Les filles modèles du séminaire de Bastogne : fin

écrit par ReneDislaire
le 26/05/2010
La flute a bec: une pedagogie en vogue vers 1960, inspiree de Karl Orff

Autres temps, autre mœurs

C’est toujours difficile, et c’est même impossible, de se plonger, de se replonger, dans le bain d’une époque révolue.
Vous faites la queue à un guichet et quelqu’un se faufile pour gagner deux places ? Dites ce que tout le monde aurait dit il y a encore 40 ans : chacun son tour, comme à confesse ! Personne ne comprendra à quoi vous faites allusion.
Quel père voit son militaire de fils partir pour l’Afghanistan en lui confiant qu’il serait fier qu’il meure au champ d’honneur ?
Imaginez-vous qu’une religieuse dût dissimuler son visage afin que celui-ci ne soit pas photographié, du moins identifiable ? C’était le cas à l’école ménagère du Séminaire de Bastogne, dans les années 70. Mais imaginez-vous que le port du pantalon était interdit aux adolescentes: le pantalon , ça aurait fait pour le moins « mal élevé ».
Qui aurait prédit au professeur Guy Lutgen, dans les années soixante, que son fils à naître, Benoît, serait un jour ministre du tourisme d’une Wallonie prônant un plan d’implantation de camps de nudistes ? Pourtant c’est fait.
Du visage que devait se voiler au moyen d’une casserole Sœur Theodora dans ses cuisines (voir photo) aux centres de naturistes qui vont fleurir pour le plus grand bien de l’image de la Wallonie et de son redressement économique, un fameux pas a été franchi.

Le prestidigitateur et la cuisse innocente

Il y avait donc une trentaine de filles à l’école ménagère. Elles cohabitaient, confinées au cloître, dans la grande enceinte du séminaire, au service de quelque 500 élèves de l’autre sexe.
Un dimanche après-midi, vint un prestidigitateur, pour « relever » une fête.
Comme cela arrivait parfois, on avait massé les garçons à l’avant, et les filles dans le fond de la salle.
Et voilà l’artiste qui demande un volontaire qui prêtât son concours pour un numéro. Et pour forcer l’agrément, il désigne une fille.
Elle monte sur la scène, s’assied.
Quelques paroles. Puis tombe la question : Mademoiselle, quelle heure est-il ?
Elle regarde son poignet : plus de montre.
Obtempérant aux ordres du malicieux, elle tâte son corps. Elle relève légèrement sa jupe : les séminaristes pouvaient alors voir la montre, mais que regardèrent-ils en réalité ?
Comme un bolide, Monsieur le Supérieur fonce sur la scène, rubicond, pétant de rage.
Il se fâche sur qui ? Sur le prestidigitateur ? Que nenni. Sur la jeune fille ? Pas davantage. C’est la sœur supérieure, la pauvre, qui ramassa tout : « c’est une honte, ma Sœur, de donner une éducation aussi dévergondée à des élèves que les parents vous ont confiées ».
Le Supérieur allait bientôt être muté, par décision pontificale. Pour devenir évêque. Il s’agit de Monseigneur Musty, PC de la province de Luxembourg, mais au demeurant rigoureux comme pas un janséniste en matière de mœurs (PC : personne connue, célèbre).

Une ancienne, Hildegard Pickard, termine un récent poème par ces vers :
" Aujourd’hui tous ces moments nous font bien rire.
"Nous sommes indemnes ! Sans vous mentir ! "
Sûr que Hildegard compte maintenant plus de pantalons que de jupes dans sa garde-robe.

La fin

L’école ménagère du séminaire de Bastogne avait été créée en 1939 par des Sœurs allemandes, expatriées en raison des mesures de Hitler à l’égard de leur institution. Elle ferma en 1981.
D’autres filles affluèrent alors. C’était la mixité du séminaire, la fusion avec l’école des Sœurs de Notre-Dame. Bonjour l’INDSé.

René Dislaire

Liens:
http://www.ardenneweb.eu/reportages/2010/l_ecole_des_filles_du_seminaire...
http://www.ardenneweb.eu/reportages/2010/quand_le_seminaire_de_bastogne_...
http://www.ardenneweb.eu/reportages/2010/quand_le_seminaire_de_bastogne_...

  • La flute a bec: une pedagogie en vogue vers 1960, inspiree de Karl Orff
  • Soeur Theodora, chef des cuisines. Interdiction de laisser photographier son visage. Donc, elle le dissimule derriere une casserole (vers 1970)
  • La flute est a la mode, mais aussi la guitare
  • En grand uniforme, y compris la chevelure.
  • Ne vous tracassez pas, ce sont deux filles. Au carnaval, presqu'une fete religieuse. On est germanophone, ou on ne l'est pas!
  • Rien que des filles
  • Carnaval: rien que des filles
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