avons envie de réaliser. C'est vraiment super intéressant de travailler avec lui, qui aime inventer, inover, touchant, désormais, au 'street art', à l'art contemporain."
Et notre galleriste de déclarer : "Ce fut, autrefois, la même chose avec la photographie, que l'on ne voulait pas reconnaître comme étant de l'art, car n'étant que de simples tirages... Il y a une dizaine d'années, nombreux étaient ceux qui ne voulaient pas considérer de simples cases originales de BD, en noir et blanc, comme étant de l'art..."
"Avec 'Midam' , qui joue le jeu, réalisant des choses très différentes, nous allons plus loin que le cadre de la bande dessinée, ce que nous souhaitons depuis lors, encourageant les auteurs de bandes dessinées à réaliser de telles peintures, ce qui nous permet d'exposer leurs oeuvres dans des Salons, tels la "BRAFA", à Bruxelles, permettant , ainsi, aux dessinateurs d'augmenter leur cote et .... le prix de vente de leurs oeuvres, ce qui constitue notre challenge... L'art, mélange de genres, se veut pluriel..."
"Midam" reprend : "J'ai confiance en Alain et Marc, ... mais je ne suis pas fidèle pour être fidèle. Ainsi, suite à un différent avec les "Editions Dupuis", j'ai repris mon indépendance, après 15 ans de travail en commun..."
Revenant à la présente exposition, il ajoute : "Avec mes oeuvres en acrylique, à l'opposé de l'utilisation de l'aquarelle, qui part du blanc, je suis plus libre, ne devant pas inventer une histoire, suivre un scénario, trouver un gag à chaque page pour 'Kid Paddle" ou autres... Et, croyez moi, si mon éditeur ne trouve pas de gag dans ma BD, il m'invite à dîner pour m'exprimer son mécontentement... Dans la présente démarche, je peints ce que j'aime, des pizzas au drapeau américain..."
Ainsi, nous découvrons, dans une scénographie intitulée "New-Blork City", un accrochage de cinq toiles présentant ce dernier d'une manière personnelle des plus originales, ou nous présentant une vision décalée de l'univers consumérique de la '"Big Apple' , illustrant, avec humour,"Burger King", "Domino's Pizza", "Kentucky Fried Chiken", "Macy's" , "Starbucks Coffee", ...
Et "Midam" d'aller plus loin dans sa création en présentant des dessins invisibles à l'oeil nu... Ainsi, chaque visiteur peut emprunter une lampe de poche dont le rayonnement ultraviolet nous permert de découvrir, jouxtant différentes toiles, des dessins bleus se détachant de murs blancs, avec des textes particulièrement humoristiques, tels celui placé à côté d'une des deux oeuvres géantes de l'artiste, évoquant celui-ci : "Ah, le con, il a agrandi ma photo d'identité."
Notre attention est attirée, notamment, par une toile toute blanche, porteuse seulement de sa signature, avec, à sa droite deux personnages, qui, peints sur le mur, dialoguent : "Hmm c'est assez dépouillé !", dit le premier, "Je ne comprendrai jamais l'art contemporain"..., ajoute le seconde... Hors, grâce au rayon ultraviolet de la lampe de poche, cette toile immaculée se peuple de très nombreux petits personnages et ces trois mots en gros caractères : "New Blorck City".
Avant de quitter l'immense espace qui lui est consacré, un dernier rayon nous dévoile deux personnages et une question : "Et ici, c'est quoi", et une réponse : "Ce sont les auteurs qui n'ont pas payé leur cotisation à 'Huberty et Breyne Gallery' ."
De cet amusant clin d'oeil, n'étant visible qu'avec la dite lampe de poche, decendant trois marches, nous nous trouvons dans une salle présentant quatre sections, la première, à l'extrême gauche, nous offrant un espace pour une seconde exposition, qui sera renouvelée tous les 15 jours, accueillant, dans un premier temps, jusqu'au 22 septembre, l'auteur français Philippe Berthet, originaire de Thorigny-sur-Marne. Il nous propose une quarantaine d'oeuvres , dont une seule en couleurs, l'original de la couverture, illustrant "L'Art de Mourir", son dernier album, publié par "Dargaud", scénarisé par l'Espagnol "Raule".
Les deux sections centrales de cette salle, nous présente d'oeuvres originales de différents artistes, comme François Avril, Philippe Geluck, Miles Hyman, Jacques de Loustal, Milo Manara, …
A l'extrême droite, dans l'ultime section, nous découvrons, enfin, ce qui fit le début de l'ancienne Galerie "Les Petits Papiers", une série de planches originales de BD, allant de deux planches du "Don Bosco" (1950) de "Jijé" (Joseph Gillain/1914-1980) à deux autres de "Spirou", l'une de Yves Senté et Laurent Verron, l'autre de "Yann" (Yann Le Pelletier) et Olivier Schwartz, en passant par bien d'autres.
Soulignons encore qu' "Huberty et Breyne" organisent, également, depuis 2009, des ventes aux enchères de planches de BD et d'autres oeuvres des artistes exposant dans leurs deux galeries d'art, sachant que ce n'est qu'en 1999, avec une double planche d' "Hergé" (Georges Remy/1907-1983), du "Sceptre d'Ottokar", que l'intérêt des maisons de ventes se manifesta, permettant une haussedes prix de plus de 61%, entre 1999 et 2001..."
Marc Breyne et Alain Huberty nous précisent leurs motivations :
"L'ouverture de cet epace est l'aboutisement d'une démarche entreprise il y a plus de 30 ans, celle de contribuer au rayonnement de l'art de la bande dessinée. Dans cette continuité, il nous semblait important de crée un lieu d'échanges et de rencontre entre les auteurs, les artistes, les collectionneurs, les éditeurs, mais aussi les amateurs."
Ouverture d' "Huberty et Breyne Gallery" : du mardi au samedi, de 11h à 18h. Entrée gratuite, toutes les oeuvres étant à vendre. Catalogue disponible à l'accueil. Site web : www.hubertybreyne.com.
Yves Calbert.