Histoire de la Corée - Des origines à nos jours (Pascal Dayez-Burgeon)

écrit par RobertMARY
le 18/06/2018
Histoire de la Corée - Des origines à nos jours (Pascal Dayez-Burgeon)

Voici un livre qui se lit comme un roman, je le conseille comme première approche du sujet.

Au moment où Donald Trump rencontre Kim Jong-un cela vaut certainement la peine de savoir comment nous en sommes arrivés là. La question du nucléaire nord-coréen fait évidemment partie des sujets traités dans l’ouvrage, mais pas seulement.
Comment a été fondé le pays, quel a été l’impact du confucianisme, quel rôle ont joué ses deux grands voisins au cours de son histoire (Chine et Japon), pourquoi le pays a-t-il été et reste divisé, comment ont évolué les relations entre les deux pays formant pourtant une même nation, une réunification “à l’allemande” est-elle possible et à quel coût ? Ce sont autant de questions auxquelles le livre apporte une réponse.

Il existe peu de livres sur l’histoire de la Corée, de plus il me semble difficile de comprendre l’histoire du Japon et de la Chine sans parler de la Corée (exemples: invasion mandchoue de la Corée en 1638, propagation du bouddhisme au Japon via la Corée, la Corée comme marche-pied pour une invasion nipponne de la Chine, la révolte paysanne de 1894 menant à la guerre sino-japonaise de 1894-1895, …)

Des informations méconnues figurent dans cet ouvrage telles que :
• la création de l’alphabet coréen (Hangul) en 1446 sur demande du roi Sejong lui-même afin de lutter contre l’illettrisme du peuple -le chinois classique étant jugé trop complexe et réservé aux élites, le roi imposant la simplicité afin écrit-il « qu’un homme intelligent puisse étudier l’alphabet en une matinée et un imbécile en pas plus de dix jours »- (le Hangul porte le nom de Joseongul en Corée du Nord, d'ailleurs les différences de prononciation entre les deux pays font que parfois les coréens ne se comprennent pas complètement) ;
• la proposition japonaise de scinder la Corée en deux entre le Japon et la Chine en 1593 ;
• l'existence d’une armée de libération communiste prête à débarquer en Corée en août 1945 mais la capitulation japonaise met fin à ce projet ;
• la décision du comité olympique d'attribuer au Japon la médaille d'un athlète coréen Sohn Kee-chung, lequel dut courir sous le nom japonisé de Son Kitei aux jeux olympiques de Berlin en 1936 (on notera que le médaillé de bronze Nam Sung-Yong était également coréen) ;
• la fixation en 1945 de la frontière au 38ème parallèle dans un état de grande improvisation du côté américain tandis que les soviétiques se servirent des propositions japonaises de 1896 vis-à-vis du Tsar Nicolas II fixant la frontière au 38ème parallèle précisément (propositions rejetées à l'époque);
• le refus des autorités américaines en 1950 de tenir compte des aspirations du peuple coréen pour créer un régime démocratique représentatif des partis politiques existants en Corée du Sud ;
• l’armistice en 1953 jamais signé par la Corée du Sud mais bien d’une part par l’ONU représenté par les USA, et d’autre part la Chine et la Corée du Nord. Les deux Corées restent donc juridiquement en guerre ;
• la volonté nord coréenne de profiter du départ américain du Vietnam pour réunifier le pays en 1975 mais Moscou et Pékin interdisent fermement toute intervention armée ;
• l’existence de cas de fraternisation entre les gardes frontières de chaque pays aux points d’accès de la DMZ (zone “démilitarisée” étant paradoxalement la plus militarisée de la planète) malgré des échanges de tirs sporadiques ;
• la « Kimilsungia » est une orchidée pourpre baptisée ainsi par le président indonésien Sukarno en 1965 tandis que la « Kimjongilia » est un begonia hybride aux fleurs rouge-orangé offerte à Kim Jong-il pour son 40ème anniversiare en 1968 par un botaniste japonais (c'est une épisode passé sous silence vu les relations entre le Japon et la Corée du nord), depuis 2002 ont lieu des floralies politiques bisannuelles pour chacune des deux fleurs (les compositions des ambassades russes et chinoises ont toujours été très élaborées) ;
• la Corée du Nord a considéré sa capitale officielle comme étant Séoul jusqu'en 1972 puisque le pays prétendait représenter l'entièreté de la péninsule, après quoi la fonction officieuse de capitale pour la ville de Pyongyang fut officialisée ;
• les USA ont retiré leurs missiles nucléaires de Corée du Sud en 1991, ce qui n'empêcha nullement Pyongyang de mener à bien son programme nucléaire justifié en partie par la « présence » de ces missiles américains ;
• le rôle du PDG de Hyundai louant à la Corée du Nord la ville touristique montagneuse de Kumgangsan (permettant aux familles séparées de se revoir épisodiquement) dans la tentative gouvernementale sud coréenne de rapprochement entre les deux pays dans le cadre de la politique d'ouverture dite « du rayon de soleil » ;
• les sociétés telles que Huyndai (qui produit aussi des navires), Samsung (qui construit aussi des immeubles dont les tours jumelles Petronas à Kuala Lumpur en 1998) ou LG sont des « Chaebol » (c.-à-d. « amas de biens/propriétés » en coréen) ;
• Il existe deux associations de résidents coréens au Japon, L'union des résidents (dite Mindan) regroupe 65% d'entre eux (ce sont ceux de la Corée du Sud) et l'Association générale des coréens résidant au Japon (dite Chongryon) regroupant 25% d'entre eux (elle est considérée comme l'ambassade officieuse de la Corée du Nord au Japon), ...

Le livre montre comment les deux Corées ont évolué économiquement. Ainsi le taux de croissance fut dans les années 50-60 nettement plus favorable à la Corée du Nord avant de s’essoufler tandis que le démarrage de la Corée du Sud fut plus capricieux. Même si in fine la Corée du Sud s’en est bien sorti elle aurait pu connaître un état de faillite en décembre 1997, elle a été soutenue par le FMI (moyennant des conditions drastiques de réforme), lequel a été intégralement remboursé en août 2001.

Le livre montre l’évolution des deux pays sur la scène internationale mais surtout celle des relations intercoréennes. Le livre parle aussi de la culture et des conditions de vie des citoyens dans les deux pays (et notamment les grandes famines en Corée du Nord dès 1995 menant à la perte de 6% de sa population en 1999).

Bref un très bon livre pour tout qui veut comprendre l’évolution des relations entre la (les) Corée(s), le Japon et la Chine au travers de différentes époques jusqu’à la période actuelle.

Dans la même collection figure le livre “La Corée du nord en 100 questions”, ouvrage que je recommande également même si les réponses fournies pour chacune des questions sont parfois trop courtes à mon goût.

L'ouvrage intitulé "la Corée du Nord à bicyclette" de John Everard ancien diplomate britannique à Pyongyang mérite également une considération particulière. On y apprendra que Kim Il Sung demandera l'aval de Staline pour attaquer la Corée du Sud en 1950 mais surtout que ce dernier malgré son soutien en matériel militaire lui fera clairement comprendre dans la débâcle d'octobre 1950 que les troupes soviétiques ne prendront pas le risque de se confronter aux troupes américaines, l'URSS préférant perdre la Corée du Nord à ce risque. Staline préféra en outre laisser bombarder la Corée du Nord par l'aviation Onusienne pendant trois ans plutôt que de laisser aux USA un moyen de conclure un armistice, il faudra attendre la mort de Staline pour que la situation se débloque. En octobre 1950 Kim Il Sung se tournera dès lors vers la Chine qui initialement avait refusé de le soutenir. A cette époque l'armée de la Corée du Nord était exangue, à partir de ce moment les troupes de l'ONU ne seront presque plus confrontées qu'aux "volontaires" chinois jusqu'en 1953. Kim Il Sung tentera d'influencer la stratégie des armées chinoises mais le maréchal chinois Peng Dehuai lui fera clairement comprendre qu'une fois le 38ème parallèle atteint il n'était pas question d'attaquer le sud de la péninsule (il lui aurait dit "allez dans ce bunker et soyez sage!") privant de ce fait Kim Il Sung de "sa victoire" (le maréchal chinois ne sera pas dupe et ne laissera pas Kim Il Sung commettre à nouveau les mêmes erreurs mais cette fois avec ses "volontaires"). Dès lors Kim Il Sung sera convaincu qu'il ne peut compter sur personne, ni sur l'URSS ni sur la Chine, il considérera que la Corée du Nord devra devenir une autocratie et que les dons de ces deux pays lui sont dus. Ils constituent un droit et aucunement une faveur, aucun remerciement n'est nécessaire puisque lui seul incarne l'avant-garde de la révolution justifiant sa forme particulière de nationalisme mais surtout d'indépendance: le Juche.

Pour celles et ceux qui veulent aller plus loin veuillez noter qu’il existe un cours d’histoire de la Corée enseigné en anglais à la KUL dans le cadre du Certificat en études coréennes.

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