Une Elgé de Houffalize en pole position au carnaval du soleil

La résurrection
C’est religieusement que Stéphanie Lambin enlève l’opaque plastique de protection qui recouvre l’automobile centenaire. Religieusement comme Marthe, confiante en sa résurrection, dépouilla un jour Lazare de son suaire.
Cette centenaire est la seule rescapée d’une série de véhicules, les Elgé, construits en 17 exemplaires, tout au début du siècle dernier, par son arrière-grand-père René Lambin de Houffalize.
Nous avons déjà présenté la vénérable ancêtre (année de construction : 1913) sur ardenneweb et dans ardennemagazine.
Elle est en grande partie restaurée, certes, mais pas encore bonne pour le … contrôle technique…
- On annonce qu’elle roulera en tête du carnaval du soleil ? Elle pourra rouler dans un mois?
- Elle doit rouler !On n'a pas le choix ! Telle est la réponse souriante de Pascal Flausch, le chef mécanicien carrossier préposé à la restauration.

Le point sur l’évolution de la remise en état (fin juin 2013)
Pascal Flausch aura mis la main à tout, de A à Z, depuis que la Elgé a été retirée du brol de feu Georges Lambin, à Spa, et acquise par Michel Lambin, petit-fils du constructeur et patron des garages Toyota de Houffalize et Arlon.
- Q. : Elle était en piteux état. Il aura fallu combien de temps pour la restaurer ?
- Pascal Flausch : Au moins trois mille heures de travail. La carrosserie m’a pris énormément de temps : examiner des photos et des dessins d’archives, et partir de tôles nues pour rétablir des profils bien façonnés.
- Tout a été fait ici à l’atelier ?
- P. F. : Bien sûr que non. C’est Georges Muls, de Spa, un mordu des vieilles voitures, qui a coordonné les recherches et les commandes. Il a trouvé des pièces anciennes, mais il en a fait faire des nouvelles identiques à celles de l’époque. Elles viennent de tous les pays du monde. Le rayonnage des roues, par exemple, a été usiné en Thaïlande. Et le moyeu est un bijou où il a fait griffer « Elgé », la marque de fabrique.
- Qu’est-ce qui est d’époque ?
- P. F. : Beaucoup ! le moteur, et en général toute la mécanique est d’origine. De même que le volant, de même que le pare-brise serti dans un châssis en bois…
- Et la sellerie ?
- P. F. : Le garnissage en cuir a été confié à Joël Leyder, un artisan tapissier garnisseur de Longchamps Bertogne. Là aussi, le résultat sera parfaitement réussi.

Les souvenirs du cousin Thierry
C’est par notre site web que le lointain cousin Thierry Lambin a appris que la vieille Elgé avait été « déterrée ».
Il doit être le seul survivant à avoir roulé dedans.
Avec des souvenirs précis : « une panne en plein Bruxelles, parce que la courroie de cuir n’arrêtait pas de sauter ce jour-là … Puis, l’année où le contrôle technique a été imposé, la Elgé a été refusée pour absence de feu stop et de clignotant… Le document du refus était sur le buffet de Georges la dernière fois que je lui ai rendu visite. »
Et Thierry de féliciter de façon posthume le cousin Georges d’avoir toujours tout conservé dans son invraisemblable fourbis de Verviers « où on ne progressait qu’à la pelleteuse ».
En concluant : « tous les enfants de guerre ont cette obsession de tout conserver. »

© reportage de René Dislaire
© Photos et vidéos de Jean-Marie Lesage

Lien vers la vidéo de Jean-Marie Lesage